mardi 17 avril 2007

Sermon du 15 avril 2007 - Quasimodo Geniti

QUASIMODO GENITI Ap 1 . 9 – 19

Châtenay-Malabry 15.04.2007

1:9 Moi, Jean, votre frère,
qui prends part à la détresse, à la royauté et à la persévérance en Jésus,
j'étais dans l'île appelée Patmos
à cause de la parole de Dieu et du témoignage de Jésus

1:10 quand je fus saisi par l'Esprit,
au jour du Seigneur ;
j'entendis derrière moi une voix,
forte comme le son d'une trompette,

1:11 qui disait :
"Ce que tu vois,
écris-le dans un livre,
et envoie-le aux sept Eglises :
à Ephèse, à Smyrne, à Pergame, à Thyatire, à Sardes, à Philadelphie et à Laodicée."

1:12 Je me retournai
pour voir celui qui parlait avec moi.
Quand je me fus retourné,
je vis
sept porte-lampes d'or

1:13 et, au milieu des porte-lampes,
quelqu'un qui ressemblait à un fils d'homme.
Il était vêtu d'une longue robe
et portait une ceinture d'or à la poitrine.

1:14 Sa tête et ses cheveux étaient blancs comme laine blanche, comme neige.
Ses yeux étaient comme un feu flamboyant,

1:15 ses pieds ressemblaient à du bronze incandescent,
et sa voix était comme le bruit de grandes eaux.

1:16 Il avait dans sa main droite sept étoiles ;
de sa bouche sortait une épée acérée, à deux tranchants,
et son visage était comme le soleil lorsqu'il brille dans toute sa puissance.

1:17 Quand je le vis,
je tombai à ses pieds, comme mort.
Alors il posa sur moi sa main droite,
en disant :
"N'aie pas peur !
C'est moi qui suis le premier et le dernier,

1:18 le vivant.
J’étais mort, mais je suis vivant à tout jamais,
et j'ai les clefs de la mort et du séjour des morts.

1:19 Ecris donc ce que tu as vu,
ce qui est et ce qui va arriver après."


Chers frères et soeurs,
chers prêtres royaux

dans le Royaume du Christ glorifié !


Parmi les textes proposés pour ce dimanche Quasimodo Geniti – le premier dimanche après Pâques – j’ai pris celui-ci, tiré du livre de l’Apocalypse de Jean, d’abord parce que les jeunes veulent consacrer une réunion à ce livre prochainement, ensuite, parce que l’un de nos trois groupes d’étude biblique vient de commencer l’étude de ce livre cette semaine.

Ce que nous vivons au jour le jour n’a souvent rien de commun avec l’expérience exaltante que l’apôtre Jean a connue quand « il fut saisi par l’Esprit » et qu’il reçut la « révélation […] de ce qui doit arriver bientôt » (Ap 1.1).

Le message que nous avons entendu à Pâques distinguait déjà entre « l’être et le paraître, » entre ce que nous sommes en réalité et ce de quoi nous avons l’air. La « révélation » de notre texte va dans le même sens. Là,


LE CHRIST SE REVELE A NOUS
1
dans l’Evangile,
2
pour resserrer
ses liens avec nous ici-bas,
3
et ceci, pour l’éternité.


***** 1 ******
Le Christ se révèle à nous dans l’Evangile.

En grande partie depuis sa résurrection, puis définitivement depuis son ascension, notre Seigneur bien-aimé nous prive de sa présence visible. Nous ne l’avons jamais vu. Il a certainement ses raisons pour cela. Il ne tient pas qu’on le suive par soif du sensationnel – comme ceux qui voulaient « en faire leur roi », non pas à cause de son Evangile, mais parce qu’il les avait miraculeusement nourris ! (Jn 6.15)

Sachez-le : avec sa résurrection et son ascension notre Seigneur n’a pas coupé les ponts avec nous. Au contraire, s’il nous prive de sa présence visible, c’est pour que rien ne nous détourne de l’essentiel, de son message de grâce, de sa Parole de salut, c’est – paradoxalement ! – pour qu’il puisse mieux « se révéler » à nous.

« Se révéler ! » Savez-vous ce que signifie le mot « apocalypse » ? Avez-vous déjà cherché ce livre dans une Bible allemande ou anglaise ? Le mot « Apocalypse » ne s’y trouve pas, et pour cause, c’est du grec. Et comme le reste de l’Ecriture sainte, dans ces langues on a aussi traduit le titre de ce livre, apokaluyis (apokalupsis) (Ap 1.1) : « Offenbarung » en allemand, « revelation » en anglais, « révélation » en français.

Si, en français, on avait toujours traduit ce mot par « révélation », cela n’aurait pas donné l’adjectif français « apocalyptique », adjectif qui n’existe d’ailleurs pas dans la Bible. On n’aurait pas non plus d’idée préconçue catastrophique de ce livre. Car, s’il est vrai que celivre annonce, entre autre, aussi des catastrophes, ces mêmes menaces sont toutes déjà annoncées dans les évangiles et les épîtres, même si c’est dans un autre style.

Or, la « révélation » du dernier livre de la Bible n’a pas été faite à Jean pour traumatiser les croyants, mais pour nous fortifier dans notre foi, notre joie et notre espérance. Dès le verset 3 de cette « révélation de Jésus-Christ » (Ap 1.1) à l’apôtre Jean, nous apprenons : « Heureux celui qui lit à haute voix les paroles de la prophétie, comme ceux qui les entendent et qui gardent ce qui y est écrit ! » (Ap 1.3)

C’est pour rendre « heureux » que Jésus a révélé ce livre à la chrétienté, pas pour nous catastropher. Cela, nous le verrons aussi avec l’extrait sur lequel porte notre prédication d’aujourd’hui.

Arrêtons-nous un instant à notre scène : la Parole de Dieu est adressée, est révélée et inspirée à l’apôtre Jean.

Où ? – Sur « l’île de Patmos », une île d’environ 16 km de long et 9 de large, à une cinquantaine de kilomètres des côtes de l’Asie Mineure.

Pourquoi l’apôtre se trouve-t-il sur cette île ? – Il l’explique lui-même : « Moi, Jean, votre frère, […], j'étais dans l'île appelée Patmos à cause de la parole de Dieu et du témoignage de Jésus. » En d’autres termes : il y avait été exilé à cause de son apostolat. Cette île rocheuse servait à recevoir des personnages considérés comme dangereux. Rome y exilait des philosophes. Si Jean y a été envoyé en exil, c’est que son ministère devait prendre de l’ampleur et gêner le pouvoir en place. Vu son grand âge – il approchait des cent ans – on devait considérer que c’était assez dur pour lui de se retrouver sur cette île peu accueillante.

Quand cela s’est-il passé ? – C’était une époque où les persécutions des chrétiens avaient pris de l’ampleur, sous l’empereur Domitien, entre 90 et 96 après Jésus-Christ.

Jean indique même le jour de la semaine où la « révélation » de ce livre lui a été faite. Cela s’est passé « le jour du Seigneur » (v. 10), le jour que notre Seigneur Jésus avait choisi pour ressusciter, celui aussi qu’il avait choisi pour répandre le Saint-Esprit sur ses disciples, lors de la première Pentecôte : un dimanche, donc.

