dimanche 14 février 2010

Sermon du dimanche 14 février 2010

DIMANCHE QUINQUAGESIME

Texte : 1 Co 13.1-13

1 « Si je parle les langues des hommes, et même celles des anges, mais que je n’ai pas l’amour, je suis un cuivre qui résonne ou une cymbale qui retentit.

2 Si j’ai le don de prophétie, la compréhension de tous les mystères et toute la connaissance, si j’ai même toute la foi jusqu’à transporter des montagnes, mais que je n’ai pas l’amour, je ne suis rien.

3 Et si je distribue tous mes biens aux pauvres, et même je livre mon corps aux flammes, mais que je n’ai pas l’amour, cela ne me sert à rien.

4 L’amour est patient, il est plein de bonté, l’amour n’est pas envieux ; l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil,

5 il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite pas, il ne soupçonne pas le mal,

6 il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ;

7 il pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout.

8 L’amour ne meurt jamais. Les prophéties disparaîtront, les langues cesseront, la connaissance disparaîtra.

9 En effet, nous connaissons partiellement et nous prophétisons partiellement,

10 mais quand ce qui est parfait sera venu, ce qui est partiel disparaîtra.

11 Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant ; lorsque je suis devenu un homme, j’ai mis fin à ce qui était de l’enfant.

12 Aujourd’hui, nous voyons au moyen d’un miroir, de manière peu claire, mais alors nous verrons face à face ; aujourd’hui, je connais partiellement, mais alors je connaîtrai complètement, tout comme j’ai été connu.

13 Maintenant donc ces trois choses restent : la foi, l’espérance, l’amour ; mais la plus grande des trois, c’est l’amour. »

Chers frères et sœurs unis dans l’amour du Christ !

Mettons tout de suite les choses au clair : je ne prêche pas sur ce texte parce qu’aujourd’hui nous sommes la « St-Valentin », la fête des amoureux. Bien sûr, ceux qui s’aiment dans le couple ont aussi tout intérêt à méditer certains conseils de Paul dans ce texte – certains conseils valent aussi pour l’amour conjugal – mais le sujet que Paul traite ici n’est pas l’amour conjugal mais l’amour chrétien.

Et puis, je traite ce texte aujourd’hui parce qu’il est prévu pour ce dimanche.

Vous l’avouerai-je ? Cela fait 42 ans que j’ai commencé à prêcher – d’abord comme étudiant, puis comme vicaire, enfin comme pasteur – mais je n’ai prêché qu’une seule fois sur ce texte, et encore, à reculons, parce qu’un jeune couple m’a demandé de le faire à l’occasion de leur mariage.

C’était un cadeau de mariage. Si un cadeau ne coûte rien, est-ce vraiment un cadeau ? Je m’y suis donc résolu.

Vous devez vous demander ce que j’ai comme problème avec ce texte. Sur le contenu, aucun. Je le connais pratiquement par cœur. Mais je n’aime pas paraphraser. Or il est tellement grand et riche que j’ai du mal à le caser dans un sermon. Il aborde tellement de thèmes que je ne sais par où commencer.

Bien entendu, le thème général, c’est l’amour, l’amour chrétien, l’amour qui découle de la foi en Jésus-Christ, l’amour qui met tout en œuvre pour rechercher le bonheur de l’autre.

Mais il est question aussi de foi et d’espérance, de dons particuliers et de connaissance, de bienfaisance et d’éternité. Comment arranger tout cela de façon cohérente dans un sermon si on veut faire plus que simplement paraphraser le texte ou dire des banalités ?

Constatons d’abord que Paul en arrive à ce sujet – l’amour chrétien – après avoir traité, au chapitre précédent, de charismes particuliers exercés par certains dans la communauté chrétienne de Corinthe. Apparemment, ceux qui possédaient ces charismes manquaient de ce que Paul développe dans notre texte ; ils manquaient de cet amour, ce qui les disqualifiait aux yeux de Paul.

