mardi 12 février 2008

Sermon du 10 février 2008 - Invocavit


Chants :
Heureux celui de qui Dieu (Ps 32) LlS 217:1+4-5
Au Jourdain vint Christ, le Seigneur, LlS 152:1-4
Au Jourdain vint Christ, le Seigneur, LlS 152:5-6

Lc 3.15-17+21-22

15 « Comme le peuple était dans l'attente,
et que tous se demandaient
si Jean n'était pas le Christ,
16 il leur répondit à tous :
"Moi, je vous baptise d'eau,
mais il vient,
celui qui est plus puissant que moi,
et ce serait encore trop d'honneur pour moi
que de délier la lanière de ses sandales.
Lui vous baptisera dans l'Esprit saint et le feu.
17 Il a sa fourche à la main,
il va nettoyer son aire ;
il recueillera le blé dans sa grange,
mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s'éteint pas."
21 Quand tout le peuple reçut le baptême,
Jésus aussi reçut le baptême ;
et, pendant qu'il priait,
le ciel s'ouvrit,
22 et l'Esprit saint descendit sur lui sous une forme corporelle,
comme une colombe.
Et il survint une voix du ciel :
"Tu es mon Fils bien-aimé ;
c'est en toi que j'ai pris plaisir." »


Chers frères et sœurs en qui Dieu « prend plaisir » pour l’amour de son Fils !
Quand nous voyons combien cela nous fait plaisir quand d’autres aiment être avec nous, la pensée peut nous traverser l’esprit : « Peut-être qu’ils ne nous trouveraient pas aussi sympathiques s’ils nous connaissaient vraiment à fond, s’ils savaient vraiment ce qui se trouve aussi au fond de nous ! »
Il y a cependant quelqu’un à qui nous ne pouvons rien taire ou cacher. Et nos côtés moins reluisants que les autres ne connaissent pas, lui les connaît, et ça ne le laisse pas indifférent. Ne hait-il pas le péché ? (Ps 45.8)
Aussi nous surprend-t-il quand lui, à qui rien n’est caché, nous assure qu’il « prend plaisir » à nous, qu’il nous accorde sa grâce. N’est-ce pas ce qu’il dit en affirmant qu’il « prend plaisir » à Christ, celui qui nous représente, qu’il « prend plaisir » à ce qu’il fait en notre nom et à notre place ? (v. 22)

