dimanche 14 février 2010

Sermon du dimanche 7 février 2010

DIMANCHE SEXAGESIME

Texte : Lc 5.1-11

Chants proposés :

Daigne en cette heure, ô tendre Père, LlS 1 : 1-3

Ta Parole, Seigneur, est ma force et ma vie LlS 151 : 1-5

Source de lumière et de vie LlS 331 : 5-10

1 « Un jour, Jésus se trouvait au bord du lac de Génésareth et la foule se pressait autour de lui pour entendre la parole de Dieu.

2 Il vit au bord du lac deux barques ; les pêcheurs en étaient descendus pour laver leurs filets.

3 Il monta dans l'une de ces barques, qui appartenait à Simon, et il le pria de s'éloigner un peu du rivage. Puis il s'assit, et de la barque il enseignait la foule.

4 Quand il eut fini de parler, il dit à Simon : "Avance là où l'eau est profonde et jetez vos filets pour pêcher."

5 Simon lui répondit : "Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre ; mais sur ta parole, je jetterai les filets."

6 Ils les jetèrent et prirent une grande quantité de poissons, et leurs filets se déchiraient.

7 Ils firent signe à leurs compagnons qui étaient dans l'autre barque de venir les aider. Ils vinrent et remplirent les deux barques, au point qu'elles s'enfonçaient.

8 Quand il vit cela, Simon Pierre tomba aux genoux de Jésus et dit : "Seigneur, éloigne-toi de moi, parce que je suis un homme pécheur."

9 En effet, lui et tous ceux qui étaient avec lui étaient remplis de frayeur à cause de la pêche qu'ils avaient faite.

10 Il en allait de même pour Jacques et Jean, les fils de Zébédée, les associés de Simon. Jésus dit à Simon : "N'aie pas peur, désormais tu seras pêcheur d'hommes."

11 Alors ils ramenèrent les barques à terre, laissèrent tout et le suivirent. »


Chers frères et sœurs en Jésus-Christ, qui exercez une profession,

En quoi, nous, les chrétiens, nous distinguons-nous des non croyants ? Est-ce par un comportement brillant par sa perfection ? Certainement pas, car aucun de nous n’a la fatuité et la prétention d’être parfait.

Ou parce que nous ne nous laissons pas entraîner dans les mêmes péchés grossiers que les incroyants ? Dans ce cas il faudrait ranger toutes les personnes droites et honnêtes, qu’elles croient en Jésus-Christ ou non, parmi les chrétiens. Dans ce cas des athées à la vie exemplaire – comme le grand philologue Littré, ennemi déclaré de la foi chrétienne – devraient être considérés comme chrétien, parce qu’ils mènent une vie extérieurement rigoureusement irréprochable, une vie socialement irréprochable.

Non, ce qui nous distingue, nous les croyants, des incroyants, c’est la conversion à Jésus-Christ, ce changement en profondeur de notre être, la nouvelle naissance à la vie spirituelle, à la foi en Jésus-Christ, en sa grâce et en son salut.

La distinction entre croyants et incroyants est interne, non pas externe. Aussi ne devons-nous pas tirer des conclusions trop hâtives à propos des gens.

Nous pouvons constater que quelqu’un vit dans l’impénitence s’il persévère dans un comportement contraire à la volonté de Dieu, qu’il ne demande pas le pardon du Christ, ne mène donc pas une vie de foi en son Sauveur. Il y a certaines choses qu’un chrétien ne fait pas, ou s’il y dérape, il s’en repent et repart d’un bon pied avec la force que lui donne le pardon du Christ.

Mais une vie irréprochable et exemplaire ne nous permet pas encore de conclure que dans son cœur quelqu’un place sa foi en Jésus-Christ et que sa v ie exemplaire est le fruit d’une telle foi.

La différence entre croyants et incroyants est interne, est une différence d’état d’esprit.

Ceci s’applique aussi à la différence d’attitude face au travail chez le croyant et l’incroyant. Et cette différence d’état d’esprit se manifeste aussi dans le monde du travail.

Voyons donc, aujourd’hui

COMMENT ET POURQUOI

LE CROYANT TRAVAILLE-T-IL ?

Pierre et ses collègues pêcheurs – les deux fils de Zébédée Jacques et Jean – avaient passé la nuit à pêcher sur le lac de Génésareth, en vain. A l’aube, ils sont rentrés bredouille.