Comment cette « révélation » est-elle parvenue à Jean ? Cela est indiqué dès le premier verset du livre : « Dieu a donné à Jésus-Christ [cette] révélation pour montrer à ses esclaves ce qui doit arriver bientôt ; il [Jésus, à son tour,] l’a signifié en envoyant son ange à son esclave Jean. » (Ap 1.1)

Jean donne plus de détails encore sur la manière dont Jésus s’est révélé à lui. « Je fus saisi par l'Esprit » – on peut aussi traduire : « Je fus ravi en esprit » – en tout cas il a des « visions » (Ap 9.17) : il « voit » des scènes se dérouler devant ses yeux, autour de lui.

Il ne rêve pas. Ses facultés sont toutes éveillées, même actives. Il entend : « j’entendis derrière moi une voix forte. » Il se déplace pour mieux voir : « je me retournais pour voir. » Il sent le contact de son Seigneur : « il posa sur moi sa main droite. » Plus loin, on verra Jean tâter et goûter durant la vision (Ap 10.9). Oui, ce qu’il vit est extra-ordinaire, cela sort vraiment de l’ordinaire, c’est un vrai miracle, mais il le vit consciemment en agissant et réagissant à ce qu’il entend et voit lors de cette vision. Ses facultés ne sont pas occultées.

A qui s’adresse cette « révélation » ? – « J'entendis derrière moi une voix, forte comme le son d'une trompette, qui disait : "Ce que tu vois, écris-le dans un livre, et envoie-le aux sept Eglises : à Ephèse, à Smyrne, à Pergame, à Thyatire, à Sardes, à Philadelphie et à Laodicée." » (Ap 1.3)

La « révélation » ou « apocalypse » de ce dernier livre de la Bible s’adresse donc à « sept Eglises ». « Sept » est le nombre de la perfection, de la totalité. Dans le langage visionnaire et symbolique de l’Apocalypse, « les sept Eglises » représentent l’Eglise universelle, ce que Jean appelle au début de notre texte, « la royauté », la royauté dans le « Royaume ». (Ap 1.6) de Dieu et de Christ, car, grâce à l’œuvre du Christ, nous sommes tous « un royaume et des prêtres » (Ap 5.10).

Et Qui est au centre de cette « révélation » extraordinaire ? – Ecoutons encore l’Apocalypse dans son langage extraordinairement symbolique !

« Quand je me fus retourné, je vis […] quelqu’un qui ressemblait à un fils d’homme. » (v. 12-13) Là, Jean s’exprime comme le prophète Daniel. Celui-ci appelle le Messie promis « le Fils de l’homme » (Dn 7.13 ; 10.16) quand il le décrit au jour du Jugement Dernier. C’était tellement clair, que les chefs juifs ont crié au blasphème quand Jésus s’est présenté à eux comme « le Fils de l’homme ». (Mt 25.3 – 26.4)

« Il était vêtu d’une longue robe » (v. 13b) ou ample tunique, signe de sa majesté, et pour cause, il apparaît dans tout le livre comme le Fils de Dieu, le puissant Sauveur et majestueux Juge de l’humanité.

« Sa tête et ses cheveux étaient blancs comme laine blanche, comme neige » (v. 14a), autrement dit : il était couronné de sainteté, le blanc étant la couleur symbolique de la pureté absolue, de l’absence totale de péché.

« Ses yeux étaient comme un feu flamboyant. » (v. 14b) Leur force de pénétration est telle que rien ne saurait rester caché devant elle : il est omniscient, « il sait toute chose » (Jn 21.18).

« Ses pieds ressemblaient à du bronze incandescent » (v. 15a). Là où ses pieds passent, ils brûlent tout sur leur passage et ne laissent que des cendres. Ce détail souligne la venue du Christ pour juger le monde.

« Sa voix était comme le bruit de grandes eaux » (v. 15b). La voix du Christ glorifié et triomphant est une voix toute-puissante. Contrairement à sa Parole de grâce, l’Evangile, à laquelle on peut s’opposer, personne ne peut résister à sa voix toute-puissante : tout doit lui obéir, ce qui provoquera, entre autre, la résurrection des morts et le Jugement Dernier.

« Il avait, dans sa main droite, sept étoiles. » (v. 16a) La « droite » est le symbole de la majesté et du pouvoir. Jésus explique lui-même, après notre texte : « Quant au mystère des sept étoiles que tu as vues dans ma main droite, [… ce] sont les anges des sept Eglises » (Ap 1.20). Rappelez-vous : le mot grec « ange » signifie « messager ». Il s’agit ici de ceux qui annoncent le message de Dieu dans les paroisses ; il s’agit du ministère pastoral institué par le Christ et à ses ordres. Ils se trouvent « dans la main » du Christ. Nous, les pasteurs, nous devons exercer notre ministère avec fidélité comme agents et serviteurs du Christ, sous son autorité, mais aussi – Dieu merci ! – avec sa bénédiction, et ceci quelles que soient les fluctuations de l’opinion publique.

Cette présentation du Christ ne cadre pas tellement avec la relation confiante que nous entretenons avec notre Seigneur bien-aimé, n’est-ce pas ? Il est cependant bon de rappeler que celui qui nous a sauvés dans son amour infini n’est pas une « poule mouillée », le « bon Jésus » des images pieuses, mais bien le Maître tout-puissant de l’univers, celui à qui nous devons tout et à qui le Père a remis le pouvoir et le jugement.

Cette vision vous inspire-t-elle de la crainte ? – Sans doute, au premier abord. Ce fut, d’ailleurs, aussi la réaction – j’allais dire : viscérale – de Jean. Voilà comment il nous en parle :

« Quand je le vis, je tombai à ses pieds, comme mort. Alors il posa sur moi sa main droite, en disant : "N'aie pas peur ! C'est moi qui suis le premier et le dernier, le vivant. Je suis mort, mais je suis vivant à tout jamais, et j'ai les clefs de la mort et du séjour des morts." » (v. 17-18)


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Le Christ se révèle à nous dans l’Evangile
pour resserrer
ses liens avec nous ici-bas.

N’oublions pas : l’aspect terrifiant sous lequel Jésus apparaît dans cette vision, c’est l’aspect sous lequel il est apparu à Satan, c’est ainsi qu’il l’a fait fuir et qu’il nous a arrachés à ses griffes pour nous gagner pour son « Royaume ».

A nous qui plaçons notre foi en lui, il nous dit – comme il l’a dit à Jean, et comme il l’avait déjà dit précédemment à Zacharie, à Marie et aux bergers de Bethléem : « N’aie pas peur ! » (v. 17) – « N’ayez pas peur ! » (Lc 1.13 ; 1.30 ; 2.10) – vous faites partie du « Royaume », vous êtes solidement « unis à moi », le Maître du ciel et de la terre, « le Tout-Puissant » (Ap 1.7), l’Eternel. « Je suis le Premier et le Dernier, le Vivant. » (v. 17), la source de la vie : unis à moi par la foi, vous avez part à ma vie.

