mardi 30 juin 2009

Sermon du 3ème Dimanche après la Trinité

Texte : 1 Tm 1.12-17

12 « Je suis reconnaissant envers celui qui m'a fortifié, Jésus-Christ notre Seigneur, car il m'a jugé digne de confiance en m'établissant à son service,

13 moi qui étais auparavant un blasphémateur, un persécuteur, un homme violent. Cependant, il m'a été fait grâce parce que j'agissais par ignorance, dans mon incrédulité.

14 Et la grâce de notre Seigneur a surabondé, avec la foi et l'amour qui sont en Jésus-Christ.

15 Cette parole est certaine et digne d'être acceptée sans réserve: Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver des pécheurs. Je suis moi-même le premier d'entre eux,

16 mais il m'a été fait grâce afin que Jésus-Christ montre en moi le premier toute sa patience et que je serve ainsi d'exemple à ceux qui croiraient en lui pour la vie éternelle.

17 Au roi des siècles, au Dieu immortel, invisible et seul sage soient honneur et gloire aux siècles des siècles ! Amen ! »

Chers frères et sœurs,

objets de la patience, de la grâce et

– oui, soyez étonnés ! –

objets aussi de la confiance de Dieu !

Dieu ne vous a-t-il jamais pris au dépourvu dans la façon dont, un jour, il a bousculé votre existence, lui a fait prendre une nouvelle direction ?

Des surprises, il y en a des bonnes et des mauvaises. Bien entendu, nous savons que Dieu ne nous fait pas de mauvaise surprise, qu’il ne nous fait pas des coups bas, que « toutes choses contribuent au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8.28).

N’empêche, sur le coup, certaines de ses surprises ont du mal à passer, et sont vécues comme des drames, du moins comme des épreuves.

Ainsi, quand l’apôtre Paul se trouve en prison pour avoir annoncé la Bonne Nouvelle de l’amour et de la grâce de Dieu, la première réaction, bien humaine, est de se demander : Dieu n’aurait-il pas dû veiller à ce que son apôtre puisse continuer à prêcher librement ?

Sans parler de sa fin – décapité près de Rome – : pour ceux qui venaient juste d’être convertis « au Dieu immortel, invisible et seul sage » (v. 17) c’était plutôt déconcertant. Mais ils savaient ce que l’apôtre avait écrit et prêché : « Christ est ma vie et mourir représente un gain » (Ph 1.21). Mais quand Paul s’est retrouvé subitement devant le « trône de Dieu et de l’Agneau » (Ap 22.1-5), entouré « de myriades de myriades et de milliers de milliers d’anges » et des rachetés (Ap 5.11-13), cela a quand même été finalement une merveilleuse et impressionnante surprise.

Chers amis, nous avons tous, dans nos vies de ces revirements ou bouleversements surprenants. Et même si le monde ne peut le voir, et encore moins l’admettre, Dieu ne nous fait, en fin de compte, que des bonnes surprises si nous savons les vivre, comme Paul, dans la confiance en Dieu.

Dans notre texte, l’apôtre concentre le caractère surprenant de Dieu sur trois points. Il souligne :

NOTRE DIEU SURPREND

1. par sa patience

2. par sa grâce

3. par sa confiance

X X X 1 X X X

Notre Dieu nous surprend par

sa patience.

A-t-il dû être patient avec ce Saul « né » dans la ville universitaire grecque de « Tarse en Cilicie » (Ac 22.3) avec le rang de citoyen romain (Ac 22.25-29), bien que « de la tribu de Benjamin, hébreu né d’Hébreux ; […] pharisien [et] persécuteur de l’Eglise » ! (Ph 3.5)

Pourtant, comme Paul l’écrit aux Galates, « Dieu l’avait mis à part dès le ventre de sa mère », dès avant sa naissance ! (Ga 1.15) Mais Dieu a attendu patiemment – cela a mis des décennies ! – que Saul de Tarse soit prêt pour qu’il puisse « l’établir à son service » (v. 12).

Pour cela, Dieu a attendu patiemment que Saul fasse des études poussées de grec dans sa ville natale (son style montre qu’il y était devenu un érudit).

Dieu a aussi attendu qu’il étudie à Jérusalem et soit « formé aux pieds du » plus important professeur de théologie juif – ou rabbi – de l’époque, « Gamaliel ». Ainsi il a acquis « la connaissance exacte de la loi héritée de ses ancêtres » (Ac 22.3). Le futur apôtre devait avoir une bonne connaissance des écrits de l’Ancien Testament.

Malheureusement, il l’avait alors mal compris et, dans la foulée, il a aussi mal compris la prédication et la foi des apôtres et des premiers chrétiens.

Là encore, Dieu a dû montrer sa grande patience quand Paul, le « pharisien », a dérapé dans le fanatisme et a pris la tête de la persécution des premiers chrétiens. « J’ai combattu à mort cet enseignement, enchaînant et mettant en prison hommes et femmes » confessera-t-il plus tard avec humilité et courage (Ac 22.4)

Oui, Dieu a été patient avec Saul de Tarse, d’une patience qui a dû coûter d’autant plus à Dieu que Saul persécutait des chrétiens, « pour les faire punir » (Ac 22.5).

Surprenant, cette patience de Dieu ? Nous, nous aurions interrompu tout cela au plus tard avant qu’il ne commence à persécuter les chrétiens ! Non ?

C’est que Dieu a toujours un plan, ne l’oublions pas, et ne l’oublions pas non plus dans ce que nous vivons. Oh ! certes, les persécutions n’étaient pas approuvées par Dieu et Paul parlera souvent de cette culpabilité. Il n’a pas dit : Puisque Dieu ne l’a pas empêché, c’est que c’était bon ! Non, c’était mauvais, très mauvais. C’était un péché terrible.

Mais cela devait servir de leçon au futur apôtre Paul, pour qu’il reste humble, et cela doit nous servir de leçon à nous aussi. Que visait Dieu en étant aussi patient avec Saul de Tarse ? Clairement, Paul nous dit que Dieu a été si patient avec lui aussi à cause de nous : « … afin que Jésus-Christ montre en moi le premier toute sa patience et que je serve ainsi d'exemple à ceux qui croiraient en lui pour la vie éternelle. » (v. 16)

Effectivement, la patience de Dieu a été phénoménale avec Saul de Tarse. Et cela doit « nous servir d’exemple » : c’est ainsi que Dieu se comporte avec nous aussi. Le temps de Dieu n’est pas le nôtre, la sérénité et la justesse de Dieu dans le gouvernement de nos vies ne correspond souvent pas à notre fébrilité et impatience.

Et heureusement qu’il sait être patient avec nous, car s’il s’était détourné de nous à notre première incartade, aucun de nous serait alors assis ici en ce moment, tous, il nous aurait rejetés depuis longtemps.

Pierre, l’apôtre dont notre paroisse porte le nom, nous écrit : « Considérez bien que la patience de notre Seigneur est votre salut ! » (2 P 3.15) Face à une telle patience, à une patience à laquelle nous devons notre salut, notre esprit, notre cœur, ne peut qu’être attiré « vers l’amour de Dieu et la patience de Christ » (2 Th 3.5)

Oui, prenons exemple sur Jésus-Christ : il a été patient sous les coups qu’il aurait pu s’éviter, qu’il aurait même pu rendre, sans problème ; il a surtout été patient – et cela était bien plus inhumain ! – dans les souffrances infernales endurées à cause de nous et pour notre salut.

Dans notre texte, l’apôtre Paul a donc d’abord souligné que Dieu nous surprend par sa patience,

X X X 2 X X X

Notre Dieu nous surprend par

sa grâce.

Et Paul en est le premier surpris, et le restera toute sa vie durant. Mais laissons-lui la parole :

« J’étais auparavant un blasphémateur, un persécuteur, un homme violent. Cependant, il m'a été fait grâce […]. La grâce de notre Seigneur a surabondé, avec la foi et l'amour qui sont en Jésus-Christ. […]. Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver des pécheurs. Je suis moi-même le premier d'entre eux, […] mais il m'a été fait grâce […]. » (v. 13-16)

Effectivement, si, dans l’histoire de Saul de Tarse, Dieu nous surprend par « sa patience », il le fait tout autant par « la grâce » dont bénéficie Saul, le « blasphémateur » et « persécuteur ».

La loi de Moïse était claire pour les blasphémateurs du sein du peuple d’Israël. Dieu avait fait aux descendants d’Abraham la faveur d’être son peuple élu, le peuple de son alliance, un peuple qui jouissait de ses bénédictions et de ses promesses temporelles et éternelles. En contrepartie, « celui qui blasphémera le nom de l’Eternel sera puni de mort » avait fait dire l’Allié divin à son peuple (Lv 24.16).

Le pharisien et spécialiste de l’Ancien Testament qu’était Paul le savait fort bien. C’est d’ailleurs l’accusation, fausse évidemment, que le sanhédrin a portée contre Jésus – et plus tard contre Etienne – pour pouvoir les condamner à mort. D’ailleurs, Saul était présent à la lapidation d’Etienne. « Saul approuvait l’exécution d’Etienne ». On peut même avoir l’impression qu’il la dirigeait. (Ac 7.58 – 8.1)

Que disent nos enfants ? « Celui qui le dit, il l’est ! » Effectivement, Saul qui disait que les chrétiens blasphémaient était un « blasphémateur », alors que celui qu’on accusait, Etienne par ex., ne l’était pas !

Plus tard, quand le Saint-Esprit, à travers l’enseignement d’Ananias à Damas, puis par les révélations qu’il fit à l’apôtre Paul, plus tard, donc, quand le Saint-Esprit plaça Paul devant la cruelle réalité de sa vie blasphématoire, ça l’a énormément ébranlé. Et Paul n’a jamais caché ce passé honteux.

Il l’a même utilisé, comme dans notre texte, pour nous faire comprendre l’immensité de la grâce de Dieu à l’égard des pécheurs, le caractère complètement surprenant et inattendu de cette grâce.

Le comportement de Dieu à l’égard de Saul de Tarse montre que la grâce de Dieu, c’est sa faveur imméritée pour l’amour de Jésus-Christ. Paul sait que c’est au sacrifice expiatoire de Jésus qu’il doit que Dieu a usé de clémence envers lui, au lieu de le châtier comme il l’avait mérité. « Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver des pécheurs. Je suis moi-même le premier d'entre eux, […] mais il m'a été fait grâce […]. » (v. 15-16)

Et cette grâce, cette faveur imméritée – mais que Jésus nous a obtenue sur la croix – est disponible pour les pécheurs les plus grossiers. Paul en savait quelque chose. « Je suis moi-même le premier d’entre eux » avoue-t-il ici.

Mais il est soulagé de savoir, comme il l’écrit aux Romains, que « là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » (Rm 5.20 ; Segond, Genève 1978). Cela, il le dit par expérience personnelle ; mais il le met par écrit, sous l’inspiration du Saint-Esprit, pour que nous aussi, nous ne désespérions jamais de la grâce de Dieu, quelle que soit la gravité de ce que nous avons fait.

Il dit la même chose dans notre texte : « La grâce de notre Seigneur a surabondé, avec la foi et l'amour qui sont en Jésus-Christ. » (v. 14)

« Si nous reconnaissons nos péchés » (1 Jn 1.9) et avons « foi », croyons, en ce que Jésus a fait et enduré pour nous, nous sommes graciés, pardonnés, car ce par quoi Jésus a passé à la pleine satisfaction du Père, cela suffit pour expier « les péchés du monde entier » (1 Jn 2.2), les tiens aussi, également les miens, même ceux d’un « blasphémateur » et « persécuteur » comme Saul de Tarse.

Et si un péché particulier devait ne pas te laisser la conscience tranquille, si un sentiment de culpabilité précis devait peser sur ta conscience, sache que la confession et l’absolution privées sont une institution du Seigneur, justement pour retrouver la sérénité et la joie auprès de Lui. Là, il confirme sa grâce à celui qui se repent et qui croit en Lui.

Alors là, oui ! Dieu nous surprend par sa grâce sans borne, après nous avoir déjà surpris par sa patience. Mais

X X X 3 X X X

Notre Dieu nous surprend aussi par

sa confiance,

par la confiance qu’il place en nous, par les responsabilités et les tâches qu’il ose nous confier !

Saul de Tarse lui-même n’en revient pas : Dieu le choisit, lui, le « blasphémateur » et « persécuteur », pour le prendre au « service » le plus éminent dans l’Eglise de Jésus-Christ : l’apostolat !

Et cela le remplit de « reconnaissance envers Jésus-Christ » : bien entendu, avant tout pour avoir été gracié et sauvé de la perdition et élevé au rang d’enfant de Dieu et de citoyen des cieux. Mais sa « reconnaissance envers […] le Seigneur » concerne aussi tout particulièrement « la confiance » que Jésus place en lui, vu son passé encore tout récent !

« Je suis reconnaissant envers celui qui m'a fortifié, Jésus-Christ notre Seigneur, car il m'a jugé digne de confiance en m'établissant à son service. » (v. 12)

Il n’y a d’ailleurs pas que Paul à avoir été surpris par « la confiance » que le Christ lui témoignait en le faisant apôtre.

