dimanche 28 février 2010

Sermon du dimanche 28 février 2010

DIMANCHE REMINISCERE

Texte : Mt 26.36-46 + récits parallèles : Mc 14.32-42 + Lc 22.40-46 + Jn 18.1-2

Mt 26.36 « Là-dessus, Jésus se rendit avec eux dans un endroit appelé Gethsémané et il dit aux disciples : "Asseyez-vous [ici] pendant que je m'éloignerai pour prier."

37 Il prit avec lui Pierre et les deux fils de Zébédée et il commença à être saisi de tristesse et d'angoisse.

38 Il leur dit alors : "Mon âme est triste à en mourir. Restez ici, éveillés avec moi."

39 Puis il avança de quelques pas, se jeta le visage contre terre et fit cette prière : "Mon Père, si cela est possible, que cette coupe s'éloigne de moi ! Toutefois, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux."

40 Il revint vers les disciples, qu'il trouva endormis, et dit à Pierre : "Vous n'avez donc pas pu rester éveillés une seule heure avec moi !

41 Restez vigilants et priez pour ne pas céder à la tentation. L'esprit est bien disposé, mais par nature l'homme est faible."

42 Il s'éloigna une deuxième fois et fit cette prière : "Mon Père, s'il n'est pas possible que cette coupe s'éloigne [de moi] sans que je la boive, que ta volonté soit faite !"

43 Il revint et les trouva encore endormis, car ils avaient les paupières lourdes.

44 Il les quitta, s'éloigna de nouveau et pria pour la troisième fois, répétant les mêmes paroles.

45 Puis il revint vers ses disciples et leur dit : "Vous dormez maintenant et vous vous reposez ! Voici, l'heure est proche et le Fils de l'homme est livré entre les mains des pécheurs.

46 Levez-vous, allons-y ! Celui qui me trahit s'approche." »

Chers frères et sœurs

en Celui qui a lutté dans la prière pour nous !

« Voici, nous montons à Jérusalem ! » (Lc 18.31) C’est à cette invitation de notre Seigneur que nous voulons répondre, en le suivant, ces prochains dimanches, durant ce Temps de la Passion, alors qu’il va au-devant d’une mort certaine.

Bien avant que cela ne lui arrive, Jésus avait prédit que « tout ce qui a été écrit par les prophètes au sujet du Fils de l’homme va s’accomplir. » (Lc 18.31) Puis il a énuméré ce qui allait lui arriver, en commençant par : « être livré aux non-Juifs » (Lc 18.32)

Sans entrer dans les détails de ses souffrances, il avait prédit sa terrible lutte intérieure avant d’être fait prisonnier à Gethsémané.

Les souffrances dans ce jardin du Mont des Oliviers prennent une place importante dans sa Passion, sinon il n’aurait pas demandé à Pierre, Jacques et Jean de l’accompagner pour « veiller et prier » avec lui. (v. 41)

Nous aussi, nous ne pourrons jamais assez « être vigilants » pour méditer comment Jésus « a présenté avec de grands cris et avec larmes des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort » (Hé 5.7). C’est ainsi que l’épître aux Hébreux décrit le combat que Jésus a mené dans la prière à Gethsémané.

Il est important de noter que le Saint-Esprit fait ensuite rajouter que Jésus « a été exaucé » (Hé 5.7). Comment aurait-ce pu être autrement ? Comment Jésus n’aurait-il pas pu être exaucé ? Voyons donc

COMMENT NOTRE SEIGNEUR

1. A PRIE,

2. A ETE EXAUCE.

1

COMMENT NOTRE SEIGNEUR A PRIE

Penchons-nous sur les circonstances dans lesquelles cette prière a été prononcée, son contenu et celui qui la prononce.

Cette prière jaillit du fond d’une lutte intense de l’âme. Jésus a toujours prié de toute son âme, car tout est parfait en lui, mais cette fois-ci sa prière jaillit du fond d’un combat qui le mène dans les affres d’une tristesse, d’une frayeur, d’une angoisse indescriptibles.

A peine a-t-il laissé la plupart de ses disciples à l’entrée du jardin, à peine s’est-il enfoncé avec Pierre, Jacques et Jean plus loin, qu’« il commence à éprouver de la tristesse, de la frayeur et des angoisses » (v.37 ; Mc 14.33). Il est ébranlé par les frayeurs les plus horribles. Il est à bout.