Je vous propose donc de réfléchir à l’amour chrétien autour de cinq blocs :

L’AMOUR CHRETIEN

1. et la connaissance (v. 2+9-12)

2. et la foi (v. 2)

3. et l’espérance (v. 12-13)

4. et les dons (v. 1-2)

5. et la vie chrétienne (v. 4-7+13)

1

L’amour chrétien et la connaissance

Vous savez que notre Eglise tient à ce que ses membres aient une bonne connaissance des vérités évangéliques. Les enfants le savent qui vont à l’instruction catéchétique ; et ceux d’entre vous qui sont devenus membres de notre paroisse à l’âge adulte le savent aussi pour avoir suivi toute une série d’entretiens catéchétiques.

La raison en est simple : que ce soit Paul, que ce soit Pierre, les apôtres exhortent tous à « croître » ou à « progresser dans la connaissance de Dieu » (Col 1.10), à « grandir dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ » (2 P 3.18)

Les raisons en sont évidentes : c’est pour être mieux armé dans la tourmente, dans l’épreuve et la tentation, aussi dans le dialogue avec les autres et la présentation des vérités salutaires. Certains d’entre vous ont même suivi une formation de diacre pour cela.

Mais l’expérience nous le montre : on peut faire un bon et un mauvais usage des meilleures choses. Le fer peut servir à construire des machines outil mais aussi des armes ; les explosifs permettent d’exploiter les carrières, mais aussi de faire la guerre et de commettre des attentats ; les médias modernes sont une invention phénoménale pour se procurer des informations et progresser dans la connaissance, mais ils véhiculent aussi l’immoralité dans tous les domaines.

Il en va, malheureusement, de même avec la connaissance : elle peut être bien utilisée ou mal. A Corinthe, Paul a décelé chez certains de la hauteur, un mépris pour ceux qui en savaient moins, de l’orgueil, bref un manque d’amour. Aussi met-il en garde : « Si j’ai […] la compréhension de tous les mystères et toute la connaissance, […] mais que je n’ai pas l’amour, je ne suis rien. » (v. 2)

Si, avec « la connaissance » que Dieu m’a accordée, je ne recherche pas l’intérêt et le bien de l’autre – car c’est cela « l’amour » – ma connaissance demeure stérile, ne sert à rien, « je ne suis rien ».

Déjà, le fait de m’insérer avec amour dans la communion des frères et sœurs dans la foi, m’amènera à être humble. J’en sais plus que « lorsque j’étais enfant » (v. 11) ? J’ai grandi dans la connaissance depuis ma confirmation ? Mais n’est-ce pas normal ? Il n’y a pas à s’en enorgueillir. Au contraire, même avec ma plus grande connaissance d’adulte, je dois reconnaître que je ne « connais » que « partiellement » (v. 9). Paul dit : « Aujourd’hui, nous voyons au moyen d’un miroir, de manière peu claire, mais alors nous verrons face à face ; aujourd’hui, je connais partiellement, mais alors je connaîtrai complètement, tout comme j’ai été connu. » (v. 12)

Ce n’est que dans l’autre monde que nous verrons Dieu « face à face » et les réalités célestes telles qu’elles sont.

Alors, ne nous gonflons pas d’orgueil à cause du peu que nous saisissons maintenant. Sachons cependant que ce que Dieu nous donne de connaître est amplement suffisant pour permettre au Saint-Esprit de nous amener et de nous maintenir dans la foi en Jésus-Christ et en son salut.

Cette « connaissance » de l’Evangile sauveur, sachons l’utiliser avec amour pour le bien des autres, pour la santé du Corps de Christ et pas seulement pour nous personnellement. Sinon « je ne suis rien », dit Paul.

2

L’amour chrétien et la foi

Au premier abord, il est surprenant de lire sous la plume de Paul : « Si j’ai même toute la foi jusqu’à transporter des montagnes, mais que je n’ai pas l’amour, je ne suis rien. » (v. 2) N’est-ce pas lui, l’apôtre Paul, qui insiste plus que tout autre dans ses épîtres que « l’homme est déclaré juste, » pardonné et sauvé par Dieu « par la foi », en faisant confiance à l’expiation de Jésus, et ceci « indépendamment des œuvres de la loi, » que nous pourrions accomplir (Rm 3.28), de la Loi dont, comme il l’écrit lui-même, « l’amour est » pourtant « l’accomplissement » ? (Rm 13.10) Il y insiste particulièrement dans ses épîtres aux Romains, aux Galates et aux Ephésiens.

