dimanche 30 décembre 2007

Sermon du 16/12/2007 - 3ème dimanche de l'avent

1 Co 4.1-5


4:1 Ainsi, qu'on nous considère comme
des serviteurs du Christ
et des intendants des mystères de Dieu.
4:2 Du reste, ce qu'on demande d'un intendant,
c'est qu'il soit digne de confiance.
4:3 Quant à moi, il m'importe fort peu
d'être jugé par vous
ou par une juridiction humaine.
Je ne me juge pas non plus moi-même ;
4:4 car je n'ai rien sur la conscience,
mais je n'en suis pas justifié pour autant :
celui qui me juge, c'est le Seigneur.
4:5 Ne portez donc aucun jugement
avant le temps fixé,
avant la venue du Seigneur
qui mettra en lumière
les secrets des ténèbres
et qui rendra manifestes
les décisions des coeurs.
Alors chacun recevra de Dieu sa louange
.


Chers frères et sœurs qui vous dirigez avec moi à la rencontre de notre Seigneur lors de son Dernier Avent !


L’apôtre Paul emploie ici, comme souvent, l’opposition entre « la lumière » et « les ténèbres » (v. 5) pour parler du Jour du Jugement Dernier.

Il y a quelque 2000 ans, « la lumière » du premier Avent du Christ, de sa première venue, à Bethléem, a déjà éclairé « les ténèbres » de ce monde.

Avec son deuxième Avent, sa venue continuelle à travers sa Parole et ses sacrements, il irradie aussi nos existences que le péché et les épreuves menacent d’assombrir.
Mais il ne chassera définitivement et complètement « les ténèbres » de nos vies que lors de son Dernier Avent, quand, par pure grâce, il nous aura fait « accéder à la part d'héritage des saints dans la lumière » (Col 1.12).

Mais nous n’en sommes pas encore là. Nous l’attendons encore, et, heureusement, pas dans « l’obscurité » complète (Es 60.2) « car le Dieu qui a dit : "Du sein des ténèbres brillera la lumière" a brillé dans notre coeur » (2 Co 4.6). Nous attendons encore le grand Avent du Christ – sa venue triomphale – où tout sera « mis en lumière » (2 Co 4.6), au vu de tous. Notre vie de chrétiens est une vie « dans l'attente de la bienheureuse espérance et de la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus-Christ » (Tt 2.13).

En fait, nous devons considérer toute notre vie dans la perspective du retour glorieux de notre Seigneur. Cela vaut aussi pour le thème que Paul aborde ici : nous devons aussi considérer les rapports entre pasteur et paroisse dans la perspective du Dernier Avent de notre Seigneur.
En effet, aucun d’entre nous – ni vous, les paroissiens, ni moi, votre pasteur – ne nous dirigeons seuls, chacun de son côté, au-devant du Retour du Christ. Dieu attend de nous que nous fassions ce voyage ensemble. C’est pour cela qu’il m’a donné la paroisse et qu’à vous il a donné le pasteur, pour qu’ensemble nous nous préparions à la venue de notre Roi de l’Avent.

Voyons donc, à l’aide de notre texte,

A QUOI
LE FUTUR ET DERNIER AVENT DU CHRIST
NOUS POUSSE-T-IL,
1. MOI, COMME PASTEUR,
2. VOUS, COMME PAROISSIENS ?

1

QUE PROVOQUE LA PERSPECTIVE
DU DERNIER AVENT DU CHRIST
DANS MA CONDUITE
DU MINISTERE PASTORAL ?

Demandons d’abord Paul ce qu’est un pasteur. Il répond dans notre texte : « Qu’on nous considère comme des serviteurs du Christ et des dispensateurs des mystères de Dieu » (v. 1).
« Serviteurs et dispensateurs », ou : « serviteurs et administrateurs ». « Serviteurs » et non pas maîtres, pas plus que la paroisse ne serait le maître : Jésus seul est le « Maître » de son Eglise dans son ensemble (Jn 13.13 ; Jd 1.4 ; Ep 1.22).

Dans notre texte, Paul souligne le lien étroit entre le ministère pastoral et le Christ, la dépendance étroite de la fonction de pasteur de l’autorité du Christ. « Qu’on nous considère comme des serviteurs du Christ », dit-il.