Il est vrai que ce qui l’ébranle, c’est la frayeur des frayeurs. « Mon âme est triste à en mourir. » (v. 38) Ce n’est pas là une façon imagée de parler. Contrairement à nous, quand Jésus dit quelque chose, ses mots ne sont pas irréfléchis.

« Mon âme est triste à en mourir. » … « La mort assaille mon âme. Cela me fait trembler de tristesse, de frayeur, d’angoisse ! » Oui, une lutte s’est engagée entre Jésus et la mort, ce que Luc explique en disant que Jésus est – littéralement – « en agonie » (Lc 22.44), en train de mener la lutte extrême. Sa lutte atteint une telle intensité que « sa sueur devient comme des caillots de sang ». (Lc 22.44)

Cela, il l’avait prédit au Psaume 22 : « Mes forces s’en vont comme l’eau qui s’écoule, et tous mes os se disloquent ; mon cœur est comme de la cire, il se liquéfie au fond de moi. » (Ps 22.15)

La mort contre laquelle Jésus lutte est la mort dans toute son horreur. Grâce à son combat, nous n’aurons plus à connaître cette horreur. Nous pouvons considérer la mort autrement. Avec Siméon, nous pouvons dire : « Maintenant, Seigneur, tu laisses ton serviteur s’en aller en paix, conformément à ta promesse ! » (Lc 2.29). Ou avec Paul : « J’ai le désir de m’en aller et d’être avec Christ, » car pour moi « mourir représente un gain ». (Ph 1.23+21)

Grâce à Jésus qui a pris notre place dans les souffrances de l’enfer, nous n’avons plus a connaître la mort dans toute son horreur, nous ne connaîtrons pas la damnation éternelle, le rejet définitif de la part de Dieu.

Jésus appelle lui-même ce moment « l’heure des ténèbres » (Lc 22.53) : Satan est en train de lui faire violence. Jésus a pris sur lui notre culpabilité et notre péché, il a donc aussi choisi d’aller dans les souffrances de la mort éternelle pour nous, car « le salaire du péché c’est la mort ». (Rm 6.23) C’est ainsi qu’il s’expose pour nous aux attaques de Satan.

Jésus a pris nos péchés sur lui ; aussi Dieu déverse-t-il sur lui sa sainte colère, le condamne et le damne pour nos péchés et le livre aux peines infernales dans lesquelles nous aurions dû être plongés.

C’est dans ce marasme extrême que Jésus prie : « Abba, Père, […] éloigne de moi cette coupe ! » (Mc 14.36) Ce qu’il est en train d’endurer, ce qui l’attend encore, Jésus l’appelle la « coupe », la boisson que Dieu lui verse.

Jésus prie comme quelqu’un sur lequel se déverse toute la colère implacable de Dieu ; il est en train de se débattre dans la mort-malédiction à cause de nos péchés.

En même temps, c’est une prière de repentance. Jésus prie comme quelqu’un qui tremble sous le fardeau du péché et sous ses conséquences : la colère divine et la malédiction.

N’oublions cependant pas : tout cela il l’endure en tant que Sauveur, en tant que Rédempteur, en tant que Saint, en tant que Fils incarné de Dieu ! Aussi chantons-nous :

« Dans ce profond abîme,

Dis-nous, sainte victime,

Pourquoi tu descendis ?

Toi, le Saint, le Fidèle,

Notre divin modèle,

Quels crimes as-tu donc commis ? »

(LlS 71:1)

Aucun ! Il passe par là en tant que Sauveur, à cause de nous, pour nous sauver. Il est venu pour prendre notre place. Aussi à Gethsémané.

Il se débat à notre place dans une lutte indescriptible de repentance. Il fait sienne toute la culpabilité du monde et en endure la terrible damnation. Cela l’ébranle au plus profond de lui-même. Il est écoeuré de devoir endurer les affres de l’agonie. Vider une coupe de pus ne peut pas écoeurer davantage.

Et pourtant il l’a fait, il l’a vidée, dans une repentance sincère à notre place. Voilà dans quel état il a prié à Gethsémané.

Ses paroles révèlent la sainte perfection de sa repentance, de son combat de repentance en lieu et place de toute l’humanité pécheresse.

