lundi 16 mai 2011

Sermon du dimanche 8 mai 2011

Dimanche Quasimodo Geniti

Texte : Lc 24.36-49

36 Ils parlaient encore quand Jésus lui-même se présenta au milieu d’eux et leur dit :

"Que la paix soit avec vous !"

37 Saisis de frayeur et d’épouvante, ils croyaient voir un esprit.

38 Mais il leur dit :

"Pourquoi êtes-vous troublés et pourquoi de pareilles pensées surgissent-elles dans vos cœurs ?

39 Regardez mes mains et mes pieds : c'est bien moi. Touchez-moi et regardez : un esprit n'a ni chair ni os, comme, vous le voyez bien, j'en ai."

40 En disant cela, il leur montra ses mains et ses pieds.

41 Cependant, dans leur joie, ils ne croyaient pas encore et ils étaient dans l’étonnement. Alors il leur dit :

"Avez-vous ici quelque chose à manger ?"

42 Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé et un rayon de miel.

43 Il en prit et mangea devant eux.

44 Puis il leur dit :

"C'est ce que je vous disais lorsque j'étais encore avec vous : il fallait que s'accomplisse tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes."

45 Alors il leur ouvrit l'intelligence afin qu’ils comprennent les Ecritures

46 et il leur dit :

"Ainsi il était écrit – et il fallait que cela arrive – que le Christ souffrirait, qu'il ressusciterait le troisième jour,

47 et que la repentance en vue du pardon des péchés serait prêché en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem.

48 Vous êtes témoins de ces choses.

49 Et voici que j'enverrai sur vous ce que mon Père a promis ; quant à vous, restez dans la ville de Jérusalem, jusqu'à ce que vous soyez revêtus de la puissance d'en haut." »

Seigneur, ouvre aussi notre intelligence, ouvre aussi notre esprit, pour que nous comprenions ce que tu nous dis dans ta Parole dans notre situation précise. Oui, bénis cette Parole dans nos cœurs ! Amen.

Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,

« Ce n’est pas vrai ! » – Quel sentiment bouleverse le cœur de quelqu’un qui n’arrive pas à croire ce qu’on lui dit, ou ce qu’il voit ?

« Ce n’est pas vrai ! » – Ce refus d’admettre quelque chose, ou cette impossibilité à saisir pleinement ce qui se passe, peut effectivement être provoqué aussi bien par la peur que par la joie. C’est ce que nous voyons dans l’histoire sainte relatée dans notre texte.

Deux phrases nous y frappent :

« Saisis de frayeur et d’épouvante, ils croyaient voir un esprit. »

« Dans leur joie, ils ne croyaient pas encore. »

C’est que

LA JOIE COMME LA PEUR

PEUVENT

COURT-CIRCUITER LA FOI

X X X 1 X X X

Commençons par parler de la peur, car c’était là, sans conteste, le sentiment premier et prédominant dans les cœurs des disciples à ce moment-là. Luc, qui a écrit notre texte sous l’inspiration du Saint-Esprit, n’était pas présent lors des faits. Jean, lui, était présent, et il confesse ouvertement que « les portes de la maison où les disciples se trouvaient étaient fermées, car ils avaient peur des chefs juifs. » (Jn 20.19)

Ils se terraient, de peur d’être découverts. La peur avait étouffé toute confiance en Dieu. Elle leur avait fait oublier tout ce qui avait été dit et prédit par Dieu dans l’Ancien Testament, aussi tout ce que Jésus leur avait annoncé à maintes reprises. La peur avait entièrement endormi et anesthésié leur foi en Dieu et leur connaissance de sa Parole.

Ils étaient tellement sous l’emprise de la peur qu’ils réagirent même avec terreur là où ils auraient dû sauter de joie : quand le ressuscité leur est apparu.

