dimanche 18 mai 2008

Sermon du 18 mai 2008 - Trinité

Fête de baptême

Texte : Mt 28.16-20

16 « Les onze disciples allèrent en Galilée,
sur la montagne que Jésus avait désignée.
17 Quand ils le virent,
ils se prosternèrent,
mais quelques-uns eurent des doutes ;
18 Jésus s'approcha et leur dit :
"Toute autorité m'a été donnée
dans le ciel et sur la terre.
19 Allez,
faites des gens de toutes les nations
des disciples,
baptisez-les
au nom du Père, du Fils et de l'Esprit saint,
20 et enseignez-leur à garder
tout ce que je vous ai commandé.
Quant à moi, je suis avec vous
tous les jours, jusqu'à la fin du monde." »
[1]

Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,
– et tout particulièrement
chers Lydia, Idelette et Andriamijoro
qui amenez Miranto au Baptême,


Cela se passe sur une « montagne », dans un cadre exceptionnel : au-dessus le ciel, en bas la terre. Un cadre exceptionnel pour un événement exceptionnel. Jésus y a convoqué les siens. « Les onze disciples allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus avait désignée. » (v. 16) Ce rassemblement, Jésus l’a au moins annoncé trois fois après sa résurrection. Il devait donc se situer vers la fin des quarante jours. Etait-ce la dernière fois avant son ascension ? Ce sont des détails que notre curiosité aimerait connaître mais qui ne sont pas d’une importance capitale. C’est ce qui va s’y passer qui est important.


Si notre texte indique que « les onze » y « allèrent », au matin de Pâques, Jésus y avait convié tous les siens, particulièrement les femmes auxquelles l’ange, près de la tombe vide, avait dit : « Allez vite dire à ses disciples qu'il s'est réveillé [ressuscité] d'entre les morts. Il vous précède en Galilée ; c'est là que vous le verrez » (Mt 28.7), vous, les femmes, aussi.


Est-ce à ce moment-là, sur cette « montagne », qu’il « est apparu à plus de cinq cents frères à la fois » (1 Co 15.6), événement que nous rapporte l’apôtre Paul ? Il devait y avoir de 300 à 440 disciples « en Galilée », non loin de cette « montagne » où Jésus les avait conviés, car, au matin de la Pentecôte, il n’y en avait qu’« environ 120 » à Jérusalem (voir Ac 1.15).


Curieusement, rien n’est dit de la manière dont Jésus s’y est rendu. Le texte dit simplement : « Quand ils le virent… » (v. 17). Tout à coup « ils le virent. » C’est là la chose importante. Il est avec les siens. A quoi bon se perdre en conjectures pour savoir comment il s’est subitement trouvé parmi eux ? Cela dépasse de toute façon notre compréhension.


« Quand ils le virent, […] quelques-uns eurent des doutes » (v. 17). L’être humain est un drôle d’oiseau. Il est toujours plus rapide à douter qu’à croire.
Heureusement que le Ressuscité ne se détourne pas de ceux qui doutent, mais va à leur rencontre, aujourd’hui à travers ses moyens de grâce – la Parole et les deux sacrements –, à l’époque, « sur la montagne », pour leur adresser de vive voix sa Parole, les arracher à leur doute et le transformer en foi.
« Quelques-uns eurent des doutes, » mais « Jésus s’approcha » d’eux (v. 18), il alla à leur rencontre. C’est là l’attitude qui caractérise notre Seigneur. Et


DE LA MÊME MANIERE QUE JESUS
VIENT A NOTRE RENCONTRE
IL EST NORMAL
QUE NOUS ALLIONS
A LA RENCONTRE DES AUTRES


------ 1 ------


JESUS EST VENU
A NOTRE RENCONTRE…
ET C’EST-CE QUI A
TRANSFORME NOS VIES !


A bien y réfléchir, on a du mal à comprendre qu’il ait pris l’initiative de venir à nous. C’est tout bonnement surprenant !
Surprenant que le Tout-Puissant vienne rechercher notre compagnie à nous, êtres limités qui ratons bien des choses et nous rendons bien souvent coupables de péché. Lui, par contre, se présente ainsi : « Toute autorité » – ou : « tout pouvoir » – « m’a été donné(e) dans le ciel et sur la terre ! » (v. 18). Son pouvoir est illimité. Il peut faire ce qu’il décide, et cela partout, dans tous les domaines, dans tous les endroits. Rien ne peut se soustraire à sa toute-puissance.
Surprenant aussi que l’Eternel vienne rechercher notre compagnie à nous, êtres éphémères car mortels, qui ne faisons que passer. Lui, par contre, nous dit : « Quant à moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde ! » (v. 20)


Là où nous revenons de notre surprise et commençons à comprendre que le Tout-Puissant, l’Eternel, vienne à nous, être limités, faillibles, coupables et mortels, c’est quand nous voyons qu’il est l’Amour – avec un grand A ! – en personne. Toute son attitude l’atteste. Sa façon de se conduire avec nous, sa façon de nous traiter.


