Texte : 1 P 1 . 17-21
Chants proposés :
Pourquoi, Jésus, tes pleurs, ton agonie ? LlS 92 : 1-4
Quelle douleur saisit mon cœur ! LlS 94 : 1-6
Ô monde, viens, contemple LlS 91 : 1-7
17 « Et si c'est comme à un Père que vous faites appel à celui qui juge chacun conformément à sa manière d'agir sans faire de favoritisme, conduisez-vous avec une crainte respectueuse pendant le temps de votre séjour sur la terre.
18 Vous le savez en effet, ce n'est pas par des choses corruptibles comme l'argent ou l'or que vous avez été rachetés de la manière de vivre dépourvue de sens que vous avaient transmise vos ancêtres,
19 mais par le sang précieux de Christ, qui s'est sacrifié comme un agneau sans défaut et sans tache.
20 Prédestiné [littéralement : connu d’avance] avant la création du monde, il a été révélé dans les derniers temps à cause de vous.
21 Par lui, vous croyez en Dieu qui l'a ressuscité et lui a donné la gloire, de sorte que votre foi et votre espérance reposent sur Dieu. »
Chers frères et sœurs en Celui
qui n’a pas rechigné à payer le prix fort pour vous !
Il ne se passe pas de semaine sans que nous recevions par la poste ou par Internet « l’affaire de l’année » : un livre, un abonnement, l’impression de cartes de visite, une voiture, des voyages, et j’en passe.
Il y a aussi, à deux pas d’ici, un usine-center qui annonce vendre à prix d’usine, en tout cas moins cher que quiconque.
Et cette semaine, on annonce aussi sur les ondes qu’il est possible de tout négocier, y compris les prix chez les médecins.
La publicité nous a habitués à rechercher les bonnes affaires dans les journaux ou sur Internet. On voudrait nous faire croire qu’on peut tout trouver à prix bradé, qu’il y a moyen d’avoir des remises partout, bref, que tout ce qui est précieux dans l’existence, tout ce qui a de la valeur, on peut l’avoir au rabais.
Il n’en est rien. Ecoutez bien ce que Pierre nous dit ici. Il n’y est pas question de réduction. Au contraire, son message est le suivant :
PAS DE RABAIS
POUR VOTRE RACHAT !
Aussi allons-nous réfléchir aujourd’hui à ces deux points :
1. Le montant de notre rachat a été tout sauf avantageux.
2. Ne faisons pas peu de cas de notre rachat.
X X X 1 X X X
Le montant de notre rachat
a ete tout sauf avantageux !
Le montant pour nous racheter de la perdition méritée par nos péchés est si vertigineusement élevé qu’aucun humain n’était et n’est capable de le payer. Déjà dans les Psaumes, les Fils de Koré confessaient : « Ils ne peuvent se racheter l'un l'autre ni donner à Dieu le prix de leur rançon. Le rachat de leur âme est cher et n'aura jamais lieu. » (Ps 49.8-9)
Il n’est pas possible de marchander avec Dieu pour faire baisser ses prix. Il est saint et juste, et ses tarifs le sont pareillement. Ils correspondent exactement aux exigences saintes et justes de sa divine Loi.
Et voici le prix qu’il affiche : « Vous serez saints, car je suis saint, moi, l'Eternel, votre Dieu ! » (Lv 19.2) C’est là l’exigence incontournable pour pouvoir s’épanouir en présence de Dieu.
A cela s’ajoute que nous devrions payer pour nos péchés – les expier –, et là le tarif n’est pas plus réjouissant : « Le salaire du péché, c’est la mort ! » (Rm 6.23), la mort en enfer, pour être précis.
Mais, comme déjà indiqué tout à l’heure, ces tarifs ne sont pas à notre portée. Nous ne sortirions plus jamais de la mort en enfer, parce qu’il nous faudrait expier nos péchés pour l’éternité.
Quant à observer les exigence de la sainte Loi de Dieu à la perfection – en pensées, paroles et comportement – ne nous leurrons pas : c’est impossible ; admettons-le honnêtement.
C’est pourtant dans cette illusion que le peuple d’Israël en était arrivé à se bercer, avant tout les pharisiens. Ne pensaient-ils pas respecter à la perfection la Loi de Dieu, en sorte que Dieu devait être satisfait d’eux ? Ils pensaient que les efforts qu’ils faisaient pour vivre étaient un montant suffisant pour que Dieu s’en contente. Là, ils avaient hautement surestimé leur propre valeur, et tout autant sous-estimé les exigences de Dieu. Ce n’est pas ainsi qu’on y arrive.
C’est ce que Pierre veut faire comprendre à ses destinataires, des chrétiens d’origine juive vivant en Asie Mineure. Pierre appelle « la manière de vivre de leurs ancêtres » « une manière de vivre dépourvue de sens » si on pense qu’avec elle on arrive à contenter Dieu. (v. 18)
C’est sûr, ils s’efforçaient de vivre de façon exemplaire, mais ils restaient pécheurs et leur « manière de vivre » était loin d’atteindre le niveau de la sainte perfection. Pour que Dieu nous donne en échange son « quitus », il faudrait qu’il baisse énormément ses tarifs. Mais alors cela ne suffirait pas pour notre salut.
Devant cette dramatique impasse, Dieu a eu pitié de nous. Il ne pouvait pas baisser le prix – cela n’aurait pas suffit pour notre rachat. Il a donc décidé, « avant la création du monde » (v. 20), non pas de nous avancer le prix du rachat (nous ne pourrions jamais le lui rembourser), mais d’en payer lui-même le prix une fois pour toute.
Bien sûr – pourrions-nous être tentés de dire – c’était un jeu d’enfant pour lui, le Maître tout-puissant de toute chose ! Ne peut-il pas à volonté puiser dans les trésors de l’univers et nous racheter par ex. avec les métaux précieux qui s’y trouvent ?
Eh bien non ! Ce serait encore un rachat au rabais. Comment « des choses corruptibles comme l'argent ou l'or » (v. 18) seraient-elles en mesure de nous tirer de l’existence mortelle pour nous mettre en sécurité dans la vie incorruptible, éternelle ? Non ! Pour notre rachat il faut déjà quelque chose de plus précieux, car notre rachat ne peut s’obtenir au rabais.
Dieu a dû sortir ce qu’il avait de plus précieux. Il n’y avait que ce à quoi – en fait, à qui – il tenait le plus qui était capable de nous racheter : « le Fils unique », « éternel » et « bien-aimé, qui a toute l’approbation » du Père. (Jn 3.16 ; 2 Tm 1.9 ; Mt 17.5)
Si notre rachat avait pu se faire à un prix moins élevé, Dieu – à qui « rien n’est impossible » (Lc 1.37) – n’aurait pas permis que son Fils soit sacrifié. Cela montre combien il tenait à nous sauver : il n’a pas tergiversé ; il n’a pas essayé de chipoter sur le montant à payer.
« Vous le savez en effet, ce n'est pas par des choses corruptibles comme l'argent ou l'or que vous avez été rachetés […], mais par le sang précieux de Christ, qui s'est sacrifié comme un agneau sans défaut et sans tache. » (v. 18-19)
Le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous. Il est le seul être humain à ne pas avoir été « entaché », corrompu, par le péché, à être resté « sans défaut », pur, sans péché. Il n’a pas non plus eu de réaction pécheresse quand il a dû payer et expier une culpabilité qui n’était pas la sienne, mais la tienne, la mienne, celle « du monde entier » (1 Jn 2.2).
La croix de Golgotha nous annonce : « Vous avez été rachetés à un grand prix ! » (1 Co 6.20) Le Fils éternel, le Saint, « s’est offert lui-même en rançon » pour nos péchés (1 Tm 2.6)
Que cela ait été nécessaire montre combien notre culpabilité était grande aux yeux de Dieu. Mais cela nous montre aussi combien Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit tient à nous et nous aime.
Et cela nous apporte la certitude que nous sommes réellement, vraiment, « rachetés », débarrassés de la damnation éternelle.
Dieu n’a pas marchandé. Il a mis le prix fort sur la table. Cela explique le genre de rapports que nous entretenons avec notre Dieu libérateur.
Beaucoup de gens ne disent à Dieu qu’un rapide « Bonjour ! », dimanche matin au culte – et même cela, uniquement s’ils n’ont rien de plus important à faire. En passant, ils lui donnent même un petit pourboire s’ils ne trouvent pas que cet argent serait mieux dépensé ailleurs. Ou ils ne s’adressent à Dieu que lorsqu’ils ne savent vraiment plus comment s’en sortir autrement.
Mais celui qui a vraiment compris quel prix énorme, quelle rançon colossale a été versée pour son salut – et versée par Dieu lui-même ! – celui-là exprimera aussi sa joie à ce Dieu – le seul payeur possible – qui n’a pas rechigné à passer à la caisse lui-même et à nous sauver au prix de son Fils.
Celui qui sait cela, qui croit cela, et qui en est soulagé et revit, celui-là essayera aussi de glorifier son Dieu libérateur en mettant à sa disposition les biens et talents en sa possession.
X X X 2 X X X
NE faisons PAS PEU DE CAS
DE NOTRE RACHAT
que nous lui devons, à lui et à son Fils.
A l’époque où Pierre a rédigé cette épître, la tentation était grande pour les chrétiens de faire des compromis avec les païens. Cela aurait pu calmer la haine du monde romain, une haine réelle comme le montrera bientôt la persécution sous Néron. Oui, la tentation était grande : Le salut valait-il vraiment qu’on meure pour sa foi ?