Nous pasteurs, nous sommes employés au service du Christ. Nous sommes soumis à son autorité et dépendants de sa volonté. Un « serviteur » ne fait pas ce qu’il veut, mais ce que son maître lui dit de faire. Il reçoit des ordres et les exécute, qu’ils lui soient agréables ou non.
Ce qui m’est, par exemple, désagréable, c’est de devoir parler de ma fonction en chaire. Cela pourrait donner l’impression que je veux me mettre en avant. Mais je ne dis pas ici ce que je veux, mais ce que mon Employeur divin me demande d’annoncer avec ce texte de son apôtre.
Et que dit-il encore de ses pasteurs ? – Qu’ils sont les « dispensateurs – ou : administrateurs – des mystères de Dieu ». Dans la 1ère Epître aux Corinthiens, Paul indique : « Nous énonçons la sagesse de Dieu, mystérieuse et cachée, celle que Dieu a destinée d'avance, depuis toujours, à notre gloire » (1 Co 2.7). Vous avez compris, il parle de l’Evangile.

« Les mystères de Dieu » que nous, pasteurs, devons dispenser, administrer, ce sont les dons divins que Dieu nous demande de vous distribuer avec ses moyens de grâce que sont sa Parole et ses sacrements. Cela, nous le faisons en public (par ex. au culte, à l’étude biblique, au catéchisme) ; mais nous le faisons aussi en privé (par ex. dans la cure d’âme).

Ce que nous, « serviteurs de Dieu », administrons parmi vous, ce n’est pas « mystérieux et caché » en ce sens que ça ne nous serait accessible qu’à nous, pasteurs, mais parce qu’aucun être humain n’aurait pu l’imaginer. « Ce n’est pas une sagesse de ce monde. […] Cela n'est pas venu au coeur de l'homme ». C’est « Dieu qui l’a préparé » et « révélé » par ses auteurs inspirés, les prophètes et les apôtres (1 Co 2.6+9-10).

Si on n’entre pas en contact avec la Parole de Dieu les vérités de l’Evangile restent du domaine de l’inconnu, du mystère. C’est la raison pour laquelle aucune autre religion – toutes sorties de l’imagination de leurs fondateurs – ne contient de bribes d’Evangile.
Et quand les incroyants rencontrent l’Evangile, il leur paraît « insensé », voire « scandaleux » (1 Co 1.23), du moins jusqu’à leur conversion.

Cette nouvelle « insensée » pour les incroyants, ce « mystère » « révélé par Dieu » dans l’Evangile, cela Dieu nous demande de vous le « dispenser », de « l’administrer » parmi vous.
« Du reste, ce qu'on demande d'un intendant, c'est qu'il soit digne de confiance, », fidèle (v. 2) Au service du Christ il n’y a ni droit de grève, ni droit de contestation envers sa Parole..

Un pasteur ne peut pas dire : « Jésus veut que j’aille trouver les égarés, que j’éveille leur conscience et essaye de les ramener à la repentance et à la foi. Mais ça pourrait m’attirer des inimitiés, ou déranger la paix superficielle qui règne dans la paroisse. Aussi je ne vais pas exécuter cet ordre de mon divin Maître. Je vais me taire – ou au moins passer des compromis. »
Ce serait faire passer l’approbation des gens – du moins d’une certaine catégorie de gens – avant celle du Maître. Ce serait de l’infidélité, même dans les cas où cela semble partir d’une bonne intention. Je dis : « semble », car comment notre raison pourrait-elle être bonne quand elle s’oppose à celle de notre Maître qui est la bonté en personne ?

Par son infidélité au Maître, un pasteur se rend aussi infidèle envers ses paroissiens, car avec son mutisme ou ses compromis il abandonne ses paroissiens dans une fausse sécurité, dans l’idée que tout est normal, qu’il n’y a pas lieu de se repentir et de changer de comportement, et on les prive ainsi du pardon du Christ et les perd dans l’incrédulité.

Dans le ministère pastoral il s’agit de fidélité salutaire ou d’infidélité mortelle. C’est pour cela que Dieu insiste autant sur la nécessité, pour ses « serviteurs », d’être « fidèles ». Car au jour du Jugement Dernier, chaque pasteur devra rendre compte de l’exercice de son ministère. Avec Paul il dit : « Celui qui me juge, c’est le Seigneur » (v. 4).

Certes, cela, chaque croyant le confesse personnellement aussi : « Celui qui me juge, c’est le Seigneur. » Il y a néanmoins, pour les ministres de la parole, toute une série de passages qui disent cela de façon particulière des pasteurs.