Trois fois Jésus a prié avec ferveur, est revenu à la charge :

· « Abba, Père, tout t’est possible. Eloigne de moi cette coupe ! » (v. 39 ; Mc 14.36)

· « Mon Père, s'il n'est pas possible que cette coupe s'éloigne [de moi] … » (v. 42)

· « Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe ! » (v. 44 ; Lc 22.42)

L’âme de Jésus a réellement été plongée dans des angoisses et affres surhumaines, inhumaines, sous le jugement et la colère de Dieu. Il nous arrive d’être envahis par une torpeur, une espèce de désespoir, quand nous avons mal agi, tant que nous n’avons pas obtenu le pardon. Jésus a connu ces souffrances infiniment plus durement encore, car il savait que lui ne sera pas délivré par le pardon, seulement par une expiation qui allait le plonger dans d’horribles souffrances.

Les terreurs sous les coups de la colère de Dieu ont réellement pris Jésus à la gorge. Et cependant, il ne se révolte pas, il ne dit pas que c’est injuste. Il répète là aussi à plusieurs reprises à l’adresse de son Père :

· « Toutefois non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ! » (Mc 14.36)

· « Que ta volonté soit faite ! » (v. 42)

· « Toutefois, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne ! » (Lc 22.42)

Jésus ne verse pas dans le péché de la révolte ; il demeure saint, innocent, obéissant jusqu’au bout.

Quels sentiments nous viennent en contemplant ainsi Jésus en prière ?

Commençons par confesser que nous sommes bien éloignés de son exemple. Il prie avec un tel sérieux, une telle intensité, une telle ferveur ! Et nous ? Ne prions-nous pas si peu, et souvent avec tiédeur, sans grande ferveur ?

Notre Seigneur est infiniment plus grand, infiniment plus élevé, même au plus profond de son abaissement, de son anéantissement. Lui, le Dieu éternel et tout-puissant, combien s’est-il humilié, comment il se tort devant son Père !

Et nous, quand nous nous approchons de Dieu, chargés de nos péchés, le faisons-nous aussi avec l’humilité qui sied aux coupables que nous sommes ? Ou le faisons-nous comme si nous lui faisons une faveur en nous adressant à lui ?

N’oublions pas quelle grâce il nous témoigne en nous laissant l’aborder, lui le trois fois Saint, nous les impurs ! Cela devrait bien plus souvent nous jeter à genoux devant lui dans la prière.

En fait, de voir Jésus, le Saint, en lutte avec la mort à cause de nous, le voir se repentir dans une telle humiliation pour des péchés qu’il n’a pas commis, cela ne devrait-il pas nous faire rougir de honte ?

Et de voir à quoi ressemble souvent notre repentance ! Ne sommes-nous pas souvent trop peu abattus, bien peu attristés, bien peu effrayés par nos péchés ? Quelle terrible indifférence, parfois ! Combien peu remarque-t-on parfois que nos cœurs sont « brisés » (Ps 51.19) lors de la confession des péchés ou de la prédication de la Loi, voire de la Passion du Christ ! Jésus, lui, – lisons-nous – en a été « triste à en mourir » (v. 38)

Que le spectacle de notre Seigneur repentant et priant nous touche et nous amène à nous repentir avec davantage de sérieux !

Il est vrai que, même dans le meilleur des cas, notre repentance sera toujours imparfaite. Voyez, par exemple, Adam et Eve : Quelle frayeur, quelles angoisses les ont saisis tout de suite après leur chute … et pourtant, quelles excuses n’essayent-ils pas de faire valoir !

Comme dans leur cas, n’est-ce pas souvent plutôt la peur de la colère et du châtiment de Dieu, et non tellement le dégoût devant le péché, qui nous effraye ?

Heureusement que Dieu ne se conduit pas avec nous selon l’intensité ou le degré de perfection de notre repentance. Heureusement qu’il dirige ses regards vers Gethsémané où Jésus a prié dans une repentance authentique et parfaite à notre place.

Voilà ce qui compte aux yeux de Dieu lorsqu’il pense à ceux qui placent leur foi en son Fils.

Que la vue de ton Sauveur en prière à Gethsémané t’apporte donc consolation et réconfort !

Mais tu ne vois pas seulement dans notre histoire comment Jésus a prié, tu vois aussi

2

COMMENT NOTRE SEIGNEUR

A ETE EXAUCE

Cette affirmation vous étonne-t-elle ? Tout ne semble-t-il pas démontrer le contraire ? Certes, « un ange lui apparut du ciel pour le fortifier » (Lc 22.43), mais Jésus n’est quand même pas libéré de la colère de Dieu, il ne doit pas moins vider « la coupe » jusqu’à la lie, et il se soumet à ce verdict sans rechigner.

