lundi 9 août 2010

Sermon du dimanche 1er aout 2010- 9ème dimanche après la trinité

Texte : Ph 3.4-14

Chants proposés :

Jour du Seigneur, J’ouvre mon coeur LlS 4 : 1- 4

Créateur tout-puissant, éclaire mon chemin LlS 230 : 1- 4

Seigneur, dirige tous mes pas LlS 305 : 1-3

Rendons, du fond de notre cœur, LlS 169 : 1-3

4 « Pourtant, moi-même je pourrais mettre ma confiance dans la chair. Si quelqu'un croit pouvoir se confier dans la chair, je le peux plus encore :

5 j'ai été circoncis le huitième jour, je suis issu du peuple d'Israël, de la tribu de Benjamin, hébreu né d'Hébreux ; en ce qui concerne la loi, j'étais pharisien ;

6 du point de vue du zèle, j'étais persécuteur de l'Eglise ; par rapport à la justice de la loi, j'étais irréprochable.

7 Mais ces qualités qui étaient pour moi des gains, je les ai regardées comme une perte à cause de Christ.

8 Et je considère même tout comme une perte à cause du bien suprême qu'est la connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur. A cause de lui je me suis laissé dépouiller de tout, et je considère tout cela comme des ordures afin de gagner Christ

9 et d'être trouvé en lui non avec ma justice, celle qui vient de la loi, mais avec celle qui s'obtient par la foi en Christ, la justice qui vient de Dieu et qui est fondée sur la foi.

10 Ainsi je connaîtrai Christ, la puissance de sa résurrection et la communion à ses souffrances, en devenant conforme à lui dans sa mort

11 pour parvenir, d'une manière ou d'une autre, à la résurrection des morts.

12 Ce n'est pas que j'aie déjà remporté le prix ou que j'aie déjà atteint la perfection, mais je cours pour tâcher de le saisir, puisque moi aussi j'ai été saisi par [Jésus]-Christ. »

(Segond 21, 2007)

Chers frères et soeurs,

qui avez, vous aussi,

« été saisis par Jésus-Christ » !

Ce texte ne tombe-t-il pas à pic, ce dimanche-ci ? Je cite pêle-mêle ce qui nous arrive dans notre paroisse ces jours-ci :

Ø ici on n’arrive pas à se défaire du pouvoir manipulateur de quelqu’un ;

Ø là on se bat contre le désespoir ;

Ø ailleurs on attend les résultats d’examens médicaux complémentaires pour savoir de quelle maladie grave on souffre ;

Ø dans un quatrième cas, on assiste, dans la parenté, à la lente mais inexorable marche d’un enfant vers la mort ;

Ø et finalement dans un cinquième cas, on vient d’être secoué par la mort brutale d’un être cher.

Quand le mal terrasse, quand le malheur vous renverse brutalement, vous avez du mal à ne pas demander comme Jésus sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27.46)

Pour Jésus, nous en savons la raison : tout le Nouveau Testament nous l’explique. C’était à ce prix qu’il pouvait vaincre pour nous ; c’était à ce prix qu’il pouvait nous arracher à la culpabilité du péché, et à la mort éternelle ; c’est à ce prix qu’il pouvait se relever victorieusement et nous entraîner dans sa victoire. Il n’y a que son sacrifice qui pouvait nous obtenir « la justice qui vient de Dieu » (v. 9), la seule avec laquelle nous puissions subsister devant Dieu.

Oui, le « pourquoi » des souffrances et de la mort de notre Seigneur, nous le connaissons. Mais au « pourquoi » de nos déboires, de nos épreuves, de nos malheurs, au « pourquoi » des chocs et déchirures qui peuvent ébranler nos vies, nous n’avons bien souvent pas de réponse précise.

Et nous nous posons des questions, et nous sommes assaillis par le doute, et nous ne savons plus où nous en sommes ni où tout cela doit nous mener …

Alors, oui, qu’il est bon de voir ce qui faisait la force de l’apôtre Paul, d’un apôtre malade, pourchassé, lapidé, emprisonné des années durant ! Dieu l’avait choisi pour être son grand apôtre : n’aurait-il pas eu intérêt à lui éviter tous ces déboires, tous ces malheurs, pour le bien de son apostolat ?

Paul ne se pose pas cette question. Il garde confiance car, dit-il, « j’ai été saisi par Jésus-Christ » (v. 12) !

Quel soulagement que de pouvoir dire :

« Moi aussi

j’ai été saisi par Jésus-Christ » !

1. malgré mon péché et mes déficiences !

2. malgré les épreuves qui peuvent me frapper !

X X X 1 X X X

« Moi aussi

j’ai été saisi par Jésus-Christ » !

malgré mon péché et mes déficiences !

Chers amis, nous savons tous comment Saul de Tarse « a été saisi par Jésus-Christ ». Le Seigneur l’avait préparé de longue date – et sans que celui-là le sache – pour devenir l’apôtre Paul, puis l’a soudainement « saisi » sur le chemin de Damas (Ac 9.1-25).

Le chemin sur lequel nous, nous avons « aussi été saisis par Jésus-Christ » n’était pas là-bas, quelque par en Syrie, mais peut-être le foyer de nos parents, ou les liens qui nous liaient à un ou une amie, peut-être le chemin des médias modernes, voire la lecture personnelle de la Bible. Cela a aussi pu être, pour l’un ou l’autre, le chemin de l’épreuve et du malheur.

Et là, l’Evangile de Jésus-Christ a fait son œuvre. Sa Parole de grâce a trouvé le chemin de notre cœur. « L’Evangile, puissance de Dieu pour le salut » (Rm 1.16), nous a touchés et « saisis » pour nous unir à « Christ » et à « la puissance de sa résurrection » (v. 10).

Pour beaucoup d’entre nous cela s’est fait lors de notre Baptême en tant que nourrisson. Pour d’autres cela a pu se faire au contact de la Parole d’Evangile plus tard. Ce sont là les moyens que le Saint-Esprit, envoyé par Jésus, utilise pour nous « saisir » et nous retirer des flots mortels de l’incrédulité et de la damnation éternelle pour nous mettre en sécurité auprès de Jésus-Christ.

Et c’est ce qui soulage et réjouit tant l’apôtre Paul : « Moi aussi j’ai été saisi par Jésus-Christ ! » s’écrie-t-il. « Et j’en avais bigrement besoin, » nous fait-il comprendre.

« Avant que je ne sois "saisi" par mon Sauveur, je me débattais pour mériter mon salut avec ce que j’étais et que je faisais. Je pensais pouvoir « mettre ma confiance dans ma condition ». Voilà ce que j’essayais de faire valoir devant Dieu : "J'ai été circoncis le huitième jour, je suis issu du peuple d'Israël, de la tribu de Benjamin, hébreu né d'Hébreux ; en ce qui concerne la loi, […] pharisien ; du point de vue du zèle, […] persécuteur de l'Eglise ; par rapport à la justice de la loi, […] irréprochable." » (v. 4-6)

La voilà, l’illusion sur laquelle Saul de Tarse fondait son salut : il se croyait « irréprochable » ! Jésus a dû le « saisir », le secouer même, pour lui remettre les idées en place, pour lui montrer – comme il aurait dû le savoir par l’Ancien Testament : aux yeux de la sainte Loi de Dieu, « toute notre justice est comme un habit taché de sang » (Es 64.5).

On ne peut pas se présenter ainsi devant Dieu. Nous ne pouvons pas « mettre notre confiance dans notre condition » (v. 3). Nous ne pouvons pas déduire notre salut de notre appartenance à l’Eglise luthérienne, ou de notre condition de diacre, de pasteur ou de je ne sais trop quoi, ou de ce que nous faisons au service de l’Eglise et pour elle.

Non seulement nous ne le pouvons pas, mais c’est dangereux. Comme l’écrit Paul : Si nous raisonnons ainsi, cela nous mène à notre « perte », car nous passons alors à côté du Christ, à côté de sa grâce.

Oh ! certes, Paul ne méprisait pas le fait d’être Juif, d’avoir été circoncis, de s’être efforcé d’observer la Loi de Dieu. Même, il sait que c’est ce que Dieu attendait des croyants de l’Ancienne Alliance.

Mais c’est là une grâce qui lui a été faite, de naître et de grandir dans ce contexte, ce n’est pas un mérite qu’il peut faire valoir devant Dieu.

Pareillement, bien entendu que Dieu prend plaisir au fait que nous soyons membres de l’Eglise luthérienne, que nous y ayons une attitude consacrée, y exercions peut-être même une responsabilité. Mais lequel d’entre nous peut se targuer d’être parfait en cela ? Donc ce n’est pas cela qui nous vaut d’être acceptés par Dieu.

Si nous nous fions à ce que nous faisons pour être acceptés par Dieu, nous entrons dans le mur, nous allons à notre « perte ». Seul se laisser « saisir par Jésus », s’accrocher à lui avec foi et recevoir ainsi sa « justice » à lui, « celle qui vient de Dieu » (v. 9), cela seul nous permet de vivre dans la présence de Dieu, ici-bas déjà, puis dans l’au-delà.

Aussi, quand le malheur nous frappe, ne nous posons pas la question : « Qu’ai-je fait pour mériter cela ? » Depuis que nous avons été « saisis par Jésus-Christ », Dieu n’agit plus envers nous selon ce que nous méritons ou ne méritons pas, mais selon ce que Jésus nous a mérité : et lui nous a procuré « la justice qui vient de Dieu ». Il n’a donc plus aucune raison de nous punir ; il n’en a d’ailleurs pas non plus envie. Au contraire, pour l’amour de son Fils, Jésus-Christ, il n’agit plus avec nous qu’avec amour et fidélité.

Difficile à croire ? Voyez alors la vie de Paul : plus éprouvante et plus malheureuse à vue humaine vous aurez du mal à trouver. Et pourtant, le leitmotiv de l’épître aux Philippiens dont est tirée notre texte, le voilà : « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ! Je le répète : réjouissez-vous ! » (Ph 4.4 ; mais aussi 3.1)

Alors, dis-toi, comme Paul le fait dans notre texte :

X X X 2 X X X

« Moi aussi

j’ai été saisi par Jésus-Christ » !

malgré les épreuves

qui peuvent me frapper !

N’oublions pas : Paul écrit cette épître alors qu’il indique être en « détention » à Rome et y connaître « la détresse », « les chaînes » et « les souffrances de la détention » (Ph 1.7+14+17 ; 4.14)

Et qu’est-ce qui le console ? « Moi aussi » – jubile-t-il – « j’ai été saisi par Jésus-Christ ! »

« Je suis peut-être "en détention", mais, en fait, ce ne sont pas les geôliers de Rome qui me détiennent, c’est Jésus-Christ qui m’a "saisi" ; auprès de lui, je suis en de bonnes mains quoi qu’il m’arrive ! »

Dans une autre épître, celle aux chrétiens de Rome, il écrit : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Lui qui n’a pas épargné son propre Fils mais l’a donné pour nous tous, comment ne nous accorderait-il pas aussi tout avec lui ? » « Dans » tous les malheurs qui peuvent encore nous frapper, « nous sommes plus que vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés ! » (Rm 8.31-32+37)

Pourquoi le malheur nous désarçonne-t-il parfois ? Parce que nous espérons trouver la félicité éternelle dès ici-bas. Parce que nous oublions qu’en entrant dans le monde, le péché y a répandu la mortalité, le caractère éphémère et passager de toute chose. (Rm 5.12)

N’oublions pas : nous ne sommes qu’« étrangers et voyageurs sur la terre » (Hé 11.13). Ne réagissons-nous pas souvent comme si nous étions sur terre pour toujours ? Non, Pierre écrit que nous sommes « résidents temporaires sur la terre » (1 P 2.11). Nous ne faisons que passer.

Réjouis-toi donc d’avoir été « saisi par Jésus-Christ » au passage, d’avoir « reçu l’appel céleste de Dieu en Jésus-Christ » (v. 14) pour « connaître la puissance de sa résurrection ». Oui, il nous a destinés à « parvenir, d’une manière ou d’une autre, à la résurrection des morts » (v. 11) pour y recevoir « le prix », le salut éternel (v. 14), un « prix » tout à fait gratuit, un « prix » décroché pour nous par Jésus !

C’est bien à lui que nous le devons, et rien qu’à lui ! Et ça c’est une bonne nouvelle, car cela rend notre salut certain. Il ne dépend pas de notre « condition », mais de « la justice » parfaite de Jésus.

Il est vrai, comme Paul le prêchait déjà lors de son premier voyage missionnaire, « c’est à travers beaucoup de difficultés qu’il nous faut entrer dans le Royaume de Dieu » (Ac 14.22)

Le péché a tout disloqué dans ce monde et y a introduit la souffrance et le malheur, que ce soit au niveau de la santé, des relations entre les personnes ou les Etats, ou au niveau des conditions matérielles. Et cela peut faire mal, très mal.

Notre voyage à travers cette vie connaît des heurts, des montées d’adrénaline, des écroulements, des déceptions, des déchirures, des deuils, « mais dans toutes ces choses nous sommes plus que vainqueurs », parce que « nous avons été saisis par Jésus-Christ » (Rm 8.37), le vainqueur de la mort, et qu’il s’est lié à nous par son sang versé sur la croix.

Moïse priait déjà : « Seigneur, enseigne-nous à bien compter nos jours, afin que notre cœur parvienne à la sagesse » (Ps 90.12). Luther l’a paraphrasé ainsi : « Seigneur, apprends-nous à considérer que nous devons mourir un jour, pour que nous devenions sages ! »

Cette « sagesse » ne s’apprend réellement que si elle est alimentée et consolidée par « la connaissance de Jésus-Christ, mon Seigneur » (v. 8).

Cette « sagesse », il nous faut régulièrement la consolider et la développer au contact de la Parole et des sacrements, pour que le Saint-Esprit nous « porte vers ce qui est devant, vers le but pour remporter le prix de l’appel céleste de Dieu en Jésus-Christ ».

Réjouissez-vous donc de ce que vous ayez été « saisis par Jésus-Christ » ! Puisez dans cette certitude la force de tenir dans l’épreuve et dans la « course » (v. 12) au prix gratuit de l’éternité !

Amen.

Jean Thiébaut Haessig

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