lundi 12 mai 2008

Sermon du 4 mai 2008 - Culte synodal

CULTE SYNODAL
Texte : Rm 8.26-30[1]


26 « De même aussi
l'Esprit vient au secours de notre faiblesse,
car nous ne savons pas
ce qu'il convient de demander dans nos prières.
Mais l'Esprit lui-même intercède par des soupirs inexprimables ;
27 et celui qui sonde les coeurs
sait à quoi tend l'Esprit :
c'est selon Dieu qu'il intercède en faveur des saints.
28 Nous savons, du reste,
que tout coopère pour le bien
de ceux qui aiment Dieu,
de ceux qui sont appelés selon son projet.
29 Car ceux qu'il a connus d'avance,
il les a aussi destinés d'avance
à être configurés à l'image de son Fils,
pour qu'il soit le premier-né d'une multitude de frères.
30 Et ceux qu'il a destinés d'avance,
il les a aussi appelés ;
ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés ;
et ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés. »

Chers frères et sœurs de nos différentes paroisses,
que « l’Esprit » a assemblés
ici, à Châtenay-Malabry, ces jours-ci !

« Déployer et consolider ! » … « Déployer et consolider » le règne de Dieu dans nos cœurs et autour de nous, voilà le thème qui a été choisi pour cette « Assemblée Générale Synodale ». « Déployer et consolider », cette formulation a été choisie à partir de cette parole imagée du Livre du Prophète Esaïe : « Agrandis l’espace de tes tentes, […] Renforce tes piquets ! » (Es 54.2)
Nous avons entendu des exposés sur ce thème, et nous l’avons eu à l’esprit tout au long de ces journées quand nous avons réfléchi aux différents projets de résolution qui nous étaient soumis, quand nous avons eu à prendre des décisions ou à élire des responsables à certains postes.
« Déployer et consolider ! » Ce programme est si vaste – « consolider » l’Eglise, « consolider » notre foi dans le Ressuscité, et « déployer » l’Eglise pour que les ténèbres de l’incrédulité reculent autour de nous ! – ce programme est si vaste et « notre faiblesse » si grande que, parfois, « nous ne savons pas » par quel bout commencer et comment mener à terme ce dans quoi nous sommes engagés. Nos débats ont montré que, parfois, nous avions du mal à nous mettre d’accord pour définir « ce qu’il convient » de faire et « de demander dans nos prières » pour un domaine précis, une activité précise.

Notre texte tombe donc à pic. C’est celui qui est proposé par le « Plan de Lectures Bibliques » pour ce dimanche Exaudi. Paul nous y rappelle :

DANS L’EGLISE DE JESUS-CHRIST
IL SE PASSE
DES CHOSES ETONNANTES !

1. L’amour de Dieu a trouvé la parade à nos péchés ;
2. La sagesse du Saint-Esprit comble nos connaissances limitées ;
3. La puissance de Dieu surmonte notre faiblesse.

Dans l’Eglise de Jésus-Christ, il se passe des choses étonnantes, car

------ 1 ------
L’AMOUR DE DIEU
A TROUVE LA PARADE A NOS PECHES !

Nous avons beau être l’Eglise de Jésus-Christ, nous avons beau même être des personnes investies de fonctions particulières dans l’Eglise et y avoir été appelés à remplir des responsabilités particulières – par exemple ici, dans cette « Assemblée Générale Synodale » – il n’en demeure pas moins que ce moment fort d’adoration qu’est notre culte synodal comporte toujours ce passage obligé de la confession de nos péchés et de l’absolution.

Nous avons siégé, nous avons débattu. Et ceci après avoir pris cet engagement dans le culte d’ouverture : « Je promets solennellement devant Dieu et cette assemblée chrétienne qu'en tant que délégué ou responsable du Synode je serai obéissant à la Parole de Dieu, que j'en ferai mon unique guide, que je conformerai mes paroles et mes décisions à l'enseignement de l'Eglise luthérienne tel qu'il est révélé dans l'Ecriture Sainte et consigné dans ses confessions de foi, […] de façon à ce que, dans l'unité de la foi et dans la communion de l'amour, nous grandissions en celui qui est notre Chef, Jésus-Christ. »

Que celui qui pense ne jamais avoir dérogé à la communion d’amour et de fidélité se lève ! … En fait, en réponse à cette invitation, je devrais maintenant m’asseoir, moi aussi.

Qui n’a pas eu des moments d’impatience quand les débats tournaient en rond ? Qui n’a pas eu des réactions trop viscérales – ne serait-ce qu’en pensées : Dieu ne fait pas la différence – quand la position avancée par un autre était aux antipodes de la sienne ? Je ne parle pas maintenant de divergences doctrinales, mais de divergences d’appréciation d’une situation, d’une activité, d’une méthode ou d’un remède.