Et maintenant, « je ne suis rien si j’ai la foi sans l’amour » ? Aimer Dieu et mon prochain, cela me sert-il finalement à quelque chose ou non ?

Les deux, mon cher ! Tout dépend de quoi nous parlons. Si je veux savoir comment être sauvé de la damnation éternelle, l’amour ne m’est d’aucun secours. Jésus seul peut me sauver, pas mon amour, aussi grand soit-il, car mon amour ne sera jamais assez grand pour que je puisse mériter le salut. Je ne peux échapper à la damnation qu’en me confiant avec foi dans les mérites du Christ.

Jacques écrit : « la foi, si elle ne produit pas d’œuvres, est morte » (Jc 2.17+20+26) Comment le salut obtenu par pure grâce par Jésus pourrait-il nous laisser insensibles, ne pas nous faire aimer Dieu en retour et ne pas nous pousser à vouloir faire sa volonté en aimant les autres comme il nous a aimés et comme il les aime eux aussi ?

Quelqu’un qui n’aime pas les autres peut-il être habité par la foi en Jésus-Christ ? Il connaît peut-être Jésus tel qu’il est présenté dans la Bible, mais il ne s’en remet pas à lui, il n’est pas animé par la foi en Jésus-Christ, sa foi n’est que du semblant, « il n’est rien », car sa « foi est morte ».

La foi en Jésus-Christ ne se vit pas renfermé sur soi-même, mais dans l’amour du prochain, comme nous-mêmes vivons de l’amour sauveur que Jésus nous porte.

Paul rejoint entièrement Jacques. D’ailleurs, comment cela pourrait-il être autrement vu qu’ils sont tous les deux inspirés par le même Esprit Saint ?

3

L’amour chrétien et l’espérance

Un des fruits de notre foi en Jésus-Christ, c’est « l’espérance qui nous est réservée dans les cieux » (Col 1.5), « l’espérance de la vie éternelle » (Tt 1.2). De même qu’une foi sans amour est morte, la foi sans espérance est inconcevable, en tout cas ce ne peut être la foi en Jésus-Christ, ne dit-il pas lui-même : « Celui qui croit au Fils a la vie éternelle » ? (Jn 3.36)

Il n’est donc pas étonnant de trouver ces trois réalités énumérées ensemble quand Paul écrit : « Maintenant donc ces trois choses restent : la foi, l’espérance, l’amour. » (v. 11)

Il les énumère ensemble parce qu’elles sont inséparables : là où il y a une d’entre elles, il y a les deux autres. Vous ne pouvez pas croire en Jésus-Christ, mort et ressuscité pour nous, sans éprouver de l’amour pour lui et pour tous ceux qu’il a rachetés comme vous.

Et si vous placez votre existence avec foi entre ses mains de divin Ressuscité, ce n’est pas que pour cette vie, mais pour ressusciter avec lui. Ne nous a-t-il pas dit : « Je vis, et vous vivrez aussi ! » (Jn 14.19) Alors « nous verrons face à face » notre Seigneur en gloire, alors « nous connaîtrons complètement » les réalités célestes que nous ne pouvons qu’entrevoir pour l’instant (v. 12)

L’amour et l’espérance de la vie éternelle sont donc deux fruits à la fois naturels et inséparables de la foi en Jésus-Christ.

« Maintenant donc ces trois choses restent : la foi, l’espérance, l’amour. »

4

L’amour chrétien et les dons

C’est à ce niveau qu’il y avait problème au sein de la communauté chrétienne de la ville grecque de Corinthe.

Au début de l’histoire de l’Eglise chrétienne, pour appuyer son démarrage dans le monde païen, pour épauler les premiers chrétiens dans leur effort missionnaire, pour les affermir dans leur foi au milieu d’un monde qui les rejetait, Dieu avait donné à certains des siens, des charismes, des « dons » particuliers.

Il y avait le parler en langues, le don de prédire l’avenir, même celui de guérir. Le problème, c’est que cela leur est monté à la tête. Ces personnes, au lieu de rester humbles et reconnaissantes devant tant de bonté à leur égard de la part de Dieu, se sentaient supérieurs ; ils exerçaient ces dons reçus de Dieu par orgueil et non par amour, pour en retirer gloire, non pas pour rendre un service d’amour.