Tout ce que je vous prêche, je me le prêche aussi à moi-même, même si vous ne m’entendez pas dire, à tout bout de champ durant le sermon, comme on raconte qu’un prédicateur avait coutume de le faire : « Jean, cela vaut aussi pour toi ! ». Cette anecdote vous fait peut-être sourire, mais elle correspond à une vérité profonde.

Et quand un pasteur parle du Dernier Avent du Christ, il sait que ce sera le moment où il sera confronté à son divin Maître, que celui-ci mettra en « lumière » la façon dont il aura exercé le ministère pastoral.
Cette pensée n’empêche pas un serviteur fidèle du Christ de se rendre coupable dans l’exercice de son ministère – nous, pasteurs, sommes pécheurs comme vous – mais elle le pousse à l’exercer dans une repentance de tous les jours, pour la gloire de son Maître et le salut de ceux qui lui sont confiés.

Mais alors Paul n’a-t-il pas du toupet d’écrire aux Corinthiens : « Quant à moi, il m'importe fort peu d'être jugé par vous ou par une juridiction humaine. Je ne me juge pas non plus moi-même ; car je n'ai rien sur la conscience, mais je n'en suis pas justifié pour autant » (v. 3-4) ? Il ne prétend quand même pas être parfait, sans péché !

Non, Paul peut avoir des paroles extrêmement poignantes quand il déplore les tendances pécheresses contre lesquelles il doit lutter. Mais il sait aussi que nous, pasteurs repentants et croyants, nous bénéficions de la même grâce que vous, paroissiens repentants et croyants. Et si les Corinthiens, avec leurs défauts, certains graves, sont pardonnés et appelés « saints » (1 Co 1.2), car recouverts de la sainteté du Christ, ce même jugement ou verdict d’acquittement est aussi prononcé sur lui, Paul, et les pasteurs.

Alors, certes, quand notre Maître reviendra pour son Dernier Avent, nous aurons à rendre des comptes de l’exercice de notre ministère, mais nous n’aurons, pas plus que vous, à craindre les foudres du divin Maître, car le pardon et la grâce sont accordés aux pasteurs de la même façon qu’à vous : à cause de l’expiation de nos péchés par le Christ.

Heureusement, sinon l’idée du Dernier Avent de notre Maître nous paralyserait de peur dans l’exercice de notre ministère ; nous ne ferions plus rien, de peur de mal faire. Et le fait de nous savoir ainsi graciés et bénis nous pousse à toujours mieux le servir. Ce n’est pas la peur, mais l’amour pour le Seigneur et son Eglise qui nous pousse à cela.

Bien entendu, vous êtes là pour me dire ce qu’il faudrait que j’essaye de faire autrement – peut-être aussi pour m’encourager quand je suis sur la bonne voie… – mais, à moins de ne plus exercer mon ministère dans la repentance et la foi, et d’avoir ainsi perdu votre « confiance » (v. 2), je peux dire : « Je n’ai rien sur la conscience » parce que Dieu m’a lavé de mes péchés, comme il le fait avec vous aussi quand vous reconnaissez vos torts et en appelez à la médiation du Christ.
C’est dans cet esprit qu’un pasteur « fidèle » « dispense les mystères de Dieu » parmi les siens. Il veut les affermir dans la foi avec la Parole et les sacrement, pour les conduire vers « la lumière » à venir lors du retour en gloire de notre Roi de l’Avent.

2

QUE PROVOQUE LA PERSPECTIVE
DU DERNIER AVENT DU CHRIST
DANS LE COMPORTEMENT DE LA PAROISSE
VIS-A-VIS DU PASTEUR ?

Le grand Jour du Seigneur, lors de son Dernier Avent, « la lumière » de sa gloire va chasser les ténèbres de la vie des siens – totalement et une fois pour toutes ! – Mais ce ne sera le cas que pour les siens, que pour ceux qui auront mené une vie de repentance et de foi en son expiation de nos péchés.

Ce jour-là, « il mettra en lumière les secrets des ténèbres et rendra manifestes les décisions des coeurs. » (v. 5) Lors de son retour en gloire, notre Roi de l’Avent vous demandera des comptes, à vous, paroissiens, sur la façon dont vous vous serez comporté envers votre accompagnateur, le pasteur.