Certes nous avions toujours – ou croyions avoir – les meilleures intentions, mais les autres ont-ils toujours senti dans nos interventions l’expression de notre « communion d’amour » avec eux ? (cf. Ph 2.1 ; 2 Co 13.13)

Je vais m’arrêter ici, sinon ceux qui n’étaient pas présents lors des séances vont croire que nous avons passé notre temps en guerre de tranchées. Ce n’était, Dieu merci ! pas le cas, même s’il a pu y avoir des moments de discussion un peu plus tendus. Il n’en demeure pas moins : une belle et bonne assemblée générale synodale s’achève avec ce moment fort du culte synodal. Tout le monde ne sera sans doute pas satisfait de toutes les décisions. Rien de ce qui vient de nous n’est parfait.

Si j’ai mis en évidence nos carences face aux belles décisions que nous avons prises, c’est pour souligner que l’Eglise de Jésus-Christ est vraiment une drôle de réalité :
Malgré nos péchés, malgré notre culpabilité devant Dieu, il nous a « destinés d’avance à être configurés à l’image de son Fils, pour qu’il soit le premier-né d’une multitude de frères ! » (v. 29) Il nous a destinés à être « conformes à l’image de son Fils »[1].

C’est là le grand miracle : Le Fils de Dieu s’est fait homme, est devenu notre frère, « semblable » à nous dans l’abaissement (Ph 2.7), pour que nous puissions aussi être semblables à lui dans la gloire, des copies du modèle qu’il est.

Et comment Dieu s’y prend-t-il pour nous amener à cette « conformité à l’image de son Fils » dans la gloire éternelle ? – Nous le connaissons, ce chemin. Nous le confessons ainsi avec Luther : « C’est le Saint-Esprit qui m’a appelé par l’Evangile […], c’est lui qui me remet pleinement tous mes péchés, ainsi qu’à tous ceux qui croient ; c’est lui qui, au dernier jour, […] me donnera la vie éternelle en Jésus-Christ. » (Martin Luther, Petit Catéchisme, 3ème Article du Credo).
Cette séquence – 1°) appel, 2°) pardon ou justification, 3°) glorification – nous l’avons dans notre texte. Certes, Paul écrit du point de vue de notre Dieu. Lui voit le déroulement du temps comme une seul page devant ses yeux. Lui « connaît d’avance » tout ce qui va se passer.
Mais il voit aussi comment, dans son amour, il a décidé de nous faire passer, nous qui croyons en l’expiation et la résurrection de son Fils, de l’appel par l’Evangile à l’état de pécheurs pardonnés et sanctifiés, puis à la gloire céleste.

Cette vision globale de notre destinée nous remplit de joie, de paix, d’amour et de zèle pour ce Dieu Sauveur. Dans l’Eglise de son Fils, il nous fait vivre des choses étonnantes : en Jésus-Christ, son amour a trouvé la parade à nos péchés.
Dans l’Eglise de Jésus-Christ,
il se passe des choses étonnantes, car

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La sagesse du Saint-Esprit COMBLE NOS CONNAISSANCES limitées !

Nous butons chaque jour sur les limites de nos connaissances. Lors de notre Assemblée Générale Synodale, nous en avons encore fait l’expérience ici ou là.

Nous avons pris des résolutions, mais ne savons guère quels en seront finalement les bonnes ou les mauvaises surprises, quels en seront finalement exactement les fruits. Nous ne pouvons pas lire l’avenir, pas non plus celui de l’Eglise. Nous ne le connaissons pas dans le détail « car nous marchons par la foi et non par la vue. », nous rappelle Paul dans une autre lettre. (2 Co 5.7)

C’est parce que nous sommes loin de tout savoir que nous avons confronté nos expériences, nos analyses, nos craintes et nos espoirs. Nous avons confronté la façon dont nous voyons les diktats de la réalité – des statistiques synodales, par exemple, ou des finances. Nous avons réuni des majorités pour, selon les cas, amender, adopter, ajourner ou rejeter des projets et des propositions.

Mais qui dit majorité ne dit toujours pas omniscience. En tout, il y a une part d’inconnu, car si tout était connu, si nous étions omniscients, si nous voyions tout clairement dans les détails – l’avenir, les fruits de nos décisions, les solutions aux défis – nous serions tous d’accord sans débat.
Il n’en est rien, et une chose que nous avons beaucoup fait au cours de cette assemblée, c’est prier, prier dans nos cultes, prier chez nous le soir, et sans doute aussi prier en silence dans les bancs durant les débats ou les rapports.