Cela ne semble-t-il pas prouver qu’il n’a pas été exaucé ? Comment faut-il comprendre alors ce que Jésus a dit un jour à son Père : « Je savais que tu m’écoutes toujours » ? (Jn 11.42) Et puis, n’est-il pas dit explicitement : « Christ a présenté avec de grands cris et avec larmes des prières et des supplications […], et il a été exaucé » ? (Hé 5.7)

Mais, au risque de vous étonner, Jésus a effectivement été exaucé ! Réfléchissez ! Il a prié comme celui qui se repent pour nos péchés. C’est parce qu’il a pris notre place à nous, pécheurs coupables, qu’il s’est ainsi tordu de tristesse et de frayeur. Il l’a fait comme coupable à la place des coupables, comme punissable à notre place qui aurions dû être punis.

C’est qu’il veut payer toute notre dette, subir tout notre châtiment. Il a commencé de « boire la coupe » (v. 42). Il va la vider entièrement. Et les affres de la mort sous la colère de Dieu ont failli le broyer. Ne va-t-il pas jusqu’à livrer sa vie dans les horribles souffrances de l’enfer ? Il doit mourir, non pas comme nous un jour, sans connaissance ; lui doit mourir en pleine conscience. C’est sans allègement de peine qu’il doit aller au bout de sa mission, c’est sans atténuation qu’il veut « faire la volonté » de son Père. (Jn 4.34)

Il a prié : « Que ta volonté soit faite ! » Et il a été exaucé. La volonté conjointe du Père et du Fils de nous sauver a été exaucée. Et cela nous est d’un grand réconfort.

Nous pouvons maintenant être assurés d’être, nous aussi, exaucés si nous prions avec foi au nom de Jésus. Demander au nom de Jésus, c’est comme si Jésus demandait. Nous pouvons donc, nous aussi, dire à Dieu à la suite de Jésus : « Je savais que tu m’écoutes toujours. »

Si seulement nous voulions davantage nous en souvenir, particulièrement quand nous ne voyons pas de signe d’exaucement ! Jésus aussi n’a été exaucé qu’après avoir si intensément et longuement lutté dans la prière.

Ce ne devrait donc pas nous paraître étrange, à nous qui prions en son nom, de devoir parfois prier longuement et dans la douleur avant de pouvoir nous relever soulagés, dans la joie, la paix et la confiance.

Mais il y a d’autres leçons dans notre histoire.

Jésus se sait exaucé. Il connaîtra la délivrance, et quelle délivrance : le triomphe de Pâques !

Aussi se relève-t-il de sa prière pour aller avec calme et courage à la rencontre du traître, au-devant de la croix. Et il le fait POUR NOUS ! Quel amour indescriptible ! Notre vocabulaire est bien trop pauvre pour l’exprimer.

Tu peux lui dire :

« Avec quelle intensité, tu m’as aimé, Jésus ! Combien tu me montres que tu tiens à me sauver ! Comment pourrais-je douter de toi ? Quoi qu’il arrive dans ma vie, je sais que je peux me réfugier dans la foi auprès de toi. De voir que Dieu t’a exaucé me rend fort en ta présence. »

N’oublions pas, grâce à Jésus, Dieu exauce nos prières à nous qui plaçons notre foi en Jésus. Oh ! il ne nous exauce pas toujours au moment et de la façon dont nous aurions aimé l’être. Mais Dieu sait mieux que nous ce qui est le meilleur pour nous.

Cette certitude nous permet de nous relever de nos prières avec confiance. Comme Jésus s’est relevé à Gethsémané de ses prières avec sérénité pour affronter ce qui l’attendait.

N’oublions pas : si nous gardons foi en Jésus au milieu de l’épreuve, c’est déjà un exaucement de nos prières.

Et « si nous souffrons avec lui, » nous « prendrons aussi part à sa gloire » ! (Rm 8.17)

Amen.

Jean Thiébaut Haessig


Chants proposés :

Il faut, grand Dieu, que de mon coeur LlS 73 : 1- 3

Le Fils de Dieu, ce Bon Berger, LlS 78 : 1- 3

Gethsémané ! Gethsémané ! LlS 74 : 1- 5

Ô Seigneur Jésus, mon Sauveur, LlS 167 : 1-10

ou

Torrents d’amour et de grâce,, AeC 419 : 1-3

Jérusalem est dans la nuit, AeC 445 : 1-3

Tu vins, Jésus, pour partager AeC 456 : 1-3

Le Christ Jésus, le Fils du Père, AeC 464 : 1-2*