C’est la vie, diraient certains. Ils ne se découragent pas pour autant au premier raté, à la première désillusion. Ils ne plaquent pas leur boulot aussi astreignant que décevant, du moins ce jour-là. Ils descendent à terre et se remettent au travail : ils remettent leurs filets en état pour pouvoir resservir la nuit suivante. (v. 2)

C’est une première leçons que ce trio de futurs apôtres nous donne : Aussi dur que puisse être notre travail, aussi décourageant qu’il puisse être certains jours, cela ne doit pas nous décourager, nous déprimer. A moins d’avoir une raison valable pour changer de travail, il faut persévérer, comme nos trois pêcheurs galiléens.

Mais ce n’est pas encore cela qui distingue le croyant de l’incroyant. Bien entendu, nous devons être zélés, patients et persévérants quand les conditions de travail deviennent pénibles, mais les incroyants peuvent l’être tout autant. Ce n’est pas en cela que nous nous distinguons nécessairement des incroyants.

D’ailleurs, cœur sur la main : le sommes-nous toujours, zélés, patients et persévérants au travail ? Faisons-nous toujours honneur à notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ qui, lui, est resté zélé, patient et persévérant dans sa mission de Sauveur, tout en portant le poids de nos péchés, et ceci au milieu du rejet et du mépris de son peuple, même au milieu des tortures et de sa mise à mort injustes ?

Heureusement qu’il a aussi expié nos moments de relâchement et de paresse au travail, nos moments d’impatience et de manque de persévérance.

& & &

Un premier indice de la différence du rapport au travail pour un croyant et un incroyant, c’est Pierre qui nous le procure.

Mais est-ce vraiment un bon exemple ? Voilà Pierre qui arrête de préparer ses filets pour le lendemain, voilà qu’il se met à suivre ce prédicateur errant de Nazareth pour l’écouter prêcher, même pour lui donner un coup de main, pour lui faciliter la tâche !

A un moment donné, il abandonne son temps et sa barque à Jésus ; il l’emmène, dans sa barque, en face du rivage, face à la foule (v. 3). N’est-ce pas irresponsable comme attitude de la part de Pierre ?

C’est qu’il a reconnu en Jésus et l’a accepté avec foi comme son Seigneur et Sauveur.

Pierre place l’écoute de la Parole de Dieu avant son métier de pêcheur. Pierre connaît cette parole de l’Ecclésiaste : « Il y a un moment pour tout et un temps pour toute activité sous le ciel. » (Ec 3.1) Un temps pour travailler et un temps pour écouter et méditer la Parole de Dieu.

Le tout est de trouver le temps pour chacune de ces occupations, ainsi que l’ordre de priorité de ces occupations selon le temps.

Un croyant connaît cet ordre de priorités. Certes, il est zélé au travail, persévérant dans l’effort, mais il sait que le travail n’est pas un but en soi, n’est pas le but de la vie. Notre vocation terrestre doit céder la première place à notre vocation céleste. Cela est infiniment plus important que notre profession, que notre travail.

Dans son Sermon sur la Montagne, Jésus nous dit : « Recherchez d’abord le Royaume et la justice de Dieu ! » (Mt 6.33) Il ne dit pas : « Ne faites que rechercher le Royaume de Dieu et ne travaillez jamais. » Certainement pas ! Mais : « Recherchez d’abord le Royaume et la justice de Dieu ! » Il y a un ordre de priorité, dans votre intérêt.

Rappelez-vous aussi ce que Jésus a dit à Marthe qui reprochait à sa sœur, Marie, de ne pas l’aider dans la maison mais d’être assise à écouter Jésus : « Marthe, Marthe ! tu t’inquiètes et tu t’agites pour beaucoup de choses, mais une seule est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, elle ne lui sera pas enlevée. » (Lc 10.41-42)

Le travail est important, oh ! que oui, mais quand c’est l’heure du culte – que ce soit le culte quotidien en famille ou celui de la paroisse – ou quand c’est le temps de l’étude biblique en paroisse ou du catéchisme, on sait où est « la bonne part » et on ne la rate pas sans nécessité.

Le travail nous prend l’essentiel de notre temps en semaine – et c’est normal – mais n’oublions pas de nous réserver chaque jour un moment pour nous placer sous la lumière de Dieu en lisant et méditant sa Parole et en faisant monter vers lui nos prières.

Puis vient le moment fort de la semaine : le culte que nous rendons ensemble à notre Dieu Sauveur, assemblés autour de sa Parole et des sacrements. Tout cela, c’est ce que Jésus appelle « le nécessaire », placé bien au-dessus du travail.

Le travail n’est qu’une occupation secondaire, certes une occupation dont Dieu nous a chargé depuis le Jardin d’Eden, mais le travail n’est pas un but en soi ; il est un moyen pour gérer la création et pour avoir de quoi subvenir à nos besoins et venir en aide aux nécessiteux.