Rappelez-vous Ananias, chargé de faire la cure d’âme et l’instruction de Saul de Tarse à Damas ! Quand Jésus lui dit : Saul de Tarse va être « un instrument […] pour faire connaître mon nom aux non-Juifs, aux rois et aux Israélite », la réaction de recul a été immédiate chez Ananias : « Seigneur, j’ai appris de beaucoup tout le mal que cet homme a fait à tes saints ! » (Ac 9.10-16)

Ensuite ce fut au tour de l’Eglise de Jérusalem et des apôtres d’avoir des doutes sur la sincérité de la conversion de Saul de Tarse. « Arrivé à Jérusalem, Saul essaya de se joindre aux disciples, mais tous avaient peur de lui, car ils ne croyaient pas qu’il était un disciple » (Ac 9.26). Et si c’était une manœuvre d’infiltration de la part de ce « persécuteur » ? En tout cas, ce n’est pas eux qui auraient fait confiance à Saul pour en faire un des leurs, et encore moins un des apôtres ! Le Seigneur a pris tout le monde au dépourvu !

Chers amis, ne vous est-il jamais arrivé de vous dire que Dieu avait vraiment le goût du risque en vous confiant une responsabilité particulière, en vous demandant de remplir un « service » précis ?

Nous avons tous une certaine connaissance de notre personne, et même si certains peuvent avoir découvert en nous une faiblesse que nous ne discernons pas avec la même netteté, nous en savons assez sur nous-mêmes pour être étonnés que « Jésus-Christ, notre Seigneur » nous ait « jugés dignes de confiance en nous établissant à son service » !

Il est frappant de voir que dès que la grâce est faite à quelqu’un d’être inséré dans « la maison spirituelle » de l’Eglise, il est appelé « pierre vivante » (1 P 2.5), non seulement une pierre qui a reçu la vie de la foi, mais qui rayonne et qui transmet aussi cette vie !

Lorsque nous avons été « appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière », nous avons aussitôt été revêtus de la responsabilité « de proclamer les louanges » de notre Sauveur ! (1 P. 2.9).

Certains sont mêmes appelés à des fonctions particulières dans l’Eglise, voire à un ministère particulier comme diacre, ou même au ministère pastoral. Cette « confiance » que nous fait le Seigneur nous émeut et nous réjouit, bien entendu, mais elle nous surprend aussi. Nous ne nous en trouvons pas seulement indignes, mais souvent pas non plus à la hauteur de la tâche.

Et là il est bon de savoir : c’est le Seigneur qui « m’a jugé digne de confiance en m’établissant à son service ». Oh ! il ne le fait pas de façon aveugle. Il nous dirige et nous seconde, il nous « fortifie » aussi dans nos responsabilités et il agit lui-même à travers notre témoignage.

Ainsi, pour pouvoir exercer son apostolat, Paul a « reçu l’Esprit qui vient de Dieu ». Aussi pouvait-il dire : Nous, les apôtres, « nous parlons [des bienfaits de Dieu] avec les paroles […] qu’enseigne l’Esprit saint. ». Son apostolat ne repose donc pas sur sa « sagesse humaine », mais sur la révélation et l’accompagnement du Saint-Esprit (1 Co 2.12-13)

Et pour que nous, nous puissions le servir là où il nous a placés dans la vie et dans l’Eglise, il nous a donné dans la Bible d’une part son Evangile pour nous « fortifier » dans notre foi, d’autre part ses indications ou dispositions pour nous permettre de nous repérer et de nous diriger.

Ainsi, s’il nous surprend par sa « confiance », il nous étonne aussi par les moyens qu’il met à notre disposition pour que nous puissions exercer le « service » qu’il nous a confié.

S’il nous a « confié » à tous des responsabilités, faisons-lui confiance en retour : il nous assistera aussi. Ne pas lui faire confiance pour le « service » dans lequel il nous a appelés, ce serait l’accuser de s’être trompé en nous faisant « confiance ».

Même, ne pas « être reconnaissant » à Jésus de nous avoir fait « confiance » en « nous prenant à son service », c’est méconnaître le grand honneur qu’il nous fait ainsi, méconnaître aussi que « la moisson est grande » et qu’il n’y a pas trop « d’ouvriers dans la moisson’ » (Mt 9.37-38)

Non, soyons humbles en ce qui nous concerne, confessons aussi nos manques et nos manquements, mais ayons confiance en

ce Dieu qui nous surprend

1. par sa patience,

2. par sa grâce, et

3. par sa confiance !

« Au roi des siècles, au Dieu immortel, invisible et seul sage soient honneur et gloire aux siècles des siècles ! Amen ! » (v. 17)

Jean Thiébaut Haessig


Chants proposés :

Viens, Créateur, emplis nos âmes AeC 501 :1-3

Ø Liturgie d’entrée

Je crois en Dieu, le Créateur, AeC 565 : 1-3

Non point à nous-mêmes, Seigneur AeC 539 : 1-4

Ø Prédication

Je veux répondre, ô Dieu ! AeC 415 : 1-3