Aussi Paul doit-il mettre le holà : « Si je parle les langues des hommes, et même celles des anges, mais que je n’ai pas l’amour, je suis un cuivre qui résonne ou une cymbale qui retentit. Si j’ai le don de prophétie, la compréhension de tous les mystères, […] mais que je n’ai pas l’amour, je ne suis rien. » (v. 1-2)

Aujourd’hui, Dieu nous accorde ses dons différemment : « les langues des hommes », nous avons la chance de pouvoir les apprendre à l’école : Y discernons-nous un don de Dieu qu’il faut s’approprier pour pouvoir servir les autres avec amour ?

« La compréhension des mystères », nous pouvons la développer en étudiant le Nouveau Testament. N’oublions pas que les premiers chrétiens ne l’avaient pas encore à leur disposition. Cette « compréhension » que le Seigneur nous a permis d’acquérir et de développer au contact du Nouveau Testament, nous en servons-nous avec « amour » pour en faire bénéficier les autres ?

« Le don de prophétie », ce don d’exposer et de transmettre la Parole de Dieu, c’est le don de rendre témoignage de notre Dieu Sauveur. Sans doute l’avons-nous à des degrés différents. Mais pries-tu pour que Dieu t’aide à le développer pour que tu puisses, avec « amour », parler aux autres de leur Sauveur ?

Voyez-vous, si je garde tout cela pour moi, si je ne gère pas mes dons avec « amour » dans l’intérêt et pour en faire bénéficier les autres, « je suis un cuivre qui résonne ou une cymbale qui retentit », je suis creux, je n’ai pas de consistance, ma foi est morte, elle est en tout cas en fort mauvais état.

C’est l’amour qui donne sa valeur à nos dons. C’est quand nous les exerçons avec amour pour le bien des autres que nous « sonnons » juste.

5

L’amour chrétien et la vie chrétienne

Que dire de plus que ce qu’écrit Paul ? Dans tous les domaines dont nous venons de parler, quand nous vivons notre foi en Jésus-Christ, quand nous mettons nos connaissances en pratique et exerçons nos talents, notre amour doit ressembler à ce qui suit :

« L’amour est patient, il est plein de bonté,

l’amour n’est pas envieux ;

l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil,

il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt,

il ne s’irrite pas, il ne soupçonne pas le mal,

il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ;

il pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. » (v. 4-7)

Que dire de plus si le culte ne doit pas s’éterniser ? Par contre, c’est un beau texte pour une étude biblique, un texte tout à fait approprié pour y pénétrer dans un échange fraternel.

Nous serons sans doute d’accord sur un point : ce texte nous fait honte. Qui peut dire que son amour ressemble en tout point et de façon parfaite à cette description ? Sans doute est-ce là aussi une explication de cette conclusion de l’apôtre : « Maintenant donc ces trois choses restent : la foi, l’espérance, l’amour ; mais la plus grande des trois, c’est l’amour. »

L’amour est une chose si grande que nous ne l’atteindrons dans sa perfection que dans la gloire céleste. Ici-bas, nous nous efforçons de poursuivre l’idéal décrit par Paul, mais cette description de l’amour est hors d’atteinte pour nous.

Par contre, cela s’applique parfaitement à Jésus, le Fils de Dieu devenu homme. En vivant avec amour selon ce texte, il nous a montré ce que signifie : « Dieu est amour » (1 Jn 4.8) Mais il nous a aussi montré combien nous étions éloignés de cet idéal divin, combien nous avions besoin qu’il vienne faire à notre place ce que nous n’arrivons pas à faire, qu’à notre place il satisfasse les exigences de Dieu à notre égard.

Que son amour altruiste, son amour parfait, son amour sauveur réchauffe notre cœur et transfigure notre vie et notre existence pour que son nom soit glorifié et que son règne vienne !

Amen.

Jean Thiébaut Haessig

Chants proposés :

Il faut, grand Dieu, que de mon coeur LlS 232 : 1-3

Je veux t’aimer, Seigneur, je t’aime, LlS 263 : 1-5

En vain je parlerais le langage des anges LlS 270 : 1-4*

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