La peur les a déformés, eux et leur capacité à saisir la réalité, eux et ce qu’ils entendent et voient. Là où leur foi aurait dû revivre, c’est à la superstition qu’ils succombent : « Saisis de frayeur et d’épouvante, ils croyaient voir un esprit. » (v. 37)

La peur leur a coupé l’herbe sous les pieds. Elle les a privés de mémoire, leur a retiré le fondement de leur foi. Ah ! s’ils avaient fait confiance à la parole de l’Ancien Testament, souvent rappelée par Jésus ! Ils n’auraient pas succombé ainsi à la peur. Mais là où l’on perd de vue la Parole et les promesses de Dieu, la foi ne peut que chanceler ; elle ne repose plus alors « sur le fondement des apôtres et prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre angulaire. » (Ep 2.20).

Il est vrai, à l’époque, « le fondement des apôtres » – les écrits des apôtres – n’existait pas encore. Il n’y avait que « le fondement des prophètes ». Ballottés qu’ils étaient par la peur, les apôtres, eux, étaient encore bien incapables de servir de fondement à quoi que ce soit, si ce n’est à la panique. Il faudra attendre l’effusion du Saint-Esprit lors de la première Pentecôte pour qu’ils changent.

Aussi, dans notre histoire, Jésus les ramène-t-il sur ce « fondement des prophètes » qu’est l’Ancien Testament, et leur montre-t-il qu’il n’y a pas de quoi avoir peur : son arrestation et sa mise à mort ne signifiaient pas que Dieu s’était fait évincer ou supplanter par Satan ; non, elles sont l’exact accomplissement du plan de Dieu tel qu’il l’avait prédit dans l’Ancien Testament. « C'est là ce que je vous disais lorsque j'étais encore avec vous ; il fallait que s'accomplisse tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes. » (v. 44)

« Alors il leur ouvrit l'intelligence afin qu’ils comprennent les Ecritures. » (v. 45)

Chers frères et sœurs du divin Ressuscité, c’est là la seule façon de surmonter vos peurs et vos angoisses, qu’il s’agisse de votre avenir personnel – familial ou professionnel – ou de l’avenir de votre paroisse, voire de l’Eglise tout court dans ce monde sans Dieu. C’est là la seule façon de garder – ou de regagner – confiance : nous plonger dans la Parole de Dieu, y rechercher l’instruction éclairante, le réconfort et l’apaisement dans la certitude que Dieu reste maître de nos vie, maître aussi dans la conduite de nos paroisses, un Maître bienveillant et fidèle si nous vivons dans une « repentance » de tous les jours, si nous vivons dans la foi apaisante et joyeuse dans le divin Ressuscité qui nous apporte « le pardon des péchés » (v. 47) et un Allié indéfectible en Dieu.

Avouons que bien des pensées, paroles et réactions sont sinon entièrement causées, du moins partiellement déformées par nos craintes et nos peurs. Nous oublions alors ce que Jésus nous a dit : « Vous en êtes témoins. » (v. 48 ; NBS) « Vous êtes témoins de ces choses. » (v. 48). En disant cela, il ne nous fait pas seulement comprendre qu’il attend de nous que nous soyons les témoins zélés et courageux de sa mort expiatoire et de sa glorieuse résurrection, il attend aussi que nous lui fassions confiance, à lui et au Saint-Esprit qu’il a promis de faire agir à travers notre témoignage.

« Du reste, » écrit Paul plus tard, « ce qu'on demande d'un intendant, » – ce que Jésus attend de nous, ses témoins – « c'est qu'il soit digne de confiance » (NBS), « qu’il soit fidèle », y compris là où notre fidélité dans le service du témoignage est liée à des sacrifices. Lui ne s’est-il pas sacrifié pour nous ?

Or que faisons-nous souvent ? La peur du qu’en-dira-t-on nous paralyse. La crainte des réactions des autres nous empêche de faire confiance à cette merveilleuse promesses de notre Seigneur : « Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde ! » (Mt 28.20)

Par peur d’être incompris, nous nous taisons. Par peur de repousser, nous tolérons la compromission, devenons évasifs. Par peur des sacrifices et autres difficultés, nous hésitons ou, même, renonçons.

La peur nous freine si elle ne nous paralyse pas entièrement. Nous manquons de confiance dans les promesses de Dieu de bénir notre témoignage clair et fidèle.