Si vous ne perdez pas de vue que votre Seigneur reviendra et « mettra en lumière » tous les mobiles de vos actes, alors vous essayerez d’éviter de demander à votre pasteurs des choses impossibles.

Impossibles, car contraires à la volonté de Dieu – quand vous êtes tentés de tricher avec lui… Mais surtout impossibles parce que hors des compétences ou des talents de votre pasteur.
Dieu l’a pris à son service avec les dons qu’il a et ceux qu’il a su développer, aussi avec les faiblesses qu’il a et dont il n’a pas su tout à fait se défaire. D’autres ont reçu d’autres dons du Seigneur, et leur vieil homme les a affublés d’autres faiblesses. Aussi des paroissiens ne jugeront pas leur pasteur sans amour, ce que, malheureusement, certains Corinthiens avaient fait avec l’apôtre Paul. « Ne portez aucun jugement avant le temps, » (v. 5) écrit Paul ; « ce qu’on demande d’un intendant, c’est qu’il soit digne de confiance, » ou, pour prendre l’ancienne traduction Segond : « c’est qu’il soit fidèle » (V.2)

Bien entendu, Dieu ne veut pas dire qu’une paroisse ne doit pas reprendre son pasteur quand il est infidèle, négligeant, dans l’exercice de son ministère – elle peut même être amené à déposer son pasteur si celui-ci persiste dans son infidélité !–

Mais à Corinthe, le problème était ailleurs. Tous les « serviteurs du Christ » – Paul et ses collaborateurs à Corinthe – s’ils étaient bien entendu imparfaits comme tout le monde, étaient cependant des serviteurs « fidèles ». Ce qu’on critiquait, c’était leurs dons, leurs talents. C’est cela qui avait amené des Corinthiens à les juger sans amour.

On n’attendait pas tant d’eux qu’ils « dispensent les mystères de Dieu » comme de « fidèles serviteurs du Christ », mais qu’il prêchent et administrent les sacrement plutôt de façon à plaire aux gens. Certains Corinthiens voulaient – comme quelqu’un me l’a aussi demandé un jour – qu’ils mettent unj peu d’eau dans leur vin, qu’ils ferment les yeux quand les paroissiens veulent aller contre la volonté du Seigneur.

Ce faisant, ils oubliaient complètement qu’ils étaient en route, ensemble avec leur pasteur, pour aller à la rencontre de leur Seigneur pour son Dernier Avent. Ils oubliaient que leur Seigneur leur avait donné des pasteurs pour que ceux-ci les arment de repentance et de foi pour qu’au Dernier Avent ils puissent se tenir devant leur Seigneur, pardonnés, recouverts de la lumineuse sainteté de leur Seigneur lui-même !

Chers amis, que le message de l’Avent d’aujourd’hui nous aide tous – vous comme moi – à vivre notre temps d’attente à la « lumière » des « mystères de Dieu », à la lumière de son Evangile de grâce et de vie !

Nous aspirons tous à pouvoir subsister devant lui, lors du Jugement Dernier, vous comme moi. Et vous comme moi, vous ne le pouvez par vos propres mérites.

Pourtant, il y a moyen d’aller au-devant de « la lumière » du retour de notre Roi de l’Avent sans crainte, et c’est à lui que nous le devons. Il a lui-même payé pour que cela soit possible : il a payé de sa vie, il a expié nos péchés. Grâce à lui nos péchés sont pardonnés, aussi bien les vôtres que les miens, pour que nous puissions nous présenter à « la lumière » du Jugement Dernier sans crainte.

Aussi, sur notre chemin commun au-devant de son Dernier Avent, nous voulons nous soutenir mutuellement par la prière et les conseils, par l’exemple et l’entraide, chacun à la place et dans la fonction qui sont les siennes.

Vous comme moi, traitons le ministère pastoral comme une institution divine. Cela veut dire que moi je vais m’efforcer de vous dispenser fidèlement les dons salutaires de notre Seigneur, et vous allez les recevoir avec gratitude et joie, dans l’attente commune de son Dernier Avent.

Amen.

Jean Thiébaut Haessig, pasteur


Chants :

Toi qui es lumière, Toi qui es l’amour, AeC 318 : 1-5
O ! viens, Seigneur, ne tarde pas, AeC 310 : 1-4
Plus de nuit, le jour va naître AeC 305 : 1-4

Aucun commentaire: