dimanche 21 mars 2010

sermon du dimanche 21 mars 2010 - Judica

Texte : Lc 23.1-5

1 « Ils se levèrent tous et conduisirent Jésus devant Pilate.

2 Ils se mirent à l'accuser, disant : "Nous avons trouvé cet homme qui sème le désordre dans notre nation ; il empêche de payer les impôts à l'empereur et se présente lui-même comme le Messie, le roi."

3 Pilate lui demanda : "Es-tu le roi des Juifs ? " Jésus lui répondit : "Tu le dis. "

4 Pilate dit aux chefs des prêtres et à la foule : "Je ne trouve chez cet homme aucun motif de le condamner."

5 Mais ils insistèrent en disant : "Il excite le peuple à la révolte en enseignant dans toute la Judée, depuis la Galilée où il a commencé et jusqu'ici."

Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,

si souvent accusé !

Nous avons vu, dimanche dernier, comment, après avoir capturé Jésus dans le Jardin de Gethsémané, ses ennemis l’ont conduit au palais du grand prêtre.

Dans un premier temps, Jésus a été conduit dans l’aile du palais où habitait Anne, le précédent grand prêtre. Là, il dut supporter bien des outrages et des vexations.

Enfin, une fois que tous les membres du sanhédrin – le grand conseil juif – eurent été rameutés pour cette session nocturne, ils firent comparaître Jésus.

Il est étonnant de voir avec quelle rapidité les membres du sanhédrin se trouvèrent réunis. Ils auraient pourtant dû savoir que cette session extraordinaire était illégale en raison de son heure. Il faut savoir qu’au regard de la loi de l’Ancien Testament, Jésus a été accusé et condamné par une assemblée illégale et manipulée par son chef, le grand prêtre Caïphe.

L’occupant romain leur avait enlevé le droit de condamner à mort. Qu’à cela ne tienne ! « Ils se levèrent tous et conduisirent Jésus devant Pilate. » (v. 1)

Voyons d’un peu plus près cette foule de gens qui se rend du palais du grand prêtre à celui du gouverneur romain Ponce Pilate.

S’y trouve le grand prêtre ou souverain sacrificateur lui-même. S’y trouvent ensuite les 70 autres membres du sanhédrin. Mais s’y trouvent aussi des serviteurs en armes et hommes de confiance. En tout sans doute une centaine de personnes … peut-être plus.

En fait, dans l’histoire de la Passion du Christ, il faut que nous distinguions constamment deux histoires parallèles : les faits historiques et la dimension universelle de ce que le Christ est en train de vivre.

Il nous faut donc penser non seulement à la centaine d’accusateurs de l’époque, mais à l’humanité entière impliquée dans l’accusation de cet innocent.

Comme nous le verrons encore, nous sommes tous – nous et l’humanité entière – coupables d’avoir péché en accusant Jésus d’être coupable.

Pour bien nous rendre compte de cette terrible réalité, nous allons nous poser la question :

Y ETAIS-TU QUAND JESUS FUT ACCUSE ?

1. C’est quoi, l’accusation, au juste ?

2. Qui sont ses accusateurs ?

3. Qui est réellement l’accusé ?

X X X 1 X X X

C’est quoi, l’accusation, au juste ?

Devant le sanhédrin, le conseil suprême des Juifs, les accusations sont d’ordre religieux. Les accusateurs ont d’ailleurs du mal à produire des témoins. Cela la foutrait vraiment mal s’ils ne pouvaient pas donner un semblant de vérité à leurs accusations.

Ils en produisent finalement deux – d’ailleurs de faux témoins – qui soutiennent que Jésus a parlé de détruire le magnifique Temple construit par Hérode le Grand, et de le reconstruire en trois jours.

C’est là tout simplement une déformation de ce que Jésus avait dit à propos de sa mort et de sa résurrection trois jours plus tard.

Mais l’accusation la plus grave, c’est le grand prêtre Caïphe qui la lance en personne. Curieux, sa façon de faire : de président de séance il se fait accusateur ! Il amène Jésus à reconnaître qu’il se dit Fils de Dieu pour ensuite l’accuser d’offenser Dieu, de blasphémer contre Dieu.

Le dossier du procès contient maintenant suffisamment d’éléments – pensent-ils – pour pouvoir le condamner à mort selon la loi de l’Ancien Testament. La mort est en effet requise par la Loi de Moïse contre un blasphémateur.

Les Romains leur ayant retiré le droit de condamner à mort, ils traînent Jésus dans le quartier où réside Ponce Pilate, le gouverneur romain. Lui seul peut leur donner l’autorisation de condamner à mort et de faire exécuter un condamné.

Devant l’autorité romaine ils changent de tactique. Devant Ponce Pilate, l’accusation prend, curieusement une autre forme : de religieuse qu’elle était devant le sanhédrin, l’accusation devient politique devant Pilate. « Ils se mirent à l'accuser, disant : "Nous avons trouvé cet homme qui sème le désordre dans notre nation; il empêche de payer les impôts à l'empereur et se présente lui-même comme le Messie, le roi." » (v. 2)

Devant le gouverneur romain, les Juifs accusent Jésus de crimes contre l’Etat.

Pas bête, leur tactique, pour arriver à leurs fins. « La fin justifie les moyens » se sont-ils dit. « Nous voulons que Jésus soit condamné par Pilate ? Il faut donc que nous l’accusions de menacer l’occupant romain ! »

Il n’est même pas nécessaire de démontrer que cette accusation est ridicule, entièrement fausse, un savant mélange de mensonges purs et de demi vérités.

Le gouvernement romain ne se laisse pas prendre au piège. Il connaît fort bien les Juifs qui se sont souvent opposés à lui, qui l’ont même accusé devant l’empereur à Rome !

Pilate est intrigué par l’étrange intérêt que les chefs juifs montrent subitement pour le bien de l’Etat romain. Son interrogatoire de Jésus l’éclaire pleinement. « Pilate dit aux chefs des prêtres et à la foule : "Je ne trouve chez cet homme aucun motif de le condamner." » (v. 4)

Cela ne les décourage pas. Jésus continue d’être accusé par eux, et il continue de l’être à travers tous les siècles. De quels maux ne doit-il pas tous s’être rendu coupable !

Les uns l’appellent menteur ou trompeur, d’autres rêveur. Et dans pratiquement tous les régimes totalitaires il est dénoncé comme dangereux pour l’Etat ! Tenez, comme veulent le faire croire les Juifs à Pilate.

Ces attaques, ces critiques, ces accusations contre Jésus s’écroulent – aujourd’hui comme à l’époque – sous le poids de leur fausseté. Un jour, Jésus avait demandé à ses adversaires : « Qui de vous me convaincra de péché ? » (Jn 8.46) Il n’a pas eu de réponse.

Quant à ceux – comme Pilate – qui doivent prononcer le verdict, même s’ils ne croient pas en lui et n’acceptent pas son enseignement et son offre de pardon et de salut, s’ils sont honnêtes, ils ne peuvent que répéter le verdict du Romain : « Je ne trouve chez cet homme aucun motif de le condamner. »

Nous n’avons pas besoin qu’on nous confirme ce verdict. Son Evangile nous a convaincus de son innocence.

Jetons maintenant un regard sur

X X X 2 X X X

Les accusateurs de Jésus.

Nous y découvrons tout de suite, à leur tête, les souverains sacrificateurs, les prêtres et autres membres du sanhédrin. Ce sont, eux, les vrais initiateurs, les inventeurs, les auteurs des accusations lamentables contre le Fils de Dieu.

Mais ils ne sont pas seuls à l’accuser.

Le péché qui consiste à mettre Dieu et son Fils en accusation est, malheureusement, un péché universellement répandu. C’est un péché de l’humanité entière. Nous y trempons donc aussi d’une manière ou d’une autre.

Adam est le premier à accuser Dieu, là-bas, dans le Jardin d’Eden. Après avoir désobéi, après avoir transgressé la volonté de Dieu, Adam lui reproche d’être responsable de la chute dans le péché. « C’est la femme que tu a mise à mes côtés qui m’a donné de ce fruit, et j’en ai mangé. » (Gn 3.12) Adam n’accusait pas réellement Eve ; en fait, il accusait Dieu : « C’est toi, Dieu, qui m’as mis dans cette situation dangereuse. »

Plus tard, la femme de Job attribue aussi à Dieu la faute pour tous ses malheurs et ses peines. Elle insiste auprès de Job pour qu’il maudisse Dieu, puis meure…

Durant son périple de 40 ans à travers le désert, le peuple d’Israël accuse toujours à nouveau Dieu de ne l’avoir délivré de l’esclavage en Egypte que pour le faire périr dans le désert ; en fait, de le conduire de Charybde en Sillas.

Il oublie complètement comment Dieu les secourt chaque fois qu’ils sont en danger : de l’armée égyptienne en leur frayant un passage à travers la Mer Rouge (Ex 13.17 – 14.31) ; de la mort par la soif, en rendant potable une eau imbuvable (Ex 15.22-25), une autre fois en faisant jaillir de l’eau d’un rocher (Ex 17.1-7) ; de la mort par la faim, en envoyant la manne et les cailles (Ex 16) ; etc.

L’accusation que ses contemporains portent contre Jésus, contre l’Innocent par excellence, est tragique – qui voudrait le nier ? – mais elle n’est en fait qu’une accusation parmi une infinité du même genre. Depuis toujours, les humains essayent d’accuser leur Créateur, d’inculper leur Sauveur.

Quand on s’imagine la scène de Jésus accusé devant Pilate, il faut bien entendu y voir les grands prêtres et leurs acolytes du sanhédrin. Mais il faut aussi y voir Adam, la femme de Job, le peuple d’Israël et bien d’autres.

Question : Y étais-tu, toi aussi, parmi ses accusateurs ?

La pensée ne t’a-t-elle jamais effleuré – ne serait-ce que légèrement, ne serait-ce que furtivement – surtout quand tu te sens malheureux, quand tu es déçu dans tes espoirs, que Dieu ne se conduit pas correctement envers toi – ou envers un autre ?

T’est-il déjà arrivé d’avoir prié intensément et régulièrement pour une chose à quoi tu tenais particulièrement, puis, après une vaine attente, d’avoir reproché à Dieu de ne pas t’avoir exaucé ?

T’est-il déjà arrivé de penser que Jésus attend trop de toi ?

ð trop de temps (pour les cultes de famille, pour les études bibliques, pour les réunions de jeunes, pour ton engagement dans l’évangélisation, pour différents services dans ta paroisse) ?

ð trop de tes talents (pour exercer telle fonction ou rendre tel service dans la paroisse) ?

ð trop de ton argent ?

ð qu’il exige plus de fidélité que tu n’es prêt à lui accorder, parce que tu ne tiens pas à sacrifier trop de choses à quoi tu tiens et à quoi tu devrais renoncer ?

Qu’est-ce là d’autre qu’accuser Dieu ou Jésus d’être incapable ou infidèle, voire un despote ?

Et s’il nous arrive ainsi d’accuser Dieu, en quoi sommes-nous différents de ceux qui font injustement comparaître le Fils de Dieu devant le sanhédrin et le gouverneur romain ?

Si nous accusons Dieu, nous nous trouvons parmi la foule des accusateurs à Jérusalem.

Nous y sommes aussi à cause de nos transgressions répétées, par ex., du 8ème Commandement : « Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain ! » (Ex 20.16)

Ce qui blesse injustement notre prochain, blesse aussi le Fils de Dieu. C’est que ce commandement ne se limite pas aux fausses dépositions de témoins véreux devant un tribunal. Luther l’explique ainsi : « Nous devons craindre et aimer Dieu afin de ne pas mentir à notre prochain, le trahir, calomnier ou diffamer. » (Petit Catéchisme).

Pour un seul cas de déposition mensongère devant un tribunal, il y a sans doute au moins mille cas où de méchantes langues disent du mal des autres et les dénigrent, que ce soit au sein de la parenté, entre amis, voire, parfois, dans une paroisse.

Des bruits sans fondement et non vérifiés sont transmis sans réfléchir. Parfois on les arrange ou les complète même. Ce ne sont là que des accusations honteuses. Cela fait partie des péchés qui, à l’époque, ont blessé et tué « Jésus-Christ, le Juste » (1 Jn 2.1).

Et ceux qui écoutent ces accusations sans réagir sont autant coupables que les calomniateurs eux-mêmes.

Chers amis, si nous sommes honnêtes, nous ne pouvons pas simplement nous dresser pour condamner les Juifs qui accusent Jésus devant Pilate. Il nous faut confesser que nous sommes tout autant coupables et que nous faisons aussi, à l’occasion, partie de ses accusateurs.

Après nous être penchés sur les accusations et les accusateurs, voyons encore d’un peu plus près

X X X 3 X X X

Qui est réellement l’accusé ?

Qui voyons-nous ? Un innocent ! Pilate donne finalement l’ordre d’exécuter l’accusé, par crainte du peuple, par crainte d’une émeute s’il acquitte Jésus. Mais Pilate ne reviendra jamais sur son verdict innocentant Jésus. Tout simplement, par calcul politique, il fait exécuter un innocent.

Jésus est bien innocent. D’ailleurs, n’est il pas le Fils de Dieu pur de tout péché ? La situation est tout ce qu’il y a de plus incongrue : celui qu’on accuse et condamne n’est-il pas lui-même « le Seigneur, le juste Juge » de tous les hommes (2 Tm 4.8), « le Juge des vivants et des morts » ? (Ac 10.42) Il ne dit rien d’autre quand il déclare au sanhédrin : « Vous verrez désormais le Fils de l’homme assis à la droite du Tout-Puissant et venant sur les nuées du ciel. » (Mt 26.64)

Il est non seulement le Juge de tous, mais aussi le Sauveur unique de l’humanité. Cela aussi il l’a dit très clairement : « Le Fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup. » (Mt 20.28) Il dépose sa vie – pure, innocente et sainte – sur le plateau de la balance divine comme contrepoids au péché du monde entier, … comme contrepoids à ton péché et au mien aussi.

Heureusement que tous nos péchés – aussi ceux, abjects, de nos fausses accusations contre le Fils de Dieu – ont été effacés par son sang précieux. « En lui – le Fils bien-aimé du Père – nous sommes rachetés, pardonnés de nos péchés. » (Col 1.14)

L’époustouflant dans cette histoire c’est que ce Christ faussement accusé offre à notre foi de saisir sa justice et son innocence. Il sait : c’est le seul moyen, pour nous, de subsister devant le Dieu trois fois saint.

« Voyez quel amour le Père nous a témoigné, » voyez tout ce qu’il a mis en œuvre, voyez jusqu’où il est allé, « pour que nous soyons appelés enfants de Dieu, » nous, les accusateurs de son Fils ! (1 Jn 3.1)

Face à tant d’amour nous ne pouvons que ressentir de la répulsion pour ce péché, cette tendance à accuser Dieu et son Fils, sous quelque forme que ce soit.

Tenons en bride nos pensées et nos lèvres pour ne pas répandre de calomnies sur le compte de nos prochains et ne pas ainsi blesser Jésus à nouveau.

Efforçons-nous de toujours dire la vérité et d’agir en conséquence.

La vérité – pas la nôtre, celle de Dieu et de sa Parole ! – voilà ce dont nous avons le plus besoin. C’est là la chose indispensable, essentielle, dans nos vies.

Soyons-lui éternellement reconnaissant de posséder en lui cette vérité, car il est « le chemin, la vérité et la vie » ! (Jn 14.6)

Amen.

Jean Thiébaut Haessig


Chants proposés :

Ouverture :

Jésus est notre ami suprême ; Oh ! quel amour AeC 413:1-4

Avant le sermon :

Tel que je suis, sans rien à moi, AeC 420:1-4

Après le sermon :

Tu m’as aimé, Seigneur, avant que la lumière AeC 430:1-2*

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