Chers frères et sœurs en Christ, le Crucifié, notre rachat, notre salut, c’est vraiment ce que nous avons de plus précieux, et ceci, sans que nous l’ayons mérité : Dieu nous l’a donné par pure grâce.
Aussi – vous exhorte l’apôtre Pierre – « conduisez-vous avec une crainte respectueuse pendant le temps de votre séjour sur la terre. » (v. 17) Non pas dans la « crainte » de ce monde et de ses opinions impies, de ses modes souvent immorales, mais « avec une crainte respectueuse » de Dieu.
Lui seul vous a rachetés par son Fils. Ceux qui font fi de sa rédemption – autre mot pour rachat – ceux qui ne « craignent » pas « Dieu par-dessus tout » (Martin Luther, Petit Catéchisme), ceux qui prennent plus d’égards pour le monde que pour Dieu, ceux-là vont à leur perte.
« Conduisons-nous avec une crainte respectueuse » devant notre Dieu Sauveur. Rappelons-nous qu’il a tellement tenu à nous sauver qu’il a demandé à son Fils d’expier nos péchés.
Et rappelons-nous aussi qu’il « juge chacun conformément à sa manière d'agir sans faire de favoritisme » (v. 17). N’ayez crainte, il ne nous jugera pas selon nos mérites et la valeur de nos œuvres – nous venons d’entendre Pierre nous dire que de cette façon nous ne pouvons pas contenter Dieu – non, il nous jugera d’après notre « manière d’agir », d’après ce que notre comportement exprimera.
Notre vie était-elle l’expression d’une vie de repentance et de foi, une vie où nous avons voulu montrer notre gratitude à notre Dieu qui s’est sacrifié sur la croix, ou notre vie, notre « manière d’agir » montrait-elle que nous faisions bien peu de cas du Christ et de l’énorme rançon qu’il a payée pour nous ?
Notre vie, l’avons-nous vécue en nous reposant avec confiance sur la mort expiatoire du Christ, ou était-ce une vie où notre Sauveur pouvait être content – mais l’était-il vraiment dans ce cas ? – si, de temps en temps, et après bien d’autres choses, on a aussi pensé à lui ?
C’est à notre « manière d’agir » que le divin Juge notera si nous avons vécu dans la foi en lui ou non.
Ne vivons-nous pas un vrai miracle ? Dieu « savait d’avance », « avant » même « la création du monde » (v. 20), que Jésus allait nous « racheter à un grand prix » (1 Co 6.20). De toute éternité, il avait prévu comment nous sortir du mauvais pas dans lequel nous nous engagerions par notre péché.
Ce Jésus « nous a été révélé » (v. 20) à travers les prophètes, les apôtres et les évangélistes. Il « nous a été révélé » comme celui en qui nous pouvons faire confiance, comme celui qui a « tout accompli », on devrait en fait traduire : « réglé la note » (Jn 19.30), car le verbe Τετέλεσται·(tetelestai) est aussi un terme de comptabilité !
Comment ne pas être saisi d’émotion devant tant de grandeur, d’abnégation, d’altruisme et d’amour incompréhensibles ? Dans un cantique, nous chantons : « Le Maître meurt pour l’esclave coupable ! » C’est contraire à toute logique !
Comment ne pas s’efforcer d’arranger notre vie de manière à faire honneur à Celui à qui nous devons tout, lui qui a « tout accompli » à notre place, lui qui a « réglé la note » à notre place, et une note sacrément salée, puisqu’il a enduré les souffrances de l’enfer à notre place !
Dans sa prison – hier, cela faisait 64 ans qu’il a été pendu, parce qu’il avait été impliqué dans un attentat contre Hitler – le pasteur Dietrich Bonhoeffer a forgé l’expression « die billige Gnade » (la grâce à bon compte, la grâce soldée, la grâce bon marché). Tout dépend pour qui. Pour nous, oui ! Dieu nous offre le salut pour rien, par pure grâce. Pour lui, non ! Cela lui a coûté son Fils bien-aimé. Et pour son Fils encore moins : il a passé par la croix et l’enfer pour nous racheter.
Cela nous montre combien Dieu tient à nous, et cela nous remplit d’émotion et d’une grande joie.
Pour le montant vertigineux qu’il a payé pour nous racheter, nous voulons « nous conduire avec une crainte respectueuse pendant le temps de notre séjour sur la terre ».
Dieu a montré à Golgotha qu’il a été prêt à débourser pour notre rachat un prix qui, même pour lui, était difficile à payer. Aussi montrons par « notre manière d’agir », par notre vie, notre comportement, quel grand cas nous faisons de son rachat, combien nous l’apprécions hautement, et montrons-le lui en le servant et en lui faisant honneur !
Amen.
Jean Thiébaut Haessig