Notre texte développe devant nous

COMMENT, DU CIEL,
DIEU REVELE SA GRÂCE
A LA TERRE

1. Dieu a entièrement satisfait de son Fils.
2. Il est aussi pleinement satisfait de ses enfants baptisés !

----- 1 -----

Dieu est entièrement satisfait de son Fils.
C’est la première constatation que nous faisons dans notre texte. « Du ciel » Dieu le Père fait entendre sa « voix » : « "Tu es mon Fils bien-aimé ; c’est en toi que j’ai pris plaisir." »
Cela, il n’y a pas que Jésus à l’avoir entendyu. Jean le Baptiste l’a vu également. « Jean rendit ce témoignage : "J'ai vu l'Esprit descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. " » (Jn 1.32) Et s’il n’est pas dit ici que Jean entendit la voix de Dieu le Père, c’était certainement le cas comme à deux autres occasions où les personnes présentes ont entendu ces mêmes paroles (Mt 12.18 ; 17.5). Tout le monde doit savoir que le Père « prend plaisir » à son Fils.
Comment pourrait-il en être autrement ? Celui qui sortait de l’eau du Jourdain (Mt 3.16) n’est-il pas le Fils éternel de Dieu ? Le Baptiste avait toujours su qu’il n’était que le précurseur du Messie qui, lui, allait apporter « le salut de Dieu » (Lc 3.6). Jean savait qu’il était le prophète annoncé par Esaïe (Es 40 et Lc 3.4-6), mais jamais il ne s’est pris pour « le Christ » ou Messie (v. 15). Malgré le caractère unique de son ministère, de sa mission – « préparer le chemin du Seigneur » (Mt 3.3) – Jean Baptiste indiquait clairement qu’il n’était pas digne d’être comparé au Christ : « Ce serait encore trop d'honneur pour moi que de délier la lanière de ses sandales. » (v. 16) Il savait quelle était sa place par rapport au Messie-Sauveur : « Il est plus puissant que moi. » (v. 16)
Prenons exemple sur Jean le Baptiste. Ne tombons-nous pas parfois dans le péché d’orgueil quand nous pensons être « dignes » (Lc 3.16, ancienne version Segond) de certains « honneurs » dans l’Eglise ? Si le Baptiste s’est considéré comme infiniment plus petit que le Christ, combien plus le sommes-nous alors ? C’est une grâce si nous pouvons faire quelque chose dans l’Eglise pour notre Seigneur, mais ce n’est pas parce que nous en serions « dignes ».
Jean-Baptiste révèle encore un autre point capital de la supériorité infinie du Christ : c’est que le Christ est Dieu lui-même. « Lui vous baptisera dans l'Esprit saint et le feu, » annonce Jean à ses auditeurs. Jésus dira la même chose à ses disciple quand il leur déclarera : « Si je m'en vais, » – vers mon Père, par l’Ascension – « je vous l'enverrai [le Défenseur], » le Saint-Esprit (Jn 16.7)
A part le Père, seul le Fils peut faire cette chose extraordinaire : « envoyer » et répandre le Saint-Esprit au moyen de la Parole et des sacrements. En proclamant cela, Jean-Baptiste prêche clairement que Jésus de Nazareth est le Fils de Dieu.
A un autre moment, Jean-Baptiste avait annoncé que « le Père a donné » à Jésus de Nazareth « le pouvoir de faire le jugement » (Jn 5.27), ce qui va dans le même sens : souligner la divinité du Christ.
Maintenant qu’il est devenu homme, le Fils de Dieu reçoit aussi selon sa nature humaine « le pouvoir » ou autorité qu’il a toujours possédé selon sa nature divine. Il exercera le Jugement Dernier selon ses deux natures. Jean-Baptiste en parle ainsi dans notre texte : « Il a sa fourche à la main, il va nettoyer son aire ; il recueillera le blé dans sa grange, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s'éteint pas" (v. 17), la damnation éternelle.
Qui pourrait encore douter de la divinité – et donc de l’infinie supériorité – de Jésus ?
D’autant plus que c’est dans les formes et avec solennité qu’il est présenté comme la deuxième Personne de la très sainte Trinité : « Il survint une voix du ciel : "Tu es mon Fils bien-aimé ; c'est en toi que j'ai pris plaisir." » (v. 22)
Trois fois, Dieu le Père a fait entendre « du ciel » sa voix pour présenter solennellement son Fils : ici, lors de son baptême, ensuite sur le mont de la Transfiguration (Lc 9.35), enfin à Jérusalem (Jn 12.28), au début de la Semaine Sainte qui va déboucher sur sa Résurrection glorieuse, il est vrai en passant par sa crucifixion.
Quoi d’étonnant que Dieu le Père « prenne plaisir » à Jésus de Nazareth, vu que celui-ci est lui-même le Dieu éternel et saint. C’est de toute éternité qu’il « a mis son affection » (autre traduction possible) en son Fils. Entre les trois Personne de la Très Sainte Trinité existent une concorde, une estime et une « affection » mutuelles sans ombre aucune.
Mais en révélant directement « du ciel » qu’il « prend plaisir » à son Fils devenu homme, il nous apprend qu’il « prend » aussi « plaisir » à ce que son Fils est en train de faire sur terre pour nous, les humains.
C’est là une vérité extrêmement importante pour nous, pécheurs. Ce que Jésus a fait pour nous est approuvé par toute la Très Sainte Trinité. Nous n’avons donc pas à craindre que le Père pourrait ne pas accepter le sacrifice que Jésus a apporté pour nous. D’ailleurs, n’est-ce pas lui qui, dans son amour pour le monde, « a envoyé son Fils » pour nous sauver ? (Jn 3.16) Notre histoire nous apprend maintenant que le Père est pleinement satisfait de la manière dont son Fils remplit sa mission de Sauveur du monde. Le Père reconnaît le travail de son Fils et son résultat : Dieu nous accorde le salut accompli par son Fils !
En fait, qu’est-ce que Jésus a fait au juste pour nous sauver ? Qu’est-ce qu’il a fait qui provoque le « plaisir » de son Père ?
Il est impossible de tout énumérer ici. Rappelons cependant que ce qui a provoqué » le « plaisir » du Père, c’est que son Fils a vécu à notre place une vie parfaite, une vie exempte de tout péché, et qu’il a ainsi remplacé notre vie truffée de désobéissance. Et il est demeuré sans péché, sans réactions ni pensées pécheresses jusques et y compris dans l’expiation injuste de nos péchés, dans la damnation qui l’a frappée à notre place.
Rien que méditer le baptême de Jésus, nous aide déjà à mieux comprendre son œuvre de Sauveur. Avec son baptême, Jésus est entré dans la partie publique et active de sa mission, et dès ce moment, avec l’approbation et l’accompagnement du Père et du Saint-Esprit.
Pour lui-même Jésus n’avait nul besoin d’être baptisé. Le baptême de Jean – comme le nôtre – était un baptême « pour le pardon des péchés » (Lc 3.3). Jésus n’avait pas besoin de ce pardon. Mais il faut se rappeler qu’il s’est rangé parmi nous et a partagé la vie des pécheurs que nous sommes ; et il l’a fait en tant qu’« Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » (Jn 1.29)
Jean aussi, au début, ne voyait pas pourquoi il baptiserait le Messie qui est sans péché. Mais ce dernier lui a répondu : « Laisse faire maintenant, car il convient qu'ainsi nous accomplissions toute justice. » (Mt 3.15)
« Tout ce qui est juste » (trad. Segond 21), tout ce qui fait partie de l’œuvre de sauvetage de l’humanité, tout cela, le Fils de Dieu incarné va l’accomplir, en commençant par le baptême.
Et la Trinité entière fait connaître sa satisfaction, le « plaisir » qu’elle y prend : satisfaction de ce que le Fils se substitue aux pécheurs que nous sommes, s’identifie en quelque sorte à nous – sauf qu’il est demeuré sans péché – pour nous faire bénéficier de son œuvre de rachat.
C’est la seule histoire sainte non pas où il est question des trois Personnes de la Trinité, mais où nous voyons les trois Personnes intervenir de concert pour signifier leur accord et leur « plaisir » à ce qui est en train de se faire. Rien de plus normal.