La raison en est simple : il y en a un qui, contrairement à nous, n’est pas limité dans la connaissance des réalités, lui ne tâtonne pas dans le brouillard, lui connaît ce qui nous est caché : c’est « le Saint-Esprit ». « Nous ne savons pas » toujours ce qu’il faut faire ou décider, ni « ce qu’il convient de demander dans nos prières » (v. 26).

D’ailleurs, n’avons-nous pas coutume de terminer l’énoncé de nos projets par la phrase : « Dieu voulant ! » ? (Jc 4.15) C’est que nous savons que « tout don excellent, tout présent parfait, vient d'en haut ; il descend du Père des lumières, chez qui il n'y a ni changement ni éclipse. » (Jc 1.17)
Et pour cause ! « il sonde les cœurs » (v. 27), il « connaît tout » (1 Jn 3.20) – ce qui n’est pas notre cas, nous en sommes bien conscients. C’est pour cela que nous avons terminé certaines de nos résolutions par exemple ainsi :

« L’Eglise Evangélique Luthérienne – Synode de France et de Belgique […] »
Ø « remet avec confiance sa vie d’Eglise entre les mains du Seigneur […] ; (AGS2008–41)
Ø « dans la confiance que Dieu fait germer et croître […] » – (AGS2008–55-1)
Ø « prie le Seigneur de fortifier et de préserver la foi et l’amour de ses nouveaux membres, de nous donner les moyens financiers […] » – (AGS2008–55-3)
Ø « demande à Dieu de bénir les moyens et le dévouement ainsi mis à Son service auprès de leurs prochains […] » – (AGS2008–61)
Ø « prie le Seigneur de nous aider tous à mener de pair la consolidation biblique de nos membres et le déploiement missionnaire […] » – (AGS2008–72)
Ø « prie le Seigneur de faire fructifier tous les efforts fournis […] » – (AGS2008–74)
Nous agissons ainsi parce que nous « ne savons pas » toujours « ce qu’il convient de demander » précisément et nous nous tournons vers celui à qui rien n’est caché et dont Paul parle ici ainsi :
« L'Esprit vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas ce qu'il convient de demander dans nos prières. Mais l'Esprit lui-même intercède par des soupirs inexprimables ; et celui qui sonde les coeurs sait à quoi tend l'Esprit : c'est selon Dieu qu'il intercède en faveur des saints. » (v. 26-27)

Avons-nous toujours décidé « selon Dieu », ces jours-ci ? N’étant pas omniscients, nous demandons au Saint-Esprit de rectifier le tir en transformant nos décisions « selon Dieu », en les reformulant devant le trône de Dieu « selon Dieu ».
Et cela, il sait très bien le faire. Il sait même le faire tellement mieux que nous qu’il recourt à des « soupirs inexprimables », à « des soupirs que des mots [humains] ne peuvent exprimer, »[2] mais que Dieu comprend et approuve.

Chers amis, c’est dans cette confiance dans le Saint-Esprit Intercesseur que nous terminons cette « Assemblée Générale Synodale » aujourd’hui, dans cette confiance et avec cette prière, car la sagesse divine du Saint-Esprit comble ainsi nos connaissances limitées.

Dans l’Eglise de Jésus-Christ,
il se passe des choses étonnantes, car

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LA PUISSANCE DE DIEU
Y SURMONTE NOS FAIBLESSES !

Ah ! nos faiblesses ! Et aujourd’hui, nous parlons des faiblesses de l’Eglise. Nous pourrions parler des faiblesses de l’Eglise en général au milieu des puissances de ce monde, nous pourrions nous étendre sur les puissances qui occupent les esprits jusqu’à y devenir des idoles : le sport, les chanteurs, la carrière avant tout, l’enrichissement avant tout.

Il est toujours plus facile de parler de ces généralités : cela ne nous touche pas directement. Généralement on pense aux autres. Mais ces jours-ci, nous ne pouvons pas nous payer le luxe de nous cantonner dans les généralités. Ces jours-ci nous nous préoccupons de la réalité de notre église, de la marche de notre église, de la mission de notre église – « Déployer et consolider » –, des projets de notre église, des défis posés à notre église.

