samedi 12 juillet 2008

Sermon du 6 juillet 2008 - 7ème dimanche après la Trinité

Chants proposés :

Je chanterai, Seigneur, LlS 22:1-4
O Dieu fort, ô tendre Père, LlS 137:1-2+4-5
Dieu de paix, Dieu de charité, LlS 268:1-3+5
Jésus, à sa table sacrée, LlS 163:1-9
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Texte : Jn 6.1-15

6:1 « Après cela, Jésus s'en alla sur l'autre rive de la mer de Galilée, la mer de Tibériade.
6:2 Une grande foule le suivait, parce qu'elle voyait les signes qu'il produisait sur les malades.
6:3 Jésus monta sur la montagne ; là, il s'assit avec ses disciples.
6:4 Or la Pâque, la fête des Juifs, était proche.
6:5 Jésus leva les yeux et vit qu'une grande foule venait à lui ; il dit à Philippe : "Où achèterons-nous des pains pour que ces gens aient à manger ?"
6:6 Il disait cela pour le mettre à l'épreuve, car il savait, lui, ce qu'il allait faire.
6:7 Philippe lui répondit : "Deux cents deniers de pains ne suffiraient pas pour que chacun en reçoive un peu."
6:8 Un de ses disciples, André, frère de Simon Pierre, lui dit :
6:9 "Il y a ici un jeune garçon qui a cinq pains d'orge et deux poissons ; mais qu'est-ce que cela pour tant de gens ?"
6:10 Jésus dit : "Faites installer ces gens." – Il y avait beaucoup d'herbe en ce lieu. – Ils s'installèrent donc, au nombre d'environ cinq mille hommes.
6:11 Jésus prit les pains, rendit grâce et les distribua à ceux qui étaient là ; il fit de même pour les poissons, autant qu'ils en voulurent.
6:12 Lorsqu'ils furent rassasiés, il dit à ses disciples : "Ramassez les morceaux qui restent, pour que rien ne se perde."
6:13 Ils les ramassèrent donc ; ils remplirent douze paniers avec les morceaux des cinq pains d'orge qui restaient à ceux qui avaient mangé.
6:14 A la vue du signe qu'il avait produit, les gens disaient : "C'est vraiment lui, le Prophète qui vient dans le monde."
6:15 Jésus, sachant qu'ils allaient venir s'emparer de lui pour le faire roi, se retira de nouveau sur la montagne, seul. »

Cher frère, chère sœur –
que le Seigneur a comblé de richesses spirituelles,
mais aussi de biens matériels !

Dans nos cultes, dans nos études bibliques, au catéchisme, nous parlons le plus souvent des bénédictions spirituelles et éternelles que nous recevons sans compter et sans les avoir méritées de la part de notre Dieu sauveur.
Mais Dieu nous a aussi comblés de bienfaits matériels. Jésus nous apprend à prier pour ces bienfaits matériels aussi : « Donne-nous, aujourd’hui, notre pain de ce jour ! » (Mt 6.11)
Certes, ce n’est qu’une Demande sur sept ; il n’en demeure pas moins que Dieu nous a créés avec un corps qui a ses besoins et nous a placés dans ce monde matériel qu’il a créé et que nous devons gérer avec sa bénédiction ; que nous devons aussi gérer dans l’état d’esprit de notre divin Bienfaiteur, en faisant à notre tour de la bienfaisance.
Justement, notre texte ne nous montre pas seulement comment Jésus a fait du bien à d’autres ; nous y apprenons aussi à quoi devrait ressembler notre bienfaisance à nous.

NOUS FAISONS LE BIEN

1. malgré les innombrables détresses,
2. malgré nos moyens limités,
3. par reconnaissance envers le Seigneur,
4. avec confiance en notre Seigneur.

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NOUS FAISONS LE BIEN MALGRE LES INNOMBRABLES DETRESSES

« Malgré » ? … Curieuse façon de s’exprimer, n’est-ce pas ? On s’attendrait plutôt à entendre dire : Nous faisons le bien « à cause » des innombrables détresses…
Non, ce n’est pas un lapsus : Nous faisons aussi le bien « malgré » les innombrables détresses… Comment peut-on parler ainsi ? Cela, notre texte nous le montrera. D’ailleurs, c’est souvent ainsi que cela se passe dans la vie.