Ce qui est plus surprenant, c’est que

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Dieu est aussi pleinement satisfait de ses enfants baptisés !

Sommes-nous toujours satisfaits les uns des autres entre frères et sœurs dans la foi ? Ou même : sommes-nous toujours satisfaits de nous-mêmes ? – Je ne demande à personne de répondre à voix haute. Je vais me permettre de le faire pour nous tous : « Non ! »
Nous ne sommes quand même pas inconscients ou imbus de nous-mêmes au point de penser que nous n’aurions pas de travers, rien à nous reprocher, pas de péchés, et que tout ce que nous entreprenons serait parfait ! Mais alors comment Dieu peut-il, lui qui est la perfection et la sainteté même, comment peut-il être satisfaits de nous ?
Cela, les baptisés que nous sommes, nous le devons à son Fils dans la communion duquel nous avons été baptisés. « Le Fils de l'homme est venu […] pour servir et donner sa vie en rançon pour [la] multitude » que nous formons (Mt 20.28). Et en « accomplissant [pour notre compte] la justice requise par la Loi » de Dieu (Rm 8.4), il nous a rachetés, nous les injustes, de notre culpabilité et de la colère et damnation de Dieu.
N’oublions jamais : tout ce que Jésus a accompli avec perfection, tout ce qu’il a souffert aussi durant sa présence visible sur terre, il l’a fait à notre place, comme notre substitut. Dieu considère donc que nous l’avons fait nous-mêmes. Il considère donc notre peine purgée, notre dette acquittée, notre vie parfaite, sans péché. Il nous voit à travers son Fils, notre substitut. Voilà pourquoi Dieu « prend plaisir » à nous.
Quand Dieu déclare de son Fils impliqué dans l’œuvre de notre salut qu’il « prend plaisir en lui », cela signifie aussi qu’il « prend plaisir à » ceux qui sont unis à son Fils par la foi et sont crédités de ses mérites.
Ces mérites, c’est justement ce qu’il communique à travers le sacrement pour lequel il se prononce ici dès le début de son ministère publique : le saint Baptême ! Jésus a déposé dans le Baptême les mérites du sang qu’il a versé pour nous. C’est là que « Jésus-Christ est venu par l'eau et le sang ; non pas avec l'eau seulement, mais avec l'eau et avec le sang » écrit l’apôtre Jean (1 Jn 5.6)
Ce que Jésus a remporté de haute lutte en répandant son sang pour nous, il le communique par le Baptême. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas amener nos enfants assez rapidement au Baptême. Nous ne voulons pas retarder le moment où ils seront soustraits à la colère de Dieu et jouiront du « plaisir », de l’amour, de la sollicitude et de la bénédiction de Dieu.
Et pour nourrir cette impatience des parents chrétiens, on a l’impression que Dieu multiplie, dans sa Parole, les révélations à propos du caractère merveilleux de ce sacrement.
Par exemple, par l’apôtre Paul dans l’épître aux Romains, chapitre 6, il écrit : « Ignorez-vous que nous tous qui avons reçu le baptême de Jésus-Christ, c'est le baptême de sa mort que nous avons reçu ? Par ce baptême de la mort, nous avons donc été ensevelis avec lui afin que, tout comme le Christ s'est réveillé d'entre les morts, par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions sous le régime nouveau de la vie, » (Rm 6.3-4) une vie nouvelle de graciés en qui Dieu « prend plaisir ».
Prêtons attention à cette parole qui a été dite « du haut du ciel », là-bas, près du Jourdain ! Dieu y déclare être satisfait de Celui qui s’est fait notre frère.
Depuis notre Baptême nous sommes intimement unis à lui. Depuis lors, nous partageons ce qui appartient à Jésus, notre frère. Depuis lors, cette parole de Dieu s’adresse aussi à toi : « Tu es mon [enfant] bien-aimé ; c'est en toi que j'ai pris plaisir », « en toi j’ai mis toute mon affection », « tu as toute mon approbation ! » (traduction Segond 21)
Pourquoi ? – Parce que là, dans notre Baptême, nos péchés ont été enfouis sous la sainteté de Jésus, sainteté qui a été porté à notre compte !
Veillons maintenant à demeurer en possession de cette sainteté du Christ – et par là même, de « l’approbation » et du « plaisir » du Père céleste – jusqu’au jour où le ciel s’ouvrira de nouveau, mais cette fois-ci pour que nous entendions cette parole de la bouche de notre Sauveur : « Venez, vous qui êtes bénis de mon Père ; héritez le royaume qui a été préparé pour vous ! » « Entre dans la joie de ton Maître ! » (Mt 25.34+21)
Amen.

Jean Thiébaut Haessig, pasteur