Dans sa majesté divine, ce n’était pas à lui de faire le premier pas. Il aurait été en droit d’attendre cela de nous. Mais il savait que, dans ce cas, il attendrait encore. Non, c’est lui qui fait le premier pas, c’est lui qui s’approche de nous.
Dans notre texte, « Jésus s’approcha » de ses disciples, tout particulièrement de ceux qui doutaient. Il ne veut pas les laisser sombrer dans cet état dévastateur qu’est le doute. Il veut les soulager en les rendant certains, en remplissant leur cœur d’assurance.
A nous aussi, il nous fait toujours à nouveau savoir que, pour lui, il extrêmement important que nous n’ayons pas de doutes à son sujet. C’est pour cela qu’il multiplie les façons de « s’approcher » de nous et de nous fortifier dans notre foi en lui, en son expiation, sa résurrection, son ascension et sa session à la droite du Père. C’est pour cela qu’il diversifie les chemins pour nous « approcher » : sa Parole dans nos cultes, dans nos études bibliques, dans nos réunions des jeunes, au catéchisme ou à l’école du dimanche et en bien d’autres occasions encore. Mais il « s’approche’ » aussi de nous dans les deux sacrements : le Baptême et la Sainte Cène, de façon tout à fait étroite dans cette dernière, où il nous donne son vrai corps et son vrai sang sous les espèces du pain et du vin.


Dans notre texte, il développe surtout sa façon de « s’approcher » de nous dans le Baptême et la Parole. C’est au cours de ce rendez-vous spécial sur cette montagne de Galilée qu’il a institué le sacrement du Baptême : « Allez, faites des gens de toutes les nations des disciples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et de l'Esprit saint ! » (v. 19)


Johann Gerhard, un grand théologien luthérien du début du 17ème siècle, commente :
« Chacune des Personnes de la sainte Trinité est nommée dans la formule du Baptême, et chacune intervient dans ce sacrement et y donne sa bénédiction :
Ø le Père adopte le baptisé comme son enfant ;
Ø le Fils adopte le baptisé comme son frère et disciple ;
Ø le Saint-Esprit adopte le baptisé pour son temple et sa demeure. » (Johann Gerhard)
Un autre théologien, celui-là de la fin du 19ème siècle, a écrit :
« A travers le Baptême c’est Dieu lui-même qui se donne à nous :
Ø Le Père devient notre père et nous adopte pour ses enfants ;
Ø le Fils devient notre Sauveur, car nous sommes baptisés dans la communion de son sang, et par son sang nous sommes purifiés pour lui appartenir (sa justice devient notre admirable habit) ;
Ø le Saint-Esprit devient notre Consolateur et le garant de notre héritage ; nous devenons son sanctuaire où il demeure ensemble avec le Père et le Fils.


De cette façon […] nous avons changé de cap grâce à l’intervention conjuguée des trois Personnes de la sainte Trinité dans le Baptême. » (Rohnert).


Mais une fois venu à nous dans le Baptême, Jésus ne nous plante pas là, mais continue de nous fréquenter dans sa Parole. C’est à travers sa Parole qu’il nous maintient et nous enracine dans la grâce du Baptême. Le Baptême n’est qu’un volet d’un ordre double. Il faut entendre les deux ensemble : « Baptisez ! » et : « Enseignez ! »


« Enseignez-leur à garder tout ce que je vous ai commandé ! » (v. 20) C’est en conversant avec nous dans sa Parole, en nous y instruisant, nous encourageant, nous consolant, nous apaisant et nous réjouissant, parfois en nous corrigeant et nous éclairant, qu’il resserre avec nous les liens de l’Alliance du Baptême. Il sait combien nous pouvons, à l’occasion, être vacillants, déroutés, angoissés, découragés, tentés, ou alors trop sûrs de nous, orgueilleux, imbus de notre personne. Avec amour il vient à nos côtés et nous propose son pardon et son assistance.


Aussi, « venez, prosternons-nous, courbons-nous, fléchissons le genou devant le Seigneur qui nous fait » (Ps 95.6), qui a fait de nous ce que nous sommes devenus : ses « disciples » et ses « cohéritiers » de la vie éternelle (Rm 8.17) !