Oui, comme il l’a fait avec les disciples dans notre texte, il est temps que Jésus nous « ouvre aussi l’intelligence pour que nous comprenions l’Ecriture » (v. 45), pour que nous apprenions à ne pas douter de ses promesses, à ne pas craindre les difficultés qui accompagnent une vie de témoignage.

N’oublions jamais : « Dieu est digne de confiance : il ne permettra pas que vous soyez mis à l'épreuve au-delà de vos forces. » (1 Co 10.13 ; NBS) Faisons-lui confiance. N’a-t-il pas « vaincu le monde » ? (Jn 16.33) Ne nous laissons pas paralyser par la peur dans notre vie personnelle ou familiale, pas non plus dans notre vie de paroisse ou d’église.

X X X 2 X X X

Si la peur peut étouffer en nous la foi, une vie confiante en la grâce et la fidélité de Dieu envers nous, curieusement, la joie peut avoir le même effet.

Pour calmer la peur des disciples, « Jésus leur dit : "Pourquoi êtes-vous troublés et pourquoi de pareilles pensées surgissent-elles dans vos cœurs ? Regardez mes mains et mes pieds : c'est bien moi. Touchez-moi et regardez : un esprit n'a ni chair ni os, comme, vous le voyez bien, j'en ai." En disant cela, il leur montra ses mains et ses pieds. » (v. 38-40)

Les disciples sont apaisés, leur peur s’est évanouie. Leur Maître vient de leur dire des choses merveilleuses et leur a fait toucher du doigt son corps de ressuscité avec ses plaies du vendredi saint. « Le Seigneur est vraiment ressuscité ! » (Lc 24.34)

Cette révélation est si subite pour eux qu’ils en restent cois ! Ce Jésus visible, palpable, au milieu d’eux, c’est incroyable ! Pourtant, s’il est là, c’est qu’il n’est plus mort, qu’il s’en est sorti, qu’il a su se défaire de la mort et la vaincre, qu’il est le plus fort, le Seigneur de la vie et de la mort, preuve que ses promesses se réalisent toujours !

C’est tout le contraire de ce qui les a paralysés de peur et de désespoir. Mais c’est tellement inouï qu’ils n’en reviennent pas. Ne sont-ils pas victime de mirages ? N’est-ce pas trop beau pour être vrai ? « Dans leur joie, ils ne croyaient pas encore » (v. 41)

Aussi le Seigneur leur demande de quoi manger pour qu’ils voient qu’il n’est pas un fantôme, qu’ils ne sont pas victimes d’une hallucination collective. Des fantômes, des esprits, ne mangent pas. « Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé et un rayon de miel. Il en prit et le mangea devant eux. » (v. 42) Puis « il leur ouvrit l’intelligence » (v. 45) en leur expliquant les prophéties à son sujet.

Il est frappant de voir que ce n’est pas son apparition de ressuscité, mais la Parole de Dieu qui a finalement raison de leur incrédulité.

Chers amis, oui, la joie peut être si forte, si massive, si bouleversante, qu’elle peut laisser incrédule. La réaction peut alors être résumée ainsi : « C’est trop beau pour être vrai ! »

Oui, il y a bien des choses qui nous paraissent trop belles pour être vraies… dont nous ne revenons pas. Nous sommes souvent aussi apeurés et déficients que le furent les disciples. Pourtant, le Ressuscité, le Seigneur de l’Eglise – aussi de notre Eglise et de votre Paroisse St-Paul de Prailles-Beaussais ! – a fait de vous ses témoins dans le monde « pour que vous annonciez les hauts faits de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière » (1 P 2.9 ; NBS)

Le Seigneur vous a-t-il réellement fait cet honneur ? Eh ! oui. Dans sa Parole, il nous l’assure. Nous témoignons, nous parlons de lui avec nos talents et nos faiblesses. Nous confessons son nom en lui demandant de bénir le témoignage que nous lui rendons. Et là, avouons-le, il lui arrive de nous surprendre, de nous désarçonner par le caractère imprévisible des miracles qu’il opère à travers notre témoignage. Face à un grand pécheur qui se repent, ne sentons-nous pas parfois le vieil homme en nous avancer des doutes sur l’authenticité de cette repentance ?

