dimanche 25 février 2007

Sermon du 18 février 2007 - Quinquagésime

Quinquagésime Am 7.10-15
Châtenay-Malabry 18.02.2007

Chants :
A Dieu soit la gloire AeC 277 : 1-2
Viens, Créateur, emplis nos âmes AeC 501 : 1-3
Mon Dieu, mon Père, écoute-moi AeC 405 : 1-4

*********************

7:10 Alors Amatsia, prêtre de Beth-El, fit dire à Jéroboam, roi d'Israël :
« Amos conspire contre toi au sein de la maison d'Israël ; le pays ne peut supporter toutes ses paroles.

7:11 Car ainsi parle Amos :
Jéroboam mourra par l'épée,
et Israël sera exilé loin de sa terre. »

7:12 Amatsia dit à Amos :
« Va-t'en, visionnaire, va te réfugier au pays de Juda ; là-bas, tu pourras manger ton pain et parler en prophète.

7:13 Mais ne continue pas à parler en prophète à Beth-El, car c'est un sanctuaire de roi, et une maison royale. »

7:14 Amos répondit à Amatsia :
« Je ne suis ni prophète, ni fils de prophète ; je suis éleveur de bovins et cultivateur de sycomores.

7:15 Le Seigneur m'a pris derrière le troupeau ; le Seigneur m'a dit :
Va, parle en prophète à Israël, mon peuple. »

*********************
Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,

Société de consommation : voilà comment on définit la société dans laquelle nous vivons. Dès qu’on a acquis quelque chose, on songe déjà à la chose suivante qu’on va acheter. Le style de vie est complètement axé sur l’acquisition d’une chose après l’autre, l’accroissement de ses biens, l’amélioration de son confort, l’élévation de son niveau de vie.

En soi cela ne serait pas à mépriser, cela pourrait correspondre à l’ordre de Dieu de bien gérer sa création. Là où cela devient problématique, c’est quand on devient un éternel insatisfait et qu’on sacrifie un peu tout à cette course à toujours plus de consommation.

Un autre terme qu’on pourrait encore utiliser, c’est le matérialisme : les plaisirs que procurent l’argent et les biens étouffent l’âme et ne permettent plus d’assouvir ses besoins à elle.

Il faut dire qu’on nous provoque à longueur de journée : la télé déballe à l’écran tout ce qu’il y a à acheter. Nos boîtes aux lettres sont bourrées de kilos de prospectus et autres catalogues. Et quand nous allons au super – et pire, à l’hypermarché – à côté et autour des articles que nous avions l’intention d’acheter se bousculent une infinité d’autres articles qui nous tendent les bras.

Comment s’étonner que l’homme contemporain n’en a jamais assez, ni d’ailleurs jamais assez d’argent pour acheter ce qui existe aussi et qu’il ne possède pas encore. Comment s’étonner que cette aspiration par les biens matériels occupe tellement son esprit qu’il ne peut plus songer à son Dieu et à son royaume.

C’est ce genre de société qu’a connu le peuple d’Israël au 8ème siècle avant Jésus-Christ. Bien sûr, il n’y avait ni supermarchés ni hypermarchés, pas davantage de catalogues de vente par correspondance ni possibilité d’acheter sur Internet.

Mais à l’époque, on vivait bien, toutes proportions gardées. Certes, il y avait aussi les exploités et les négligés, voire oubliés, mais le pays connaissait la stabilité politique, la paix, suffisamment de denrées de consommation, ce qui n’était pas courant à l’époque.

Le royaume de Juda au sud, avec Jérusalem comme capitale, et le royaume d’Israël au nord, avec Samarie comme capitale, dépassaient ensemble le royaume de Salomon en surface et en aisance.

Dans le royaume du nord, la vie cultuelle se déroulait, extérieurement, on ne peut mieux. Les sacrifices et autres rites étaient célébrés avec régularité, au milieu d’une assistance nombreuse. Il y existait même des écoles de prophètes, une espèce de séminaires théologiques où l’on formait des prophètes.

Mais – car, il y avait un mais – mais dans les cœurs, la foi était morte. La société de consommation avait transformé les cœurs en cœurs de pierre. La convoitise avait étouffé tout sentiment pour Dieu et le prochain. On ne trouvait ni le temps ni l’argent pour venir en aide aux pauvres : il fallait constamment améliorer son propre confort. Dieu devait se contenter de l’assistance superficielle et du superflu comme dons.

Cela, les prophètes issus de ces écoles de prophètes, l’avaient bien compris. Il faut flatter les gens, leur annoncer que ce qu’ils veulent entendre, éviter de leur dire la vérité : ils pourraient ne pas la supporter.

Ces faux prophètes du Royaume du Nord ne se souciaient pas de la volonté de Dieu : ils prêchaient ce qui plaisait au peuple. Ils se sont laissés acheter. Au lieu de détourner le peuple corrompu et impénitent de sa perte, ils l’encourageaient à continuer dans sa voie, si c’était ce que le peuple désirait.

Aussi Dieu envoya-t-il du Royaume du Sud dans celui du Nord
*********************
UN PROPHETE
QU’ON NE POUVAIT SOUDOYER,
*********************

un prophète à qui on n’avait pas appris dans les écoles comment flatter les gens, comment leur promettre ce qu’ils désiraient et comment on leur taisait ce qui les aurait vexés et humiliés.

Dieu envoya « Amos ». Celui-ci se présente ainsi : « Je suis éleveur de bovins et cultivateur de sycomores. Le Seigneur m'a pris derrière le troupeau ; le Seigneur m'a dit : Va, parle en prophète à Israël, mon peuple. »

Les prophètes formés dans les écoles ne voulaient pas dire la vérité ? Dieu va donc envoyer un « éleveur de bovins » pour le faire. La vérité que Dieu le charge d’annoncer n’est pas bonne à entendre ; elle est tout sauf agréable. « Le peuple ne peut supporter les paroles » de Dieu dites par Amos. « Amatsia, prêtre de Beth-El, » n’a pas honte d’aller le « dire à Jéroboam, le roi d’Israël ».

Eh oui, le peuple ne pouvait supporter les reproches du prophète Amos. Mais « Amatsia, le prêtre, » et ses semblables ne pouvaient pas non plus supporter que cet étranger sans éducation vienne les accuser d’être des prophètes de mensonge ! Ils étaient vexés dans leur dignité d’intellectuels et d’érudits de la classe dirigeante

Du haut de sa position de dignitaire, Amatsia réprimande « l’éleveur et cultivateur » Amos : « Va-t'en, visionnaire, va te réfugier au pays de Juda ; là-bas, tu pourras manger ton pain et parler en prophète. Mais ne continue pas à parler en prophète à Beth-El, car c'est un sanctuaire de roi, et une maison royale. »

Autrement dit : « Va à tous les diables ! Ici on prêche comme cela plaît au roi qui ne veut pas de remous ! »

Mais Amos ne se laisse pas ébranler. On a l’impression que ces paroles que, plus tard, l’apôtre Paul adressera à son jeune collaborateur Timothée, Dieu les avait déjà dites à Amos :

« Proclame la Parole, interviens en toute occasion, favorable ou non, réfute, reprends, encourage, en te montrant toujours patient dans ton enseignement. Car il viendra un temps où ils ne supporteront plus l'enseignement sain ; mais au gré de leurs propres désirs, avec une démangeaison d'entendre, ils se donneront maîtres sur maîtres ; ils détourneront leurs oreilles de la vérité et dévieront vers les fables. » (2 Tm 2.4)

Amos savait que « ce qu'on demande d'un intendant, c'est qu'il soit digne de confiance. » (1 Co 4.2) Il voulait servir Dieu fidèlement, que cela plaise aux autres ou non.

Amos a nommé les péchés du peuple par leur nom. Il leur a parlé franchement, et cela a fait mal. Il leur a annoncé que leur orgueil les avait éloignés de Dieu, que leur soif de richesses, leur penchant maladif pour toujours plus de confort, leur matérialisme idolâtre les menaient à leur perte. Cela, on n’aime pas l’entendre.

Amos ne veut pas leur faire du mal pour leur faire du mal. Non, il établit et leur révèle le diagnostic, aussi effrayant qu’il soit, pour qu’ils se tournent vers le médecin qui seul peut leur venir en aide. Et ce médecin céleste les interpelle à travers Amos : « Cherchez-moi et vivez ! » (Am 5.4)

Pour demeurer en vie, il faut parfois se soumettre à une intervention chirurgicale, comme, il y a vingt-deux ans, j’ai dû me faire enlever une tumeur maligne pour que le mal ne m’emporte pas.

C’est pareil sur le plan spirituel. Pour préserver quelqu’un de la damnation éternelle, il faut parfois intervenir d’une façon qui l’humilie devant Dieu, d’une façon qui le touche au cœur. Mais c’est pour que le péché ne l’entraîne pas dans la perte éternelle.

La tâche dont Dieu a chargé Amos à l’époque, aujourd’hui il en charge les prédicateurs. « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil » (Ec 1.9) Au fond, notre monde n’a pas changé.

La course effrénée à l’accroissement de nos biens fait que nous en arrivons à ne plus nous connaître nous-même, car nous ne trouvons plus le temps – peut-être pas non plus le courage – de réfléchir sérieusement à nous-même, d’examiner si notre état d’esprit et notre style de vie montrent que « nous craignons et aimons Dieu par-dessus toute chose et mettons en lui seul notre entière confiance ». (Martin Luther, « Petit Catéchisme »)

Aujourd’hui aussi il faut annoncer la Loi de Dieu. Aujourd’hui aussi il faut avoir le courage de nommer un péché par son nom. Ce n’est pas une solution, la politique de l’autruche. Ce n’est pas une solution que de ne plus appeler un comportement pécheur un péché. C’est à cause d’une telle politique de l’autruche que les gens ne sont plus capables de se repentir et de lutter contre les dérèglements de toute sorte, particulièrement dans le domaine de la sexualité.

N’est-ce pas de bon ton que de trouver la pratique sexuelle des jeunes, les unions libres, les infidélités, même la pratique homosexuelle comme des comportements normaux. Ne taxe-t-on pas ceux qui ont confiance en la volonté et les dispositions de Dieu en la matière comme des rétros, pour ne pas dire des fachos, comme des gens dénués d’amour et intégristes ?

Le 5ème Commandement, celui par lequel Dieu veut protéger la vie, gêne notre société tout autant. Que n’avons-nous pas de nouveau dû entendre le week-end dernier, à l’occasion du référendum sur la légalisation de l’avortement au Portugal ! Un enfant n’est pas désiré ? Qu’à cela ne tienne : la loi française permet de le tuer.

Ou « honorer et aimer » les parents, les supérieurs, les enseignants, les pasteurs, comme Dieu le demande dans le 4ème Commandent ? Mais c’est complètement dépassé !

D’ailleurs, il ne faut surtout plus parler de péché. Ça culpabilise. Il faut approuver, flatter et louer les gens : c’est cela qu’ils aiment entendre. Aujourd’hui aussi « le peuple ne peut entendre les paroles » où Dieu appelle à la repentance.

C’est exactement ce qu’un pasteur d’une autre église a répondu à une de ses paroissiennes qui lui demandait, au retour du cimetière, pourquoi il ne délivrait pas des sermons d’enterrement comme le faisait le pasteur de notre église. « Le peuple ne peut entendre les paroles », aussi dit-on au peuple ce qu’il aime entendre.

Amos a annoncé un terrible jugement au peuple infidèle. Il était chargé de l’amener à reconnaître la vérité sur son compte s’il devait se repentir et ne pas négliger le salut que Dieu lui offrait.

Alors demandons-nous en toute honnêteté :

Comment réagissons-nous quand on nous signale un péché précis, quand on nous dévoile que nous nous sommes rendus coupables devant Dieu ?

Sommes-nous reconnaissant quand quelqu’un a le courage de nous rendre ce si difficile service d’amour qui consiste à nous indiquer le chemin vers le salut ? Ou sommes-nous irrités, nous vexons-nous et réagissons-nous en conséquence, comme si nous étions parfaits ? Dans ce cas, nous ne nous repentirons pas et ne « chercherons » pas « le Seigneur », et ne vivrons pas de sa grâce et de son pardon.

Outrés, les gens ont rejeté la prédication d’Amos, ils ont fait fi de ses appels à la repentance. Amos devait faire place nette et annoncer son message à d’autres !

Le châtiment de Dieu sur le peuple d’Israël sera effrayant. Leur rejet entêté de l’offre de grâce de Dieu amènera la ruine de leur pays.

Que le Seigneur nous préserve d’un tel aveuglement coupable ! Le message du Nouveau Testament est aujourd’hui encore le même que celui d’Amos : « Repentez-vous et croyez en l’Evangile ! » (Mc 1.15) Reconnaissez votre état pécheur et la culpabilité devant Dieu qui en découle. Et remettez-vous en aux offres de salut de Dieu : pour l’amour du Christ il veut il vous éviter la damnation pourtant méritée !

Dieu est sincère avec son offre de pardon et de salut. Il nous promet : « Quand vos péchés seraient comme l'écarlate, ils deviendraient blancs comme la neige ; quand ils seraient rouges comme le cramoisi, ils deviendraient comme la laine. » (Es 1.19)

Pour que cela soit possible, le Fils de Dieu s’est jeté lui-même dans la balance. A notre place, il a mené exactement la vie parfaite qui nous effraye parce que nous redoutons d’y perdre notre paix, notre confort, notre niveau de vie. Lui s’y est engagé résolument. Il l’a fait pour pouvoir, par sa vie sans reproche, nous racheter et nous délivrer des conséquences de notre comportement pécheur.

Lui, notre Seigneur Jésus-Christ, est demeuré saint jusque dans son sacrifice expiatoire pour nos péchés. « Il a lui-même porté nos péchés en son corps, sur le bois, afin que, morts aux péchés, nous vivions pour la justice. » (1 P 2.24)

Soyons donc humbles et reconnaissants. Rendons grâces à Dieu pour sa Loi autant que pour son Evangile. Remercions-le d’avoir couvert notre péché avec la justice de Jésus. Remercions-le de nous avoir ainsi dégagés du poids de la mauvaise conscience, de nous avoir libérés de la menace du châtiment ! Cela nous libère pour « vivre pour la justice » sans crainte aucune.

De façon momentanée, passagère, la vérité de la Parole de Dieu peut blesser dans une situation donnée. Mais n’oublions pas : Dieu ne songe qu’à une chose, il ne poursuit qu’un seul but : répandre sa bénédiction éternelle sur ceux que sa Parole a pu amener à la repentance et à la foi en son Fils, le Sauveur des pécheurs.

Amen.

Jean Thiébaut Haessig
12 582