Le chrétien travaille avec un cœur dirigé vers les réalités célestes, vers son véritable Patron au ciel, un Patron à l’écoute duquel il se met quand celui-ci fait entendre sa Parole. Le chrétien travaille habité par la Parole de son Dieu Sauveur et porté par ses promesses et ses encouragements.

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En Pierre nous découvrons encore un autre trait caractéristique du chrétien au travail, l’humilité.

« Quand il vit [la quantité impressionnante de poissons qu’il a finalement pêché], Simon Pierre tomba aux genoux de Jésus et dit : "Seigneur, éloigne-toi de moi, parce que je suis un homme pécheur." » (v. 8)

Nous connaissons tous le terme de « self made man ». Par là on désigne quelqu’un qui a réussi à force de travail et d’ingéniosité. Admettons que tout s’est passé honnêtement, un examen minutieux de son parcours montrera sans doute qu’il a bénéficié de circonstances favorables, qu’il est venu au bon moment (combien ont échoué, non pas parce que leur idée était mauvaise, mais parce qu’ils l’ont eue au mauvais moment).

Pierre aurait pu dire : J’avais du nez. En fait non : la pêche miraculeuse était due à un concours de circonstances, un concours de circonstances qui s’appelle Jésus-Christ.

Pierre se rend compte : j’ai assisté à un miracle ; je vis quelque chose qui m’échappe ; ma prise est contraire à toute mon expérience et mon savoir de pêcheur. Il est assez honnête pour ne pas se vanter, pour ne pas s’attribuer la réussite de cette pêche extraordinaire. Il ne le met pas au compte de son adresse et de son savoir (en cherchant bien, il aurait sans doute trouvé un semblant de mérite), mais non il la met au compte de la main toute-puissante de Dieu.

Nous devrions tous avoir cette attitude au travail ; nous devrions tous rester humbles, même quand nous réussissons brillamment. Sans doute nous sommes-nous démené au travail, j’espère que nous avons été assidus, zélés et honnêtes, mais …

Qu’est-ce qui fait que tu as un travail et d’autres non ? Qu’est-ce qui fait que dans notre pays notre travail nous procure le niveau de vie qui est le nôtre et que dans d’autres c’est la misère bien qu’on se défonce au travail ? Ou qu’est-ce qui fait que toi tu réussisses mieux que d’autres ?

C’est le fruit de la bénédiction incompréhensible de Dieu. Dieu nous a placés dans cette situation. Cela devrait nous rendre aussi humbles qu’éminemment reconnaissants.

Voici des indications qu’on peut retirer de ce récit quant à notre attitude de chrétiens au travail.

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Voyons encore brièvement ce qui nous pousse à travailler, la cause de notre travail.

Quand Jésus ordonne à Simon Pierre et à ses compagnons d’aller au large, « là où l’eau est profonde », et d’y « jeter leurs filets pour pêcher » (v. 4), Pierre lui répond : « Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre ; mais sur ta parole, je jetterai les filets » (v. 5)

« Sur ta parole, je jetterai les filets » : voilà la cause première qui nous pousse à travailler !

C’est Dieu qui en a disposé ainsi. C’est Dieu qui l’ordonne.

Certes, tu ne l’entendras jamais dire : « Valdo, cette nuit, tu vas cuire le pain de telle manière ! » « René, aujourd’hui, arrivé au bureau, tu feras ceci ou cela ! » « Marjolaine – ou Alice – ou Martine, voilà les soins que vous apporterez à vos patients demain matin. »

Même à moi, pasteur, il ne me donne pas mon emploi du temps… Pourtant, il m’a adressé un appel dans le ministère parmi vous, il m’a appelé à travailler dans sa « boîte » !

Certes, nous savons que nous devons nous comporter en enfants de Dieu au travail. Pour ce qui et du travail des pasteurs et de l’église, il donne quelques indications supplémentaires, mais vous comme moi, moi comme vous, nous travaillons parce que Dieu nous met au travail.

Le travail est une disposition de Dieu. Cela est évident depuis le récit de la création. Et combien de fois ne trouvons-nous pas des passages bibliques du genre : « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus ! » ? (2 Th 3.10)

Le travail est un devoir sacré. En nous y consacrant nous répondons à un ordre de Dieu, nous rendons même service à Dieu en faisant sa volonté, et nous rendons service à nos prochains, que ce soit ceux de notre famille ou, par taxes et impôts interposés, à la société entière, et, par nos cotisations paroissiales, à l’avancement du Règne de Dieu dans nos cœurs et sur toute la terre.

Que le Seigneur nous aide à lui faire honneur au travail, et à travailler dans la conscience que c’est sa volonté et qu’il nous accompagne de sa bénédiction !

Amen.

Jean Thiébaut Haessig

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