Les disciples de notre Seigneur se sont trouvés subitement face à un défi tel, face à une tâche telle, qu’ils s’adressent à Jésus sur un ton si ce n’est déprimé, du moins résigné. « Une grande foule » venait à eux. « 5000 hommes, sans compter les femmes et les enfants » (Mt 14.21), précise Matthieu de son côté.
Cette foule faisait face à un grave problème. Marc raconte : « Jésus fut rempli de compassion pour eux, parce qu'ils étaient comme des brebis qui n'ont pas de berger, et il se mit à leur enseigner beaucoup de choses. » (Mc 6.34)

La plus grande de leurs détresses était d’ordre spirituel. Ils ne connaissaient pas le Bon Berger qui donne sa vie pour ses brebis. Ils se tenaient devant lui sans se rendre compte de qui il était pour eux. Certes, ils le considéraient comme quelqu’un d’exceptionnel, sinon ils ne l’auraient pas suivi aussi loin et en aussi grand nombre, mais ils n’avaient pas encore découvert toute la majesté et toute la gloire qu’étaient celles de Jésus de Nazareth. Et ils n’avaient sans doute pas non plus reconnu le plus grand de leurs besoins.

« Une grande foule le suivait, parce qu'elle voyait les signes qu'il produisait sur les malades. » (v. 2), puis, à la fin de l’histoire, ils voulaient « le faire roi » (v. 15), un roi politique pourvoyeur de biens à moindre frais, mais non pas berger de leurs âmes. Ils ne voient que leur détresse matérielle, pas leur détresse spirituelle. Ils recherchent en Jésus quelqu’un qui résout leurs problèmes matériels et de santé, mais non leur gros problème qu’est le péché.

Mais Jésus s’occupe en premier lieu de leur détresse spirituelle, de leur âme… « et il se mit à leur enseigner beaucoup de choses » (Mc 6.34). C’était là son ministère premier, et c’est là aussi le rôle premier et principal de l’Eglise de Jésus-Christ, comme de chaque chrétien.
Mais cela ne veut pas dire que nous demeurions insensibles aux détresses physiques et matérielles des gens que nous côtoyons ou que nous puissions les ignorer. Après s’être occupé de la détresse spirituelle de la foule, Jésus « guérit les malades » (Mt 14.14) et, « le soir » (Mt 14.15), il demande à ses disciples comment on pourrait donner à manger à cette foule affamée.
Les disciples n’ont pas de solution à ce problème. Si, ils en ont une : renvoyer ces gens chez eux dans leurs différents bourgs et villages sans avoir pu les nourrir.

N’est-ce pas aussi parfois notre réaction devant l’immensité des besoins dans le monde ? La tâche nous paraît si démesurée que les bras nous en tombent et que nous commençons par ne rien faire. Nous sommes comme paralysés devant l’immensité de la tâche. A peine avons-nous fait une collecte pour venir en aide à des sinistrés d’une catastrophe que les prochains frappent déjà à notre porte. Et que dire des innombrables mendiants rencontrés dans le métro et le RER ? Le salaire pourrait y passer par jour ! C’est à désespérer, non ? – Et bien, non !

Malgré les nombreuses plaies qui recouvrent notre planète, malgré le grand nombre de détresses qui nous environnent, nous voulons venir en aide selon nos moyens, exercer la bienfaisance autant que nous le pouvons. Et

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NOUS FAISONS LE BIEN MALGRE NOS MOYENS LIMITES

dont nous disposons. Notre budget familial est limité, et c’est pareil pour notre budget paroissial – alimenté par nos budgets familiaux – et notre budget synodal – alimenté par nos budgets paroissiaux –. C’est que le nombre de nos membres, lui aussi, n’est pas illimité… loin s’en faut ! Il est même bien peu de choses face aux innombrables nécessiteux de la terre.
Quand, par exemple, nous faisons une collecte lancée par notre « Association Evangélique Luthérienne de Bienfaisance » (l’AELB) de quelques milliers d’euros pour venir en aide à des sinistrés qui auraient besoin de plusieurs millions, voire milliards d’euros pour réparer, reconstruire et refaire fonctionner leur économie normalement, ou tout simplement pour qu’ils aient un abri décent et de quoi manger suffisamment, nous avons l’impression que notre bienfaisance n’est qu’une goutte d’eau sur une pierre chaude, voire sur un désert brûlant.
Nous ressentons alors la même impuissance que les disciples avec leurs « cinq pains d'orge et deux poissons » (v. 9) face à cette foule d’affamés de plus de « cinq mille » personnes (v. 10 ; Mt 14.21) et nous soupirons : « Qu'est-ce que cela pour tant de gens ? » (v. 9) N’est-ce pas peine perdue ? Et pourtant Jésus demande à ses disciples de commencer avec le peu qu’ils ont pour soulager ces nécessiteux.

Il est vrai, « il savait, lui, ce qu'il allait faire » (v. 6), il savait comment il allait faire beaucoup avec le peu que ses disciples avaient à leur disposition.
Il avait, de même, attendu de la pauvre veuve de Sarepta qu’elle donne au prophète Elie le peu qu’elle avait à manger. Et, ô miracle ! Dieu a fait le nécessaire pour qu’elle ne manque de rien par après (1 R 17.9-16)

Ainsi, le petit nombre de paroissiens que nous sommes fait souvent face à tant de tâches, de responsabilités et de besoins que nous sommes tentés de soupirer : « Qu'est-ce que cela pour tant » de tâches, de besoins, de responsabilités ? (v. 9) Il y a les besoins matériels de la paroisse et de l’église qui ne font que croître, et dans cette situation, Jésus nous demande, comme il l’a fait ici à Philippe : "Où achèterons-nous des pains pour que ces gens aient à manger ? » (v. 5) « Où trouverons-nous le nécessaire pour répondre aux besoins financiers de l’Eglise ? »
Allons-nous alors réussir l’examen de notre foi en Lui, ou allons-nous verser dans le doute et répondre comme Philippe : « Pas assez ! "ça ne suffit pas !" » (v. 7)

Le Seigneur n’est pas inconscient. Il sait devant quelles tâches il nous place. Et s’il a disposé les choses de manière à ce que nous soyons ses intermédiaires pour apporter notre aide là où elle est nécessaire, il nous permettra aussi de trouver les moyens pour remplir notre mission.

D’ailleurs, avons-nous épuisé toutes les ressources à notre disposition ? Aux disciples Jésus dit : « Ramassez les morceaux qui restent, pour que rien ne se perde. » (v. 12) Ne laissons-nous pas « se perdre » un tas de choses ! Que de gaspillage ! Et combien d’argent ne dépensons-nous pas pour des futilités qui ne servent à personne, à nous non plus !
Par exemple : Que faites-vous de vos anciennes lunettes ? On peut les donner pour les malvoyants du Tiers-Monde. Et pourquoi pas pour nos frères et sœurs dans les deux Congos ? Que ne jetons-nous pas, alors que cela pourrait encore servir, si ce n’est à nous, du moins à d’autres ? Le tri sélectif est une première démarche en ce sens. Le ramassage de vêtements dans notre paroisse pour distribution aux nécessiteux en est une autre. L’amour du prochain devrait nous faire découvrir d’autres canaux pour venir en aide les uns aux autres, ainsi qu’au travail de l’Eglise.

Oui, nous voulons faire le bien malgré les détresses sans nombre autour de nous, malgré nos moyens limités, car

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NOUS FAISONS LE BIEN PAR RECONNAISSANCE ENVERS NOTRE SEIGNEUR

à qui nous devons tant ! Ce qu’il a « enseigné » à cette foule qui l’a « ému, parce qu'ils étaient comme des moutons qui n'ont pas de berger » (Mc 6.34), il nous le fait aussi annoncer par l’Evangile de grâce et de vie. Nous savons tout ce que nous lui devons, à lui, « le Bon Berger qui [s’est} défait de sa vie pour » nous, « ses moutons » (Jn 10.11). Nous savons comment il nous a ainsi évité la colère de Dieu et notre damnation. Nous savons comment il nous a arrachés des griffes de Satan et mis en sécurité dans son Royaume de grâce et de pardon.