Et effectivement, maintenant, après sa résurrection, nous voyons ses disciples « se prosterner » devant lui et l’adorer comme étant Dieu lui-même.


Il est vrai qu’après la pêche miraculeuse, Pierre était déjà « tombé aux genoux de Jésus », mais à l’époque, « l’effroi l’avait saisi » et il implora alors : « Seigneur, éloigne-toi de moi : je suis un homme pécheur ! » (Lc 5.8-9) Il avait reconnu l’énorme abîme qui le séparait, lui, le pécheur, du Saint qu’était Jésus. Il avait subitement pris conscience de sa culpabilité et de la damnation que cela devrait lui attirer de la part de Dieu. Bref, c’est la Loi qui avait alors jeté Pierre avec « effroi » aux pieds de Jésus.


Mais maintenant que le divin Ressuscité les a convoqués « en Galilée, sur la montagne », c’est l’Evangile, la Bonne Nouvelle de sa victoire sur la mort, qui les amène à « se prosterner » devant lui, c’est la foi et la vénération qui les jettent aux pieds de celui qui a vaincu pour eux le péché, la mort et l’enfer ; c’est le soulagement d’appartenir à un Sauveur victorieux qui les pousse à l’adorer.
Et c’est aussi cela qui nous réunit autour de notre Seigneur en cette Fête de la très Sainte Trinité : « Le Père, le Fils et le Saint-Esprit » (v. 19) ont établi un plan pour venir à notre rencontre pour arracher les coupables que nous sommes à la damnation et à la mort éternelle. Ce plan prévoyait que « le Fils » allait se substituer à nous pour expier pleinement nos péchés et pour vaincre la mort ; ce plan comprenait la mort de Golgotha et la tombe vide du matin de Pâques. Voilà la façon, d’abord tragique au possible, mais finalement lumineuse et radieuse de Jésus de venir à nous pour nous sauver.


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IL EST NORMAL
QUE NOUS ALLIONS A NOTRE TOUR
A LA RENCONTRE DES AUTRES.


« Allez, faites des gens de toutes les nations des disciples ! »
Jésus a même dit : « Allez donc […]. » Je vous ai rejoint pour vous sauver : « Allez donc ! » « Je suis [maintenant] avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. Allez donc » rejoindre « les gens de toutes les nations » pour leur transmettre à eux aussi ce que je vous ai apporté.
Ce petit mot – « donc » – parfois oublié par les traductions

[2], est plus important qu’il n’y paraît. Il indique ce qui vient d’abord et ce qui vient ensuite ; il fait bien la différence entre la cause et la conséquence. Jésus ne dit pas sans relâche : « Allez ! » « Allez ! » « Allez ! » « Faites ! » « Exécutez ! » « Accomplissez ! » « Réalisez ! ».
Non, il commence par nous rassurer : « Je suis avec vous ». « Donc » vous pouvez y aller. « Je suis avec vous » : c’est moi qui dirige les opérations, vous entrez dans ma mission, avec ma bénédiction, ma protection, mon aide. « Allez(-y) donc » tranquillement. Je suis mort et ressuscité pour les autres aussi. Je vous accompagne de mon « autorité », de mon « pouvoir », car je tiens à ce que « les gens de toutes les nations » apprennent ce qui vous est arrivé de merveilleux pour qu’ils le désirent aussi.


Et l’histoire de l’Eglise montre comment Jésus a tenu cette promesse. Lui et sa Bonne Nouvelle, l’Evangile, sont venus jusqu’à nous. Soyons-en maintenant les témoins et les hérauts !
Pour les disciples, c’était là quelque chose de nouveau. Jusque-là, dans l’Ancien Testament, les croyants accueillaient avec chaleur les étrangers qui, venus en Israël, se convertissaient à Dieu. Maintenant le peuple de Dieu doit se mettre lui-même en mouvement pour aller au-devant des autres avec son message de grâce et de vie. Maintenant, ce qui caractérise notre attitude de croyants, c’est exprimé par le verbe « aller » pour « faire des disciples »,
et… « faire des disciples des gens de toutes les nations », car ils sont tous pécheurs, ils ont tous besoin de se convertir à Jésus-Christ pour recevoir le pardon qu’il a obtenu pour eux comme pour nous.
Est-ce trop compliqué ? L’envoi en mission dépasse-t-il nos moyens ? Ne sommes-nous pas de taille ?


Livrés à nous-mêmes, nous ne serions effectivement pas à la hauteur de la tâche. Mais rappelez-vous, il a dit : « Je suis avec vous, » et il n’est pas avec nous les mains vides. Pour que nous puissions « faire des disciples », il a mis à notre disposition sa Parole et ses sacrements. Ce sont là des moyens divins ! – les seuls moyens de grâce – qu’il met à notre disposition pour pouvoir suivre son ordre de mission.
Si nous ne les employons pas – ou si nous recourrons à autre chose – nous pourrons peut-être former des associations, des cénacles, des clubs et autres regroupements, mais non pas faire des disciples, car cela seul le Saint-Esprit peut le faire, seul le Saint-Esprit peut amener à la foi ceux que nous mettons au contact de la Parole du Christ et de ses sacrements.
C’est pour cela que nous baptisons nos enfants, car – comme les textes de la liturgie du Baptême nous l’ont rappelé dimanche dernier déjà, puis tout à l’heure de nouveau – c’est le seul moyen par lequel un petit enfant peut « naître de nouveau » : en « naissant d’eau et d’Esprit », sous l’action du Saint-Esprit dans l’eau du Baptême. (Jn 3.3-6)


C’est aussi pour cela que nous enseignons nos enfants. Nous demandons d’ailleurs aux parents de s’engager à faire instruire leurs enfants dans les vérités de l’Evangile selon leur âge, car Jésus n’a pas seulement dit : « Baptisez-les ! » mais aussi : « Enseignez-leur à garder tout ce que je vous ai commandé ! »
C’est pour cela que nous nous plaçons nous-mêmes continuellement au contact de l’Evangile, au contact de l’action du Saint-Esprit, pour qu’il puisse nous affermir dans notre foi en Jésus-Christ, qu’il puisse nous faire « croître dans la grâce et la connaissance de Jésus-Christ, notre Seigneur et Sauveur. » (2 P 3.18) Nous voulons être ainsi « gardés » et préservés pour le salut éternel.
Et nous voulons partager ce bonheur avec d’autres. D’où le témoignage que nous rendons à notre Seigneur dans notre vie de tous les jours. Ou les invitations à venir nous rejoindre au rendez-vous dominical du Christ dans nos cultes. Ou l’aide apportée aux nouvelles missions en France ou à l’étranger.


C’est de cette façon – par l’administration du Baptême et l’annonce de la Parole du Christ – que des incroyants se convertissent, que des païens deviennent chrétiens, que des gens hostiles à Dieu (Rm 8.7) deviennent des « disciples » du Christ.
« Allez donc ! » Jésus nous promet son appui personnel, sa bénédiction divine : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »


N’est-ce rien, cela, cette promesse du Tout-Puissant ? Nous ne sommes pas envoyés dans un monde étranger, inconnu. Nous sommes envoyés dans le monde que Dieu le Père a déposé aux pieds de son Fils, dans le monde sur lequel règne Jésus-Christ dans l’intérêt des siens.
Et croyez-moi, ceux qui ont eu le courage de prendre les promesses de Jésus au mot, ceux qui se sont donné la peine de partager avec d’autres le trésor reçu du Christ, de parler de leur bonheur d’enfants de Dieu, ceux-là reviennent ébahis et heureux comme les 70 disciples l’ont été après avoir été envoyés pour la première fois par Jésus parler de lui dans la région !
Heureux sommes-nous quand nous voyons le Seigneur recevoir un enfant dans la grâce du Baptême. Heureux nous sommes aussi de toujours jouir de la grâce du Baptême. Et heureux sommes-nous finalement quand nous voyons Jésus bénir notre témoignage.
Qu’il nous accorde son Saint-Esprit pour que nous demeurions confiants en lui, patients et persévérants dans l’intérêt des « gens de toutes les nations », pour sa seule gloire !
Amen.


Jean Thiébaut Haessig, pasteur


[1] Mt 28.16-20 (Segond 21) :
16 « Les onze disciples allèrent en Galilée,
sur la montagne que Jésus leur avait désignée.
17 Quand ils le virent,
ils se prosternèrent [devant lui],
mais quelques-uns eurent des doutes.
18 Jésus s’approcha et leur dit :
"Tout pouvoir m’a été donné
dans le ciel et sur la terre.
19 Allez donc,
faites de toutes les nations des disciples,
baptisez-les
au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit
20 et enseignez-leur
à mettre en pratique tout ce que je vous ai prescrit.
Et moi, je suis avec vous tous les jours,
jusqu’à la fin du monde." »
[2] pas par la « Segond 21 » ou la « Bible de Jérusalem », ni par Luther en allemand (darum) ou la « New American Standard Bible »en anglais (therefore).