Jean « vit sept porte-lampes d’or et, au milieu des sept porte-lampes » le Seigneur Jésus dans sa gloire et sa toute-puissance.

Jésus explique lui-même, dans le verset qui suit notre texte : « Les sept porte-lampes sont les sept Eglises » (Ap 1.20), la totalité des croyants, l’Eglise universelle.

Il veut nous rappeler : Vous qui vous confiez en mon sacrifice expiatoire et en ma glorieuse résurrection, vous, les croyants, vous êtes en sécurité « dans ma main droite », en sécurité aussi dans les épreuves ; vous serez même en sécurité quand d’autres, les incroyants, « se lamenteront » (Ap 1.7) lors de ce qui va accompagner mon retour en gloire à la fin du monde.

Oui, réjouissons-nous ! celui qui est Maître de l’univers et de l’éternité, se tient parmi nous, dans l’Eglise, et met sa gloire infinie à notre service

Et l’Eglise, l’ensemble des croyants, est représentée par « des porte-lampes d’or ». Au passage : « porte-lampes » est une meilleure traduction que chandelier, car il n’y avait pas de cierges dessus, mais des lampes à huile. Nous, l’Eglise universelle, nous sommes représentés par des « porte-lampes d’or » ! Nous sommes « en or », nous sommes, aussi précieux qu’a été cher le prix auquel nous avons été « rachetés », au prix du Christ lui-même (1 Co 6.20)

C’est ce que Jean veut nous faire réaliser lorsqu’il nous écrit : « "Moi, Jean, votre frère, qui prends part à la détresse, à la royauté et à la persévérance en Jésus…" (v. 9) "moi, Jean," je suis "votre frère en Jésus". » Unis à Jésus, nous formons une fraternité où nous partageons… quoi, au fait ?

Eh ! bien, unis à Jésus, le Glorieux, nous partageons les bénédictions de son « Royaume » de grâce sur terre. Nous pouvons compter sur son pardon et sa réconciliation. Nous pouvons compter, dans son Royaume, sur son gouvernement de nos vies, même si nous ne nous expliquons pas toujours sa façon de nous conduire.

Mais même là, dans son « Royaume », nous partageons la fraternité dans « la détresse ». Nous ne sommes pas des ions libres et sans lien entre nous : dans son « Royaume » nous formons un corps dont il est le Chef (Col 1.18). Non seulement nous pouvons nous appuyer sur nos « frères » dans la détresse, mais même notre Seigneur et Sauveur nous seconde fermement.

Ce n’est pas un vain mot, la fraternité sous la croix, la fraternité dans la détresse, la fraternité à la lumière de l’amour du Christ et de sa vérité salutaire ! Et cette fraternité doit se poursuivre et s’épanouir pleinement dans l’au-delà où il n’y aura plus de détresse.


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Le Christ se révèle à nous dans l’Evangile
pour resserrer ses liens avec nous ici-bas
et ceci, pour l’éternité.


Que nous annonce-t-il à ce sujet ? – « J’étais mort, mais je suis vivant à tout jamais ! » Tout au long du message consolant de l’Apocalypse, le sacrifice expiatoire du Christ occupe une place centrale et fondamentale. C’est ainsi que dès le 5ème verset de ce livre, Jean glorifie « celui qui nous aime, qui nous a délivrés de nos péchés par son sang. » (Ap 1.5-6) Et dans la vision du chapitre 5, Jean « vit, au milieu du trône […], un Agneau qui semblait immolé » (Ap 5.6). Sans le sacrifice du Christ pour nos péchés, il n’y aurait pas de félicité éternelle, pas de vision possible d’un royaume de gloire pour nous. Aussi ces visions du paradis céleste indiquent-elles clairement que tout est parti de la mort expiatoire du Christ.

Il le dit d’ailleurs lui-même dans notre texte : « "J’étais mort, mais je suis vivant à tout
jamais ! "

« Je n’aurais plus jamais à connaître la mort, puisque, là-bas, à la croix de Golgotha, j’ai "tout accompli", "tout achevé" (Jn 19.30) pour votre salut. Maintenant, "je suis vivant à tout jamais," pour l’éternité. "Vivant" et bien « vivant ». J’ai de la vie à revendre. En fait, cette expression est fausse me concernait : je ne vends rien ; j’ai de la vie à donner, et je vous l’ai donnée à vous qui venez avec foi vous confier en moi. »

« Et j'ai les clefs de la mort et du séjour des morts. » « Et j'ai les clefs de la mort et du séjour des morts. » Une fois que ceux qui n’auront pas cru au Christ seront décédés, la mort sera, malheureusement, verrouillée pour eux : ils se trouveront confinés derrière les portes de la mort, dans la mort pour toujours.

Par contre, nous, nous n’avons pas à nous en faire, nous qui croyons en son sacrifice expiatoire et en sa résurrection glorieuse, Il nous fait comprendre : « J’ai verrouillé la mort pour vous aussi, mais vous, vous vous trouvez à l’extérieur. La mort éternelle ne peut vous aspirer, vous êtes en sécurité auprès de moi. Vous faites partie de mes prêtres et rois dans mon Royaume pour l’éternité. »

Et là-bas, dans la félicité éternelle, nous ne le verrons pas seulement, comme maintenant, à travers la vitre quelque peu embuée de la Parole de Dieu, mais « nous serons semblables à lui » et « le verrons tel qu’il est » (1 Jn 3.2). « Le Seigneur Jésus-Christ transformera notre corps humilié, en le configurant à son corps glorieux par l'opération qui le rend capable de tout s'assujettir. » (Ph 3.21)

Alors l’œuvre du Christ aura atteint son objectif : alors nous partagerons sa transfiguration ! Alors notre transfiguration sera totale et éternelle !


Amen.

Jean Thiébaut Haesssig, pasteur
(16 079)

Sermon du 08 avril 2007 - PÂQUES

PÂQUES Col 3 : 1 – 4

Châtenay-Malabry 08.04.2007

3:1 Si donc vous vous êtes réveillés [ressuscités] avec le Christ,

cherchez les choses d'en haut,
où le Christ est assis à la droite de Dieu.

3:2 Pensez à ce qui est en haut,
et non pas à ce qui est sur la terre.

3:3 Car vous êtes morts,

et votre vie est cachée avec le Christ en Dieu.

3:4 Quand le Christ, votre vie, se manifestera,
alors vous aussi vous vous manifesterez avec lui, dans la gloire.


Chers frères et soeurs,
à la fois morts et ressuscités avec Christ !

Paul vous lance ce matin/ « Vous êtes morts ! » Pourtant, deux versets plus haut, il vous lance avec la même force : « Vous êtes ressuscités ! »

Les deux affirmations paraissent irréelles. Il paraîtrait plus logique qu’il nous dise : « Vous mourrez, puis vous ressusciterez. » Mais non, il parle bien au présent : « Vous êtes morts ! » et « vous êtes ressuscités ! » Et là, nous semblons avoir un problème de logique.

On serait plutôt tenté de dire : « Ou bien je suis mort, ou bien je suis ressuscité, mais pas les deux à la fois ! »

En fait – et vous vous en doutez bien en ce matin de Pâques –, le cher apôtre veut nous réjouir et nous réconforter avec des vérités aussi profondes que fortes. Et il le fait d’une façon à laquelle, vous les jeunes, vous devriez être particulièrement sensibles.

Ne reprochez-vous pas souvent au monde adulte – à celui de la politique, des affaires, de l’emploi, voire des études – de mettre l’accent trop sur les apparences, et pas assez sur les réalités ?

C’est aussi ce qui se passe parfois dans l’Eglise, et, à certains moments, dans la tête de chacun de nous, ce qui est source de souffrances, de doutes, de découragement et d’abandon.

Paul veut, ce matin, vous regonfler, vous armer pour la vie... et la mort, vous réconforter, et remplir votre coeur d’une joie et d’un élan vital sans pareils. Pour cela, il utilise une technique très simple : il oppose apparence et réalité.

Illuminés par la victoire de Pâques, notre thème sera donc aujourd’hui :



L’ETRE
ET LE PARAÎTRE

ou, en d’autres termes :
• De quoi avons-nous l’air ?
• Et qui sommes-nous en réalité ?


***** 1 ******

De quoi avons-nous l’air ?

Nous commencerons par le paraître, l’apparence. Que n’a-t-on glosé sur le compte de l’Eglise et des chrétiens ! Que ne s’est-on moqué de notre foi dans le divin Ressuscité !

« Voilà des gens qui disent que la mort n’a plus de pouvoir sur eux, mais ils meurent comme tout le monde ! »

« Voilà des gens qui disent que leur Christ a maté la mort, mais il a lamentablement échoué sur une croix ! »

« Voilà des gens qui attendent le retour de leur Seigneur, "mais c’est pour quand ? Nos ancêtres sont morts, et depuis que le monde est monde, rien n’a changé !" » (2 P 3:3)

« Voilà des gens qui sont appelés des "saints" dans leur Bible, mais ils sont loin d’être parfaits !

« Voilà des gens qui disent que leur Seigneur est tout-puissant, mais, comme tout le monde, ils connaissent des échecs, des maladies, des problèmes, et la mort ! »

Eh oui, l’apôtre pouvait, lui aussi, citer toute une litanie de douleurs, d’épreuves et d’échecs dans sa vie. Il écrira aux Corinthiens : « Ainsi, nous sommes accablés par toutes sortes de détresses, et cependant jamais écrasés. Nous sommes désemparés, mais non désespérés." (2 Co 4:8)

Quelle était l’une de ses recettes pour garder le moral, ou pour pouvoir écrire aux chrétiens de Rome : « Mais dans tout cela nous sommes plus que vainqueurs ! » ? (Rm 8.37) La réponse nous sera donnée un peu plus tard.

Je voudrais auparavant rappeler ce qui s’était passé à Colosse, paroisse à laquelle il écrit notre texte.

Cette paroisse avait connu de graves problèmes, et l’apôtre se sent obligé de les aider pour qu’ils ne se laissent pas entraîner par de faux enseignements.

On voulait leur imposer des signes extérieurs de piété. On voulait leur faire croire que pour plaire à Dieu, pour se concilier sa faveur, tout le monde devait suivre des règles bien précises quant à l’alimentation, les fêtes et autres règles de comportement.

Bref, on érigeait le « paraître » en système. On voulait que tout le monde mette l’accent sur les apparences sans se soucier de la réalité spirituelle.

Bien entendu que nous nous efforçons d’avoir un comportement d’enfant de Dieu. Bien sûr que nous suivons des règles communes pour pouvoir vivre, adorer et agir ensemble.

Pour cela nous avons des liturgies ou des statuts dans l’Eglise, dans les paroisses, dans les différentes associations comme Mission et Jeunesse, ou encore des résolutions prises dans des assemblées.

Mais gare à nous si nous le faisons pour le « paraître » ! Ce qu’on nous voit faire devrait venir de notre réalité intérieure, de ce que nous sommes.

Tous ceux qui s’agrippent aux apparences pour les apparences, tous ceux qui placent leur foi dans les règlements, ceux-là, nous dit Paul, sont encore attachés aux « réalités qui appartiennent à la terre », au lieu de « tendre vers les réalités d’en haut, là où se trouve le Christ, qui siège à la droite de Dieu ».

Et là l’apôtre oppose aux apparences, au paraître,



***** 2 ******
Ce que nous sommes
en réalité.


Et là intervient cette étonnante formule de l’apôtre : « Vous êtes morts ! »

Ici, il n’explique plus ce qu’il veut dire par là, car plus haut dans le même chapitre, il avait écrit avec plus de détails : « Vous êtes morts avec le Christ à tous ces principes élémentaires qui régissent la vie dans ce monde [...] vous êtes morts aux réalités qui appartiennent à la terre. »

Dans ce monde on n’a rien sans rien. Ou bien on produit soi-même ce qu’on veut, ou on l’achète. Sur le plan des religions imaginées par les hommes, cela a donné le légalisme : Ou bien on satisfait la divinité par ses propres oeuvres méritoires, ou alors on est rejeté par la divinité.

Mais « vous » – nous dit Paul ici – « vous » qui placez votre foi dans l’oeuvre méritoire du Christ, « vous êtes morts à tous ces principes élémentaires », « vous êtes morts » à toutes ces exigences légalistes.

Comment pourrais-je vous faire comprendre cela ?

Tenez : Notre mort corporelle est une mort à la vie corporelle, une coupure avec la vie : notre corps sera hors d’atteinte pour les forces de la vie. Les aliments, les médicaments, la musique, la beauté, plus rien n’aura d’effet sur notre corps.

Eh bien, en plaçant notre foi dans la mort et la résurrection de Jésus, ces règles prétendument destinées à forcer le respect de Dieu, ces exigences – et bien d’autres – ne peuvent plus nous atteindre, elles n’ont plus d’emprise sur notre devenir d’enfant de Dieu, elles n’ont plus aucun effet sur notre relation avec Dieu. Car « vous êtes aussi ressuscités avec Christ ! »

Oh ! certes, pour l’instant il n’est pas possible de voir que « vous êtes ressuscités avec Christ », pas plus qu’il est possible de voir le Christ ressuscité.

Mais depuis que Dieu a fait alliance avec vous dans votre Baptême tout ce que Jésus a fait est porté à votre crédit, tout ce par quoi il a passé, il le partage avec vous : aussi bien les fruits de sa mort que ceux de sa résurrection.

A bien y réfléchir, il n’avait que faire de la mort et de la résurrection. Ce n’est pas pour lui qu’il a passé par là, mais pour vous et pour moi, pour le monde entier.

Il nous a frayé ce passage au devant de Dieu parce que nous-mêmes n’étions pas capables de cette prouesse : notre péché et notre culpabilité nous en empêchaient totalement.

En remplissant les conditions de la Loi à notre égard, il nous a soustraits aux exigence de la Loi, et en expiant nos péchés il nous a aussi soustraits aux conséquences de nos défaillances coupables :

Par son itinéraire victorieux à travers la mort et la résurrection il nous a entraînés à sa suite et nous fait partager les bienfaits de sa mort et de sa résurrection.
La réalité dépasse l’apparence, ce que nous sommes en réalité dépasse infiniment ce que nous semblons être.

Parce que Jésus est mort et ressuscité pour nous, nous n’avons plus à craindre tout ce qui aurait dû – ou tout ce qui semble – nous entraîner vers la mort éternelle : Nous, les croyants, nous faisons déjà partie des « choses d’en haut », des réalités célestes, dit Paul,,même si notre vie se déroule encore en bas, sur terre.

Il est donc vain d’ironiser sur votre apparence d’enfants de Dieu, car « votre vie est cachée avec le Christ ». Votre vie est intimement unie à celle du Christ victorieux de Pâques ! Car, dit encore l’apôtre, « Christ est votre vie »,

La relation de foi dans laquelle vous vous trouvez avec lui fait que Dieu vous identifie à lui. Pour Dieu, vous faites déjà partie des « réalités d’en haut, là où se trouve le Christ ».

Pour l’instant, nous ne pouvons pas voir le Christ ressuscité « assis à la droite de Dieu ». C’est que notre vie réelle est « cachée avec lui ». « Votre vie » réelle « est cachée avec le Christ » victorieux.

Et elle est « cachée » où ? – « En Dieu ! » C’est comme si – non, ce n’est pas comme si, c’est la réalité : par sa résurrection, Jésus nous a élevés dans les bras du Père. Ces bras sont assez vastes pour nous entourer et nous porter à chaque instant ici-bas.

Et surtout, ce coeur de Père céleste nous aime autant que son Fils bien-aimé venu sur terre pour nous réconcilier avec le ciel.

Pour l’instant, les apparences peuvent être trompeuses, mais le moment viendra où cela va changer. « Le jour où le Christ apparaîtra, lui qui est votre vie, alors vous paraîtrez, vous aussi, avec lui, en partageant sa gloire. »

Pour l’instant, ce que vous êtes en réalité, demeure caché, mais vous qui croyez que Jésus est mort et ressuscité pour vous, vous n’êtes rien moins que des « ressuscités avec Christ » !

Lorsqu’il reviendra, il n’y aura plus de différence entre ce que vous êtes et ce que vous paraîtrez : alors vous paraîtrez transfigurés et glorifiés comme lui.

Chers amis, si nous nous réjouissons tant en cette fête de Pâques, c’est que ce jour-là, c’est notre résurrection à nous qui s’est jouée à Jérusalem. « Vous êtes aussi ressuscités avec
Christ, » vous dit l’apôtre, et cela il le dit à chacun d’entre vous qui se repent de ses péchés et qui fait confiance à ce que Jésus est allé faire pour lui sur la croix.

« Vous êtes ressuscités avec Christ ! » … Vous rendez-vous compte de la portée de cette vérité ?

Cela signifie que vous êtes avec le Ressuscité, vous appartenez à son Royaume.

Et ne dites pas : « Oui, mais lui il est « là haut », mais moi je suis là « en bas » ! » Ce serait mal comprendre ce qui s’est passé avec la résurrection de Jésus.

Comme vous le savez, quand Jésus est ressuscité des morts, son corps a commencé un mode d’existence différent : depuis lors, il vit dans son état d’exaltation et de gloire.

Où ça ? – « A la droite de Dieu »« il siège » : C’est là une expression imagée. « Dieu est Esprit » (Jn 4.24), il est présent partout : il n’a ni gauche ni droite. Tous les passages où il est question de « la droite du Père » parlent des pleins pouvoirs que le Fils exerce au nom du Père en faveur des siens.

Ne cherchez pas « la droite du Père » au-delà des nuages. « La droite du Père », elle est à votre droite, à votre gauche, derrière et devant vous, elle est partout où vous vous trouvez et ou le Christ ressuscité exerce son pouvoir de miséricorde. Voilà ce que sa résurrection nous a apporté.

Du coup, l’exhortation pascale de Paul prend une force tout à fait nouvelle : « Recherchez donc les réalités d’en haut, là où se trouve le Christ, qui siège à la droite de
Dieu ! »

Par là, il ne demande pas aux chrétiens de ne songer qu’à la vie éternelle et de n’avoir que ce mot à la bouche.

« Recherchez les choses d’en haut » ne signifie pas – surtout pas ! – : « Désintéressez-vous de ce qui se passe ici-bas ! »

Cela signifie simplement : Ne raisonnez pas comme les gens de ce monde, ayez un raisonnement qui correspond à votre situation de co-ressuscités avec Christ, que le pivot de votre vie, la boussole de vos pensées, le critère de vos actes soient Jésus-Christ, et Jésus-Christ ressuscité pour vous après être mort pour vous !

Que votre vie soit illuminée et guidée par la joyeuse certitude que le Christ ressuscité est avec chaque pécheur repentant et croyant, qu’il a réglé auprès du Père le problème de votre péché et qu’il est tout heureux de constater que vous lui en êtes reconnaissants et le lui montrez par vos efforts à vivre pour lui plaire.

Ne vous laissez pas leurrer par ceux qui voudraient remplacer le Ressuscité par des règles méritoires. « Vous êtes morts avec le Christ à tous ces principes élémentaires. »

Et ne vous laissez pas déboussoler par l’aspect des choses : les réalités profondes de la foi chrétiennes sont « cachées avec Christ en Dieu ».

N’oubliez pas ce qui est profondément vrai par-delà les apparences : « Vous êtes ressuscités avec le Christ ! Recherchez donc les réalités d’en haut [...] De toute votre pensée, tendez vers les réalités d’en haut » : votre pardon en Christ, votre appartenance au Ressuscité pour l’éternité, votre vie qui se déroule entourée par la fidélité miséricordieuse du Christ vivant !

« Christ est ressuscité » – et il vous fait partager sa victoire ! Réjouissez-vous ! – et adorez-le pour cela !


Amen.

Jean Thiébaut Haesssig, pasteur
(12 490)



Chants :

Ouverture :
Qu’on entende aujourd’hui, mortels, LlS 111 : 1–3

Après A.T. :
Christ est ressuscité LlS 102 : 1

Après Epître :
A toi la gloire, ô Ressuscité ! LlS 100 : 1 LlS 102 : 1

Après Evangile :
Louons Dieu de tout notre coeur LlS 109 : 1

Après le Credo :
Jésus est vivant, je dois vivre, LlS 109 : 1–4

Avant la prédication :
Entonnons en ce jour LlS 103 : 1–6

Durant la distribution de la Cène :
Jésus, à sa table sacrée LlS 163 : 1–9

Sermon du 06 avril 2007 - Vendredi Saint

Vendredi Saint Luc 23.46

Châtenay-Malabry 06.04.2007

« Alors Jésus poussa un grand cri :
"Père, je remets mon esprit entre tes mains !"
Après avoir dit ces mots, il mourut. »
(trad. « Colombe »)

« Jésus cria :
"Père, je remets mon esprit entre tes mains !"
Après avoir dit cela, il expira. »
(trad. « NBS »)

Chers amis … – en deuil … ou en fête ?

Aujourd’hui, se termine en apothéose le temps liturgique des six semaines de la Passion. Ces six semaines, nous les avons passées au chevet d’un condamné à mort, au chevet d’un mourant, au chevet de personne de moindre que… le Fils de Dieu lui-même !

Les dernières paroles d’un mourant ont une importance particulière, même si elles ne constituent pas un testament en bonne et due forme : on fait attention à tout, on se les grave dans la mémoire, on « les repasse dans son cœur », on « les retient et y réfléchit », comme Marie l’a fait avec les paroles de l’ange (Lc 2.19).

On « repasse » surtout « dans son cœur » les toutes dernières paroles qu’un mourant nous a adressées, un peu comme son dernier legs. Elles donnent un éclairage particulier à son décès, à son départ.

Voilà pourquoi on passe le Temps de la Passion à écouter, à peser, à méditer ses derniers actes, ses derniers gestes, ses dernières paroles.

D’où la place toute particulière des sept paroles de Jésus en croix. Par exemple : « Mon Dieu ! mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 26.46) Quel terrible lumière, ces paroles jettent sur sa mort !

Cette autre – « Tout est accompli ! »« Tout est achevé ! » (Jn 19.30) – jette déjà une lumière plus réjouissante sur sa mort.

Qu’en sera-t-il de sa dernière parole, de celle que nous allons méditer aujourd’hui, où


« Jésus cria :
"Père, je remets mon esprit entre tes mains !"
Après avoir dit cela, il expira. »



C’est à la lumière de cette dernière parole du Christ que nous voulons méditer sa mort aujourd’hui.


LA MORT DE JESUS

1. une sortie triomphale de la mort
– pour lui – et pour nous !

2. une entrée glorieuse dans le Paradis
– pour lui – et pour nous !



***** 1 ******

La mort de Jésus est
d’abord une sortie triomphale de la mort
– pour lui – et pour nous !


Il y a une chose qu’on oublie trop souvent, tant le spectacle de la crucifixion en lui-même était déjà assez atroce, c’est qu’à la croix, Jésus se trouvait en fait dans l’abîme de l’enfer.

Les souffrances physiques qu’il a endurées sur la croix étaient infiniment pires que le mal des tortures physiques.

Dans l’empire romain, il y en a eu malheureusement d’autres – des milliers d’autres ! – à avoir connu cela, et peut-être pire. Leurs souffrances – leur agonie sous la torture : car la crucifixion était une torture (une mort par asphyxie) ! – n’ont pas pour autant été suffisantes aux yeux de Dieu, ni pour expier leur propre culpabilité devant lui, ni – et encore moins – pour expier les péchés du monde entier.

Mais dans le cas de Jésus, les souffrances ont atteint un tel degré d’horreur que personne n’aurait supporté le spectacle du châtiment infernal pour les péchés de l’humanité. Aussi Dieu a-t-il « tiré le rideau », pourrait-on dire. Ou pour parler avec les Evangiles : « Il y eut des ténèbres sur toute la terre de la sixième heure [midi] jusqu’à la neuvième heure [trois heures de l’après-midi]. » (Lc 23.44)

C’est ainsi que « Christ nous a rachetés de la malédiction de la Loi, étant devenu malédiction pour nous, car il est écrit : "Maudit est quiconque est pendu au bois !" » (Ga 3:13)

Dimanche après-midi, je me suis promené au Plessis-Robinson, autour de l’énorme chantier de construction. Sur un parking, il y avait un panneau pour une place réservée aux handicapés. Y était écrit (cela s’adresse bien entendu aux bien-portants) : « Si tu veux ma place, prends aussi mon handicap ! »

Je n’ai jamais vu sur une telle place réservée quelqu’un attendre un handicapé pour lui dire : « Donne-moi ton handicap et va te garer avec les bien-portants ! » Pourtant, c’est ce que Jésus a fait avec nous !

Jésus a pris nos péchés sur lui et s’est fait damner, maudire, à notre place, pour nous éviter ce terrible sort.

C’est ce qui explique son « cri » sur la croix : « Mon Dieu ! mon Dieu ! pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Là il a été « jeté dans les ténèbres du dehors » où il y a « des pleurs et des grincements de dents», comme il a lui-même décrit, un jour, la situation en enfer (Mt 8:12).

Dans la description qu’il en donne dans la scène du Jugement Dernier, il dit qu’en enfer on est
« maudit loin de Dieu », « dans le feu éternel préparé pour le diable et ses anges » (Mt 25:41), « préparé » aussi pour nous les pécheurs impénitents et incroyants (voyez la parabole de l’homme riche et de Lazare). !

Mais Jésus a tenu bon dans ces horribles souffrances :

Nulle trace d’impatience ou de découragement, alors qu’il est en train de toucher le fond de l’horreur pour nous.

Il ne recourt pas non plus à des moyens non permis, non appropriés, pour s’en sortir (n’est-il pas Dieu, et n’aurait-il pas facilement pu envoyer tout promener – mais nous aussi par la même !) ?

Non, il ne se révolte pas contre ce qui se passe : lui, « le juste », meurt « pour » nous, « les injustes » ! (1 P 3.18) Faut-il qu’il nous aime ! Faut-il qu’il tienne à nous sauver !

Et il a réussi. Il a tenu bon au milieu de l’horreur indescriptible. Il a tenu jusqu’à ce qu’il ait pu lancer son cri de victoire : « Tout est accompli ! »« Tout est achevé ! » (Jn 19.30) – « J’ai réussi ! – ça y est ! c’est derrière moi ! »

Que s’est-il passé en fait ?

Voyez-vous, dans la mort, l’âme – ou l’esprit – se sépare du corps. Bien des textes de la Bible le disent. Par exemple l’histoire du prophète Elie (dans l’Ancien Testament), ou celle de la mort d’Etienne (dans le Nouveau).

Mais Jésus ne subit pas cette séparation de l’âme de son corps : il la dirige, la gère, la conduit : « Père, JE remets mon esprit entre tes mains ! »

Sa mort est un acte volontaire. Ce n’est qu’après en avoir pris la décision qu’« il expira » (Lc 23.46). Ce n’est qu’une fois sa mission « accomplie » qu’« il rendit l’esprit » (Jn 19.30). Là, son corps inerte, sans vie, pendait alors à la croix, mais son âme était maintenant « entre tes mains du Père » « au Paradis » (Lc 23.43).

Avec ces mots « Père, je remets mon esprit entre tes mains ! » il tourne définitivement le dos aux souffrances de l’enfer. Il est maintenant sorti du tunnel, définitivement hors d’atteinte de l’enfer. Bien plus, il a vaincu l’enfer pour toujours

C’est vraiment une bonne nouvelle – de l’Evangile pur ! – pour nous : le Père est satisfait du prix que son Fils a payé pour nous : la rançon que Jésus a versée, le montant et l’atrocité des souffrances endurées sont tels que la justice de Dieu est satisfaite : sa grâce et son amour remplacent maintenant sa colère et son exigence de réparation de notre part.

Mission accomplie à la satisfaction du Père, Jésus peut l’aborder maintenant dans un esprit apaisé : « Père ! » l’appelle-t-il : il n’a jamais rompu le lien d’amour filial avec lui.

La mort de Jésus n’est donc pas signe de malheur mais de réussite et de victoire, de bonheur pour l’humanité.

Le mieux est sans doute de comprendre son dernier cri comme le claquement de la porte de l’enfer, ou comme le bruit du verrou qu’il a poussé énergiquement pour la fermer définitivement aux croyants !

Lui s’est sorti de l’enfer, non seulement pour lui, mais en terrassant l’enfer, il le maintient également loin de ceux qui lui font confiance.

« Il n’y a plus de condamnation pour ceux qui sont à Jésus-Christ ! » jubilons-nous avec l’apôtre Paul (Rm 8.1) :

« Plus de condamnation », donc plus d’enfer pour ceux qui, comme l’un des deux larrons crucifiés avec Jésus, se repentent de leur péchés et font confiance à la mort expiatoire de Jésus !

Comme Jésus s’est laissé rejeter en enfer pour toi, tu n’as plus besoin de craindre que Dieu pourrait encore t’y envoyer et t’y abandonner. Cela, il ne le peut et ne le veut plus, pour l’amour de son Fils. Il ne peut plus te rejeter et t’abandonner – et ne le veut plus – ni dans ta vie présente (quoi que tu puisses parfois ressentir) ni dans ta mort (quelles que puissent être les apparences) !

N’oublie pas : ce n’est pas pour lui mais pour toi qu’il a fermé l’enfer ; c’est pour toi qu’il a ouvert le ciel !

car


***** 2 ******

La mort de Jésus est
ensuite une entrée glorieuse dans le Paradis
– pour lui – et pour nous !


« Père, je remets mon esprit entre tes mains ! »« Les mains du Père », ce n’est rien d’autre, en fait, que « le paradis » céleste.

« Les mains de Dieu ! » Quelle belle image ! quelle vérité rassurante ! Dieu nous entoure de ses bras, des bras de quelqu’un qui est éternel et tout-puissant, des bras dont personne ne peut nous arracher !

« Les mains du Père » nous font sentir l’étreinte paternelle : on s’y sent aimé, choyé, en sécurité. Voilà ce qu’est le Paradis, tout le contraire du rejet et de l’abandon dans le terrible enfer.

C’est dans ce « Paradis » que Jésus est entré par sa mort.

C’est ce qu’il annonce avec ses dernières paroles : « Père, je remets mon esprit entre tes mains ! » Quel départ de fête ! Quel soulagement et retournement de situation après avoir dû se débattre dans les souffrances de l’enfer ! Quelle merveilleuse lumière après les angoissantes ténèbres !

Les souffrances du Christ nous bouleversent : A cause de nous il a connu l’Enfer, des souffrances et une horreur qui dépassent nos connaissances et nos expériences, des souffrances et une horreur qui dépassent tout ce que nous pouvons décrire avec le langage de ce monde

Mais nous trouvons aussi la paix dans ses souffrances. Elles nous rassurent sur notre propre sort. Elles sont une ouverture sur un au-delà merveilleux. Car Jésus a réussi à se frayer un passage à travers la mort et l’enfer vers le Paradis céleste, et cela non seulement pour lui, mais aussi pour nous.

Il est vrai : nous sommes tout soulagés de voir que celui qui nous a aimés plus que sa vie sort vainqueur de cette lutte infernale. Cela nous touche d’autant plus qu’il porte sa réussite à notre crédit, qu’il nous fait partager les bienfaits de sa victoire.

De nombreux croyants en ont déjà profité dans le passé.

Ainsi, dans l’histoire sainte, « le malfaiteur » repentant sur la croix. A son humble prière : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu entreras dans ton royaume ! » Jésus lui répondit : « Amen, je te le dis : aujourd’hui, tu seras avec moi dans le
Paradis ! » (Lc 23.42-43)

Mais il y a aussi « Etienne » qui a prié, alors qu’on était en train de le tuer à coups de pierre :
« Seigneur Jésus, reçois mon esprit ! » (Ac 7.59)

Et parmi nos connaissances, combien n’avons-nous pas vu nous précéder déjà dans le Paradis céleste où Jésus les a accueillis comme le larron dès le moment où leur esprit a quitté leur âme ?

C’est là la consolation et le réconfort que la liturgie luthérienne nous apporte quand nous sommes devant la tombe d’un proche et que le pasteur cite cette parole entendue du ciel par l’apôtre Jean dans l’Apocalypse : « Heureux dès à présent ceux qui meurent dans le Seigneur [c.à.d. unis au Seigneur] ! » (Ap 14.13) Sa mort a été un départ hors d’atteinte de l’enfer, sa mort a été une entrée glorieuse dans le Paradis.

« Heureux » serons-nous lors de notre décès, parce que « unis » par la foi « au Seigneur », nous échapperons à l’enfer et rejoindrons notre Sauveur dans son Paradis éternel !

Pour conclure : Vendredi Saint, jour de malheur ou jour de chance, jour de deuil ou jour de fête ?

Grâce à Jésus, nous pouvons clamer très fort : Jour de joie et de délivrance ! Jour de liesse et de soulagement ! Jour de certitude et d’espérance éternelle !

Merci, Seigneur Jésus, de m’avoir épargné ce que j’avais mérité à la place !

Amen.

Jean Thiébaut Haeissg
(11 233)



Chants :

O monde, viens, contemple […]
ton Rédempteur en croix LlS 91 : 1+4–6

Quelle douleur saisit mon coeur LlS 94 : 1–6

Seigneur Jésus, tes blessures LlS 97 : 1+3–6

vendredi 6 avril 2007

Sermon du 01 avril 2007 - Dimanche des rameaux

Dimanche des Rameaux Es 50.4-10

Châtenay-Malabry 01.04.2007

*********************

50:4 Le Seigneur Dieu m'a donné le langage des disciples,
pour que je sache soutenir par une parole celui qui est épuisé ;
chaque matin, il éveille, il éveille mon oreille,
pour que j'écoute à la manière des disciples.

50:5 Le Seigneur Dieu m'a ouvert l'oreille,
et moi, je ne me suis pas rebellé et je ne me suis pas dérobé.

50:6 J'ai livré mon dos à ceux qui me frappaient
et mes joues à ceux qui m'arrachaient la barbe ;
je ne me suis pas détourné des insultes et des crachats.

50:7 Mais le Seigneur Dieu m'a secouru ;
c'est pourquoi je n'ai pas été confus,
c'est pourquoi j'ai rendu mon visage semblable à du granit,
sachant que je n'aurais pas honte.

50:8 Celui qui me justifie est proche : qui veut m'accuser ?
Comparaissons ensemble ! Qui s'oppose à mon droit ?
Qu'il s'avance vers moi !

50:9 Le Seigneur Dieu viendra à mon secours : qui me condamnera ?
Ils tomberont tous en lambeaux comme un vêtement, les mites les dévoreront.

50:10 Qui parmi vous craint le Seigneur, en écoutant son Serviteur ?
Quiconque marche dans les ténèbres et manque de clarté,
qu'il mette sa confiance dans le nom du Seigneur
et qu'il s'appuie sur son Dieu !" »

*********************

Chers amis qui profitez de l’œuvre du « Serviteur de l’Eternel » !

Le « Dimanche des Rameaux » occupe une place particulière dans l’année de l’Eglise ou année liturgique. Ce dimanche ouvre la « Semaine Sainte ».

Dans la lecture traditionnelle de l’Evangile de ce jour (Jn 12.12-19), nous avons entendu, tout à l’heure, les « hosannas » lancés par la foule au passage de Jésus, lorsqu’il a fait son entrée à Jérusalem. Ces acclamations de la foule en liesse donnent au début de la « Semaine Sainte » un aspect solennel, une couleur royale, divine même !

Mais juste auparavant, la lecture de l’Epître traditionnelle de ce dimanche (Ph 2.5-11) nous a rappelé que ce Roi, tout acclamé qu’il était, était en fait en train d’aller courageusement au-devant de sa mort. Avec cette entrée à Jérusalem, il entamait la dernière étape de son abaissement, l’étape la plus tragique. Dans son « obéissance » volontaire, elle allait le mener « jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort sur la croix ».

Mais sa mort ne devait pas être sa dernière étape – heureusement pour nous ! – elle ne devait être, pour ainsi dire, que le tremplin vers la plus glorieuse victoire de tous les temps, victoire à laquelle il nous fait participer !

Aussi, ne nous retenons pas : dès ce « Dimanche des Rameaux », nous pouvons, nous aussi, lancer avec joie : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le Roi d’Israël ! » (Jn 12.13)

Mais nous, nous ne l’acclamons pas pour les mêmes raisons que la foule versatile de l’époque. Nous l’acclamons parce que nous savons et avons cette certitude : c’est « pour nous » qu’il a parcouru le chemin de la croix vers la couronne en vainqueur et avec l’approbation et la satisfaction de Dieu le Père. Ne l’oubliez pas : « pour nous ! »

C’est de la plus haute importance, pour notre vie de chaque instant, que nous n’oublions pas ce « pour nous » dans toute l’histoire des souffrances et de la mort du Christ. Sa Passion est un service qu’il nous rend. Ou, pour le dire différemment : un service qu’il accomplit sur ordre de Dieu en notre faveur.

Pas étonnant que dans les prophéties d’Esaïe – comme dans notre texte – il soit déjà appelé « le Serviteur du Seigneur », « le Serviteur de l’Eternel » ! Car, dans les textes comme le nôtre c’est « le Serviteur de l’Eternel » qui s’adresse à nous, « le Serviteur », dans le nom duquel nous mettons notre confiance, « le Serviteur », sur le Dieu duquel nous nous appuyons.

« CE Serviteur de l’Eternel »
1. reçoit directement instruction de Dieu
2. souffre avec une pleine confiance en Dieu
3. console et affermit les éprouvés.


– 1 –
« LE Serviteur de l’Eternel »
reçoit directement instruction de Dieu

A. Il est à l’écoute de Dieu pour se laisser instruire :

« Le Seigneur Dieu m'a donné le langage des disciples, pour que je sache soutenir par une parole celui qui est épuisé ; chaque matin, il éveille, il éveille mon oreille, pour que j'écoute à la manière des disciples. » (v. 4)

B. Il est à l’écoute de Dieu pour exécuter sa volonté avec docilité, zèle et enthousiasme :

« Je ne me suis pas rebellé, et je ne me suis pas dérobé. » (v. 5)

– 2 –
« LE Serviteur de l’Eternel »
souffre avec une pleine confiance en Dieu

A. « J’ai rendu mon visage semblable à du granit. » (v. 7)

1. Sans murmurer, de bon gré, il laisse les coups pleuvoir sur lui, de bon gré il s’abandonne aux souffrances auxquelles on le soumet :

« J'ai livré mon dos à ceux qui me frappaient et mes joues à ceux qui m'arrachaient la barbe ; je ne me suis pas détourné des insultes et des crachats. » (v. 6)

« Lui qui était vraiment divin, il ne s'est pas prévalu d'un rang d'égalité avec Dieu, mais il s'est vidé de lui-même en se faisant vraiment esclave, en devenant semblable aux humains ; reconnu à son aspect comme humain, il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à la mort – la mort sur la croix. » (Ph 2.6-8)

« Au lieu de la joie qui lui était proposée, il a enduré la croix. » (Hé 12.2)
2. C’est volontairement et de bon gré qu’il a enduré le mépris et la maltraitance.

B. « Le Serviteur de l’Eternel » est innocent, sans péché.

« Celui qui me justifie est proche : qui veut m'accuser ? Comparaissons ensemble ! Qui s'oppose à mon droit ? Qu'il s'avance vers moi ! » (v. 8)

C. Ceux qui accusent « le Serviteur de l’Eternel » n’obtiendront pas gain de cause ; au contraire, ils seront eux-mêmes accusés et rejetés.

« Le Seigneur Dieu viendra à mon secours : qui me condamnera ? Ils tomberont tous en lambeaux comme un vêtement, les mites les dévoreront. » (v. 9)

D. « Le Serviteur de l’Eternel », lui, est déclaré juste par Dieu en personne.

« Celui qui me justifie est proche : qui veut m'accuser ? […] Qui s'oppose à mon droit ? […] Le Seigneur Dieu viendra à mon secours : qui me condamnera ? » (v. 8-9)

– 3 –

« LE Serviteur de l’Eternel »
console et affermit les éprouvés.

A. Son « langage de disciple sait soutenir par une parole celui qui est épuisé. » (v. 4)

B. Il nous invite tous à « mettre [notre] confiance dans le nom du Seigneur et » à « [nous] appuyer sur [notre] Dieu. » (v. 10)

1. « Ténèbres, nuages, épreuves, invitations des mauvais esprits et des hommes vont croiser notre chemin » écrit Martin Luther.

2. Les remèdes humains n’y sont pas d’un grand secours.

3. Aussi allons-nous chercher refuge auprès « Serviteur de l’Eternel ».

a. car « nous mettons notre confiance en son nom » (v. 10) ;

b. et « nous nous appuyons sur son Dieu » (v. 10).

4. Aussi prions-nous avec le psalmiste :

« Seigneur, que ta fidélité soit sur nous, comme nous t'attendons ! » (Ps 33.22)

« Seigneur, c'est en toi que je trouve un abri. Que jamais je n'aie honte ! Par ta justice, donne-moi d'échapper ! » (Ps 31.2)

Amen.

Jean Thiébaut Haessig

*********************

Chants :
Hosanna ! Hosannah ! LlS 84 : 1-4
Ton Roi vient, pauvre et débonnaire, LlS 86 : 1-4
Que ferais-je sans toi, Sauveur ? LlS 252 : 1-54