Il n’a pas lésiné sur le prix à payer pour nous combler ainsi : sa propre vie, il l’a jetée sur la balance, tant il nous aime ! Comment pourrions-nous ne pas l’aimer en retour et ne pas lui montrer notre gratitude ? Aussi notre gratitude pour sa sollicitude de tout instant ?
Et quel meilleur moyen de lui montrer notre gratitude que d’essayer de régler notre vie sur la sienne ? Jésus nous montre, par exemple, comment faire du bien. Il est toujours venu en aide aux autres. La même attitude devrait aussi être la nôtre, à nous, ses disciples. C’est là une occasion toute trouvée de faire plaisir à notre Seigneur. « N'oubliez pas la bienfaisance et la solidarité, » nous rappelle l’épître aux Hébreux, « car c'est à de tels sacrifices que Dieu prend plaisir. » (Hé 13.16)

La multiplication des pains a aussi commencé avec une prière d’action de grâces. « Jésus prit les pains, rendit grâce et les distribua » (v. 11). Notre bienfaisance devrait se faire dans le même état d’esprit, non pas à contrecœur, non pas en murmurant, par exemple : « Mon Dieu ! mon Dieu ! qu’est-ce que tu me demandes encore de faire d’impossible ! », mais avec action de grâces : « Comme tu es bon de m’avoir béni ! Comme tu m’honores de m’employer – comme les douze lors de la multiplication des pains – pour donner de tes biens à ceux qui en manquent ! »
Celui dont le cœur déborde ainsi de gratitude envers Dieu, celui-là dira : « Présent ! » lorsqu’il s’agira d’assister son Seigneur et Maître ! Cela,

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NOUS LE FAISONS, LE BIEN, PARCE QUE NOUS AVONS CONFIANCE EN NOTRE SEIGNEUR

Il leur fallait une bonne dose de confiance en leur maître, à ces disciples, pour tout organiser et faire asseoir la foule et les nourrir avec « cinq pains et deux poissons ». Ils n’avaient aucune idée comment cela pouvait être possible, et cependant ils font ce que le Seigneur attend d’eux. Ils avaient foi en lui : il s’en sortira bien !
Et, ô miracle ! Jésus multiplia « les cinq pains et les deux poissons » en sorte que « tous mangèrent et furent rassasiés » (Lc 9.17).
Cette histoire nous montre que la bienfaisance chrétienne est une affaire de foi, de confiance en Dieu. Ne doutons pas de la sollicitude de Dieu pour nous, ne doutons pas que Dieu bénit effectivement la bienfaisance, sinon nous allons hésiter à faire le bien ; peut-être que nous participerons à contrecoeur, à cause du qu’en dira-t-on, mais ce que nous ferons alors ne sera pas de la bienfaisance à laquelle Dieu prend plaisir.

Il est vrai, Dieu place parfois la barre bien haut, par exemple pour entretenir la vie et les activités de notre église, ou pour le démarrage d’un nouveau poste missionnaire. A vue humaine, cela paraît parfois aussi irréalisable que de nourrir plus de 5000 personnes avec cinq pains et deux poissons.

C’est qu’il faut inclure Dieu dans notre calcul. Avec lui, les comptes seront équilibrés, à moins que nous ne doutions de lui. Comme il l’a attendu des douze à l’époque, il attend aussi de nous aujourd’hui que nous lui montrions que notre foi, ce ne sont pas de simples mots, des mots vides de contenu, mais une réalité qui nous anime et donne le ton à notre existence. Lui sait alors comment cela doit continuer.

Le Siracide, écrit apocryphe de l’Ancien Testament, dit : « Faire le bien est un jardin béni » (Si 40.17). Cela s’est avéré lors de la multiplication des pains : à la fin ils ont été plus riches qu’au début. Au début ils n’avaient que cinq pains et deux poissons ; à la fin ils se sont retrouvés avec « douze paniers avec les morceaux des cinq pains d'orge qui restaient » (v. 13).
C’est là une réalité du Royaume de Dieu : Quand un croyant ou une paroisse « accorde une faveur au pauvre, » il « prête à l'Eternel, qui lui rendra son bienfait. » (Pr 19.17)[1].

Prions Dieu pour que l’histoire de la multiplication des pains pour nourrir les 5000 nous donne une nouvelle impulsion pour

FAIRE LE BIEN

1 malgré les innombrables détresses,
2 malgré nos moyens limités,
3 par reconnaissance envers le Seigneur,
4 avec confiance en notre Seigneur.

Amen.

Jean Thiébaut Haessig

[1] Pr 19.17 dans Segond 21