Et là, nous butons continuellement sur les faiblesses de notre Eglise. Quand nous regardons à nous-mêmes, nous butons continuellement sur nos faiblesses : faiblesse numérique, faiblesse financière – du moins en rapport avec nos projets –, faiblesse dans les connaissances bibliques de bien des membres, faiblesse dans l’engagement dans les études bibliques, par exemple, faiblesses, allons, disons-le ! de nos pasteurs qui eux aussi ne sont que des humains.
Quand nous collons ainsi le nez sur l’arbre de nos faiblesses, nous ne voyons plus la forêt de la puissance de Dieu. Pourtant, l’Eglise a été faible depuis le début ! Voyez les disciples apeurés et claquemurés au matin de Pâques ! Voyez un apôtre Paul maladif au point que son collaborateur Marc, à ses débuts, n’a pas cru en son apostolat et l’a abandonné en plein voyage missionnaire.
Paul était conscient de sa faiblesse ; il a souvent demandé à Dieu de l’en débarrasser. Et que lui a répondu Dieu ? – « Ma grâce te suffit car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (2 Co 12.9)

En a-t-elle « accompli » de grandes choses par le faible apôtre Paul, « la puissance de Dieu pour le salut » qu’est « l’Evangile » ! (Rm 1.16) Par l’apostolat de Paul, Dieu a fait naître des églises tout le long du rivage nord de la Méditerranée, de l’Asie Mineure jusqu’en Italie en passant par la Macédoine et la Grèce !
Nous ne sommes pas Paul – loin de là ! – mais c’est le même Seigneur qui bénit notre témoignage par le même Esprit, « l'Esprit de sagesse et d'intelligence, l'Esprit de conseil et de force, l'Esprit de connaissance et de crainte de l'Eternel ! » (Es 11.2)

Comme Paul l’a écrit aux Corinthiens, nous sommes bien pourvus par Dieu puisque il nous a « accordé la grâce de Dieu en Jésus-Christ ; car en lui [nous sommes] devenus riches de tout, de toute parole et de toute connaissance, puisque le témoignage du Christ a été confirmé en [nous]. » (1 Co 1.4-6)

« Riches » et faibles à la fois ! Cela rappelle le « simul justus et peccator » – « juste et pécheur à la fois » – de Martin Luther. Cela nous maintient dans l’humilité, mais nous gonfle d’espoir, de certitude et d’assurance en pensant aux promesses que Dieu a liées à l’annonce de son Evangile de grâce et de paix.

Certes, faibles nous sommes, mais, comme nous le dit Paul dans notre texte, « nous savons […] que tout coopère pour le bien de ceux qui aiment Dieu » (v. 28), « tout coopère pour le bien de ceux » qu’il a « appelés » dans sa communion de foi et de vie, de grâce et de pardon.
Il a montré plus d’une fois qu’il sait changer les choses en bien pour ceux qui placent leur foi en lui. Nous avons parlé de Paul. Nous pourrions parler de Joseph en Egypte. Et puis, nous devrions parler de chacun d’entre nous, car tout pécheurs que nous sommes, « Dieu nous a appelés à l’admirable lumière de son Fils » (1 P 2.9). Tout indignes que nous sommes, nous nous trouvons investis de responsabilités en ces jours dans la Vigne du Seigneur. Et tout faibles que nous sommes et qu’est notre église, si nous « aimons » notre Seigneur, son Eglise et sa cause, il tiendra parole : il fera « tout contribuer au bien »[3] de notre église, au bien de ceux qui l’y rencontre dans son Evangile, au bien aussi de ceux à qui nous allons apporter son puissant Evangile de grâce.

Voyez-vous, l’Eglise, ce n’est finalement pas notre affaire, mais la sienne ! Je veux dire par là : c’est lui qui nous appelle à nous réunir autour de sa Parole et de ses sacrements ! C’est lui qui nous envoie en mission malgré nos limites et nos faiblesses, malgré notre péché ! C’est lui qui a lié le succès de notre Eglise à ses moyens de grâce et au Saint-Esprit qui agit à travers eux !
Alors, croyons et ne doutons pas ! Prenons-le au mot ! Semons son Evangile dans nos paroisses et dans le monde ! « Consolidons et déployons ! » Et faisons confiance au Saint-Esprit : il nous secondera auprès du Père avec son intercession correctrice, et auprès du monde avec son action régénératrice à travers l’Evangile.

Amen.

Jean Thiébaut Haessig, pasteur
[1] Rm 8.26-29 (Segond 21) : 26 : « L’Esprit aussi nous vient en aide dans notre faiblesse. En effet, nous ne savons pas ce qu’il convient de demander dans nos prières, mais l’Esprit lui-même intercède [pour nous] par des soupirs que des mots ne peuvent exprimer. 27 : Et Dieu qui examine les cœurs sait quelle est la pensée de l’Esprit, parce que c’est en accord avec lui qu’il intercède en faveur des saints. 28 : Du reste, nous savons que tout contribue au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés conformément à son plan. 29 : En effet, ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi prédestinés à devenir conformes à l’image de son Fils, afin que celui-ci soit le premier-né d’un grand nombre de frères. »

[1] V. 29 (Segond 21)
[2] V. 26 (Segond 21)
[3] V. 28 (Segond 21)

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