Et puis, nous n’en revenons pas que l’Eglise parvienne toujours à nouveau à s’en sortir financièrement. Et malgré la joie que cette découverte nous procure, nous n’osons parfois pas croire en la réalité de cette situation financière et nous continuons à vivre dans l’angoisse.

Nous sommes tout heureux de savoir que « l’Evangile est une puissance de Dieu pour le salut » et que « la Parole de Dieu ne retourne pas à lui sans effet » (Rm 1.16 ; Es 55.11), mais nous nous conduisons parfois comme si ça ne servait à rien de nous engager résolument dans l’évangélisation de nos contemporains.

Heureusement que cette promesse faite par Jésus à ses disciples dans notre texte vaut aussi pour nous : « le changement radical », ce changement de cap de l’hostilité envers Dieu à la contrition et à la foi, bref, « la repentance[1] » « pour le pardon des péchés, [est] proclamée en son nom à toutes les nations » (v. 47) !

Notre Dieu voit nos travers, nos faiblesses, nos blocages dans notre vie de témoins, aussi dans le rayonnement missionnaire de notre paroisse. Normalement cela devrait nous accabler, nous amener à nous terrer loin de Dieu – si c’était possible – mais voilà ! qu’entendons-nous d’incroyable ? – « La repentance en vue du pardon des péchés » nous « est annoncée » à nous aussi. Comme nous nous tournons avec repentance et foi vers Jésus, Dieu nous annonce son pardon, car Jésus a déjà payé pour nous.

Ici, Jésus convainc les siens de la réalité de sa résurrection corporelle. Et toute la chrétienté vit dans la joie de sa résurrection. Grâce à elle, à sa victoire sur la mort, nous, les croyants, nous vivons dès maintenant dans son Royaume, et même la mort ne pourra nous en déloger : elle devra nous laisser passer directement au ciel.

Cette nouvelle de Pâques – la mort n’a plus d’emprise sur nous ! – est si étonnante, si époustouflante, que nous en restons parfois incrédules. Serait-ce de nous que Luc parle quand il rapporte : « Dans leur joie, ils ne croyaient pas encore ! » ?

Nous vivons dans la joie de Pâques. La promesse de Jésus de nous associer à sa maîtrise de la vie et à sa victoire sur la mort, nous remplit de joie. Et pourtant, par moments, nous n’osons pas y croire tant cette nouvelle est phénoménale, prodigieuse ? Au point que notre vieil homme essaye parfois de semer le doute dans notre esprit.

Mais notre Seigneur ressuscité nous a donné le moyen de surmonter ces assauts de doute ; il nous a prescrit une cure pour fortifier notre foi en notre résurrection : c’est l’étude et la méditation de sa Parole de vie. Par elle, dit-il, « j'envoie sur vous ce que mon Père a promis : […] la puissance d'en haut » (v. 49), le Saint-Esprit qui agit sur vos cœurs par l’Evangile.

C’est tout bonnement mirobolant, ce qui est arrivé à Jésus – vaincre la mort – mais Dieu l’avait annoncé, et il tient toujours ses promesses. Il tiendra pareillement celles qu’il nous a faites : de participer à la victoire de son Fils, de bénir nos efforts pour faire de la mission.

Laissons-nous guider, réconforter, illuminer, vivifier par l’Esprit Saint, par cette « puissance d’en haut », à travers l’Evangile.

Ainsi, ni la crainte de notre mort – ou la peur devant les difficultés de la mission – ni la joie délirante de l’avoir échappé belle – d’avoir échappé à la mort éternelle – ne pourront suffoquer notre foi en notre Seigneur ressuscité et vivant, présent et agissant à travers notre témoignage et celui de notre paroisse, de notre Eglise.

Amen.

Jean Thiébaut Haessig, pasteur

Chants

O Dieu, c’est dans ta Sin sainte LlS 175 : 1-3

Les troupeaux du Sauveur LlS 248 : 1-5

Je chanterai, Seigneur, sans cesse LlS 22 : 1-4

Peuple chrétien, ton Sauveur charitable LlS 168 : 